Point de vue américain sur les élections européennes de 2014

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29 janvier 2014 - France

Le 29 janvier 2014, le cabinet Lysios Public Affairs a organisé en partenariat avec la Fondation Robert Schuman à Bruxelles un débat intitulé "European Resurgence or European Shutdown? An American Perspective on the 2014 European Elections" (Renaissance ou décadence de l'Europe ? Point de vue américain sur les élections européennes de 2014). Jean-Dominique Giuliani, Président de la Fondation, a débattu avec Tyson Barker, directeur de la Bertelsmann Foundation en poste à Washington.

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Face à la crise économique et financière et la montée de l'euroscepticisme, comment l'Union européenne réagit-elle ? "Il ne faut jamais oublier le long terme", a souligné Jean-Dominique Giuliani. Au début de la construction européenne, personne n'aurait pu imaginer le chemin jusqu'auquel les Européens sont parvenus. Nous faisons face à la première grande crise économique et financière. Nombreux sont ceux qui ont cru que l'Union rentrerait également en crise mais elle s'est plutôt consolidée. "L'Union européenne, c'est la stabilité", a-t-il rappelé et notamment grâce à ses traités, il n'est pas possible de retourner en arrière. Par ailleurs, la Banque Centrale Européenne (BCE) est perçue comme un partenaire solide. Les Etats-Unis sont peut-être la première puissance globale, mais la première puissance économique est l'Union européenne. Pour comprendre les réactions vis-à-vis de la crise économique et financière, il faut se tourner vers les Etats membres de l'Union. Aujourd'hui nous constatons le chemin parcouru. Les Etats européens ont accompli de grands projets : le fonds d'investissement européen, le "two pack", le "six pack", le Pacte budgétaire européen, sans oublier de nombreux accords bilatéraux entre Etats membres. Ces progrès n'auraient pas été envisageables avant la crise. Il est révélateur de remarquer le changement de mentalité allemand : au départ, ils étaient réfractaires à la solidarité et aujourd'hui cela n'est plus le cas. La réponse à la crise a nécessité la mobilisation d'une quantité d'argent très impressionnante, l'équivalent de trois plans Marshall. Toutefois, il convient de rappeler que ces sommes ont été mobilisées mais pas forcément dépensées. Jean Dominique Giuliani conclut en soulignant que, de part sa structure, l'Union européenne a plus de difficulté à gouverner que les Etats-Unis. Les défis actuels sont : soutenir la compétitivité, encourager la croissance, mettre les finances publiques en ordre et sauver l'économie grecque, espagnole et irlandaise - même si cette dernière a obtenus des avancées significatives. L'Union européenne sortira renforcée et consolidée de la crise. Tyson Barker, a commencé par mettre en avant la nature des liens économiques entre les Etats-Unis d'Amérique et l'Union européenne. Les relations commerciales avaient la conséquence de raisons stratégiques même si au fil du temps, les relations sont de plus en plus axées sur des sujets économiques. Les Etats-Unis se sont rapprochés de l'Europe d'abord avec l'élargissement de l'OTAN, ensuite avec les négociations pour l'accord transatlantique sur le commerce et l'investissement (TIPP) qui sont actuellement en discussion. Tyson Barker a fait un parallèle entre la réaction de l'Union européenne face à la crise, et la construction américaine. En effet, tous deux ont accompli un chemin centripète voir fédéral. Il y a deux cent ans, les Etats-Unis faisaient référence à leur nation comme plusieurs Etats s'unissant. Ainsi, lorsqu'ils parlaient des Etats-Unis, ils l'abordaient en utilisant le pluriel ; ceci n'est plus le cas aujourd'hui et les Etats-Unis d'Amérique sont considérés comme une seule nation, un seul Etat. Le mouvement fédéral est né en cinq étapes : - Des fonds fédéraux et une taxation fédérale ont été mis en place. - Les opposants se sont affrontés lors de la guerre civile qui a finalement renforcée le mouvement centriste. Les droits civils, la protection des citoyens ont été consacrés. - La banque centrale américaine a été mise sur pied. Elle a reçu deux mandats : soutenir la croissance et le plein emploi ainsi qu'assurer la stabilité des prix. La Banque Centrale Européenne, n'a que les compétences pours assurer le second mandat. - Le "New Deal" fut un grand moment fédérateur où la sécurité sociale est établie, le salaire minimum imposé, des grands projets d'infrastructures sont mis sur pied, et de nombreuses régulations fédérales voient le jour. Cette période peut s'apparenter à la construction de l'Union bancaire pour l'Union européenne. - La dernière phase se concrétise avec des projets fédéraux comme le "medi-care", le "civil right act", le "welfare programme" ou encore le "art and humanitary programme". Tyson Barker a conclu que chaque mouvement fédérateur a connu ses contre-mouvements. Par ailleurs, la construction européenne est plus complexe de part l'histoire des Etats européens alors que les Etats-Unis se sont construit avec de jeunes structures étatiques. La zone euro, une zone de stabilité : l'Europe est protégée des ouragans mais à l'intérieur il n'y a pas de vent pour naviguer. Il n'y a ni cauchemar, ni rêve. Les Etats-Unis ont trois moyens d'action : les politiques monétaires, fiscales et commerciales. Grâce aux politiques monétaires, il est possible de soutenir l'emploi ; les politiques fiscales servent de stimulus à l'économie et le commerce génère de nouveaux marchés. L'Union européenne n'a pas de politique monétaire puisque la Banque Centrale Européenne ne lui a pas donné le mandat de plein emploi. Concernant les politiques fiscales, les stimuli que "Bruxelles" peut créer sont minces même s'ils ne sont pas inexistants par exemple avec le pacte budgétaire. Le réel instrument de l'Union est l'ouverture des marchés grâce à ses accords de libre-échange. L'Union soutient les politiques commerciales en créant un ensemble de régulations. Jean-Dominique Giuliani a souligné que la BCE n'avait peut-être pas deux mandats comme la banque centrale américaine, toutefois Mario Draghi a su être inventif et changer les modes d'intervention et créer de nouveaux instruments. Que pensez-vous de la nomination du président de la Commission européenne ? La majorité des Etats membres ont des coalitions au gouvernement ce qui mène à la nomination d'une personnalité de haute qualité et plus consensuelle. La nomination du président de la Commission européenne, est une nouvelle procédure dont l'application est encore à définir et qui fera ses preuves pour la première fois, en mai 2014. L'Europe a-t-elle une crise de leadership ? Tyson Barker est d'accord avec l'intervenant et estime que l'Europe n'a pas beaucoup de leader, cependant ils sont plus impressionnants qu'auparavant. Jean-Dominique Giuliani suggère qu'en raison d'un certain confort, les politiciens restent au niveau national. Le système ne permet-il pas aux personnalités d'émerger ? Il y a des barrières structurelles, comme l'élection indirecte de la Commission européenne ou encore le fait qu'il n'y a pas de circonscription européenne. Pour être élu au Parlement européen, il est plus efficace de négocier au sein de son parti la place sur la liste que d'aller à la rencontre de ses concitoyens. Barack Obama viendra à Bruxelles le 26 mars 2014 mais n'y passera qu'un jour alors qu'il reste par exemple deux jours à La Haye. N'est-ce pas révélateur de l'importance de l'Union européenne pour les Etats-Unis ? Tyson Barker répond que le président américain a accordé énormément de son temps à l'Europe lors de la crise de l'euro. Par ailleurs, il a envoyé un des hommes dans lequel il a le plus confiance et qui a une large marge de manœuvre. Ainsi, les Etats-Unis prouvent leur engagement à l'égard de l'Europe de part leur représentant présent à Bruxelles. Jean-Dominique Giuliani a conclu la conférence en mettant en avant la différence entre les Européens et les Américains. L'Europe doute constamment, c'est dans sa nature, alors que les américains sont plus optimistes et croient dans le rêve américain. Ce n'est pas la même philosophie.

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18 juin 2025 au 18 juin 2025

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La Fondation Robert Schuman a présenté le Rapport Schuman sur l'Europe, l'état de l'Union 2025 au Parlement européen à Strasbourg. En présence de Fabienne Keller et Younous Omarjee,  un temps d’échange riche autour des défis actuels de l’Union européenne a eu lieu : géopolitique, transition écologique, souveraineté numérique, participation démocratique, autant de sujets essentiels à notre avenir commun.