Elections législatives en France 10 et 17 juin 2007

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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21 mai 2007
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Fondation Robert Schuman

Elections législatives en France 10 et 17 juin 2007

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Cinq semaines après avoir élu leur Président de la République, 44,5 millions de Français sont appelés aux urnes les 10 et 17 juin prochains pour renouveler l'Assemblée nationale, Chambre basse du Parlement.

La campagne officielle des élections législatives débute le 21 mai.

Le système politique français

Le Parlement français est bicaméral et comprend l'Assemblée nationale, Chambre basse, qui compte 577 députés élus au suffrage universel direct pour 5 ans, et le Sénat, Chambre haute, dont les 331 membres sont élus pour 6 ans au suffrage universel indirect.

Les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours au sein de 577 circonscriptions. Pour être désigné au premier tour de scrutin, un candidat doit recueillir la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à au moins un quart des électeurs inscrits. Si aucun candidat n'est élu lors du premier tour, un deuxième tour est organisé le dimanche suivant. Tous les candidats ayant obtenu au moins 12,5% des inscrits au premier tour peuvent se maintenir au second tour.

L'âge minimum requis pour se présenter aux élections législatives est de 23 ans.

Depuis le 28 juin 1999, la parité hommes/femmes figure dans la Constitution dont l'article 3 stipule que "la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives". La responsabilité de mettre en oeuvre ce principe de parité repose sur les partis politiques que la loi du 6 juin 2000 oblige à présenter à tous les scrutins de liste (soit les élections municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants et les élections régionales) 50% de candidats de chaque sexe, faute de quoi les listes sont déclarées irrecevables. En ce qui concerne les élections législatives, la loi électorale pénalise financièrement les formations ne présentant pas 50% de candidats de chaque sexe, à 2% près, en diminuant l'aide qu'un parti reçoit de l'Etat d'un pourcentage égal à la moitié de l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe rapporté au nombre total de candidats.

Le problème principal de l'application de la loi sur la parité réside dans la faiblesse des sanctions financières. Celles-ci ne sont pas assez contraignantes, laissant la liberté de choix aux formations politiques de ne pas respecter la loi ! Les élections législatives de juin 2002 ont été l'occasion de constater que les partis préféraient souvent payer une amende plutôt que de féminiser leurs candidatures, ce qui, dans de nombreux cas, signifie remplacer des députés sortants par des femmes. En juin 2002, les seuls partis à avoir respecté une exacte parité ont été les partis d'extrême gauche (Lutte ouvrière, LO, la Ligue communiste révolutionnaire, LCR) et les Verts. Avec 48,85% de candidates, le Front national (FN) n'était pas loin du but, le Parti communiste (PCF) a présenté 43,95% de femmes parmi ses candidats. En revanche, l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) a présenté 19,93% de candidates, l'Union pour la démocratie française (UDF), 19,68% et le Parti socialiste (PS), 36,13%. A l'issue de ce scrutin législatif, l'UMP a dû régler une amende de 4 millions d'euro, le PS de 1,5 million et l'UDF de 600 000 euro. Un très faible pourcentage de femmes ont été élues à l'Assemblée nationale en juin 2002 (12,3%), ce qui place la France 24e sur 27 Etats membres de l'Union.

4 formations politiques sont représentées dans l'actuelle Assemblée nationale :

- l'Union pour un mouvement populaire (UMP), formation du Président de la République Nicolas Sarkozy qui a succédé le 16 mai à Jacques Chirac (UMP). Actuellement majoritaire, le parti, positionné à droite sur l'échiquier politique, compte 359 députés ;

- le Parti socialiste (PS), principale formation d'opposition dirigée par François Hollande, possède 149 sièges ;

- l'Union pour la démocratie française (UDF), formation centriste longtemps située au centre-droit de l'échiquier politique et dirigée par François Bayrou qui a lancé le 10 mai dernier le Mouvement démocrate (MoDem). Comptant 29 députés dans l'Assemblée nationale sortante, les élus de l'UDF sont cependant une minorité à avoir suivis François Bayrou, la grande majorité (23) ayant préféré rejoindre la majorité présidentielle emmenée par Nicolas Sarkozy ;

- le Parti communiste (PCF), formation dirigée par Marie-George Buffet, possède 21 sièges.

De plus 14 députés sont non-inscrits dont :

- les Verts, parti situé à gauche sur l'échiquier politique et dirigé par Cécile Duflot depuis janvier 2007, compte 3 députés ;

- Le Parti radical de gauche (PRG), formation dirigée par Jean-Michel Baylet, possède 7 sièges ;

- Le Rassemblement pour la France (RPF), parti de droite de Charles Pasqua, compte 2 députés ;

- Le Mouvement pour la France (MPF), parti du candidat malheureux à la dernière élection présidentielle, Philippe de Villiers (2,24% au premier tour), compte 2 députés.

5 sièges sont vacants.

Les enjeux des élections législatives

Suivant de très peu l'élection présidentielle des 22 avril et 6 mai derniers, le scrutin législatif doit permettre au nouveau Chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, d'obtenir une majorité lui permettant de gouverner dans les cinq années à venir. La dynamique engendrée par l'élection présidentielle, les bons résultats obtenus par la droite les 22 avril et 6 mai derniers - et le faible score des formations de gauche – permettent à l'UMP d'espérer une victoire aux élections législatives des 10 et 17 juin prochains.

Nicolas Sarkozy a demandé à son Premier ministre François Fillon de conduire la campagne de l'UMP. Le Président de la République avait pourtant déclaré durant sa campagne électorale qu'il revenait "à celui qui est élu et non pas à celui qui est nommé" de le faire. "La première de mes priorités, c'est de gagner la bataille des élections législatives. Si nous n'avons pas de majorité à l'Assemblée nationale, nous ne pouvons rien faire des engagements que le Président de la République a pris" a déclaré, le 17 mai, François Fillon, qui est candidat dans la 4e circonscription de la Sarthe où il sera opposé à Stéphane Le Foll, bras droit du leader du Parti socialiste, qu'il avait battu au premier tour des élections législatives de juin 2002 avec 55,21% des suffrages (contre 25,06%).

Dans la lignée du Pacte présidentiel porté par sa candidate Ségolène Royal à l'élection présidentielle et sous le slogan "La gauche qui agit, la gauche qui protège", le Parti socialiste a publié, le 14 mai dernier, son programme. Celui-ci, qui met en garde contre les intentions de Nicolas Sarkozy à la tête de l'Etat, met l'accent sur quatre grands principes : la vérité, la protection, le dialogue et le renouvellement des pratiques politiques, des institutions et de l'action politique. La formation reprend ses propositions de créer des "emplois tremplins", de porter le salaire minimum (SMIC) à 1 500 euro, d'instaurer un revenu social d'activité pour tout chômeur reprenant un emploi rémunéré, de construire 120 000 logements sociaux par an, de lutter contre les discriminations, de créer un mandat unique pour les parlementaires, d'instaurer une part de scrutin proportionnel aux élections législatives et de réduire la dette. Le Parti socialiste redit également son attachement à une Europe qui protège et sa volonté de voir la croissance figurer au cœur des objectifs de la Banque centrale européenne (BCE). La formation souhaite que le traité établissant une Constitution pour l'Europe soit renégocié et simplifié et enfin soumis de nouveau à référendum en France.

Le Parti socialiste, affaibli par sa défaite à l'élection présidentielle et rongé par des querelles intestines, testera lors du scrutin législatif sa capacité de rassembler les forces de gauche. François Hollande conduira la campagne des élections législatives. "C'est le rôle du premier secrétaire du parti" a-t-il déclaré. L'autorité du leader du Parti socialiste a été fortement contestée ces derniers jours. Dominique Strauss-Kahn a ainsi affirmé que François Hollande était "le principal responsable de l'échec" de Ségolène Royal à l'élection présidentielle. "On est tous responsables à la mesure des responsabilités qu'on a exercées. Plus la responsabilité est grande, plus on est responsable" a-t-il indiqué. "La défaite était évitable, nous pouvions l'emporter. Si notre candidate n'a pas été élue, c'est aussi parce que son Pacte présidentiel n'a pas convaincu" a affirmé Claude Bartolone, proche de Laurent Fabius. Ce dernier a lui-même déclaré : "Nous n'avons pas convaincu suffisamment que notre candidate pouvait être Chef de l'Etat".

Cependant, Ségolène Royal est indéniablement parvenue à créer un lien direct avec les électeurs, mais aussi avec les militants, qui pourrait bien perdurer au-delà de la campagne. La candidate socialiste a toutefois bousculé l'appareil du parti, un appareil qui pourrait lui manquer à l'avenir. En dépit de la pression exercée sur elle par plusieurs de ses amis, Ségolène Royal a décidé de ne pas se présenter aux élections législatives. Considérant qu'il était important "d'avoir une cohérence entre les discours et les actes et non pas seulement en fonction des circonstances", elle ne cumulera pas un mandat de député avec celui de présidente de la région Poitou-Charentes. Delphine Batho sera donc la candidate de la 2e circonscription des Deux-Sèvres dont Ségolène Royal est l'élue depuis 1988.

Le Parti socialiste a réservé, en échange d'un accord de désistement automatique pour le candidat PS au deuxième tour, 32 circonscriptions au Parti radical de gauche (PRG) et 10 au Mouvement républicain et citoyen (MRC), formation de gauche fondée en 2003 par l'ancien ministre Jean-Pierre Chevènement. S'estimant lésés par l'offre, les Verts ont refusé les 14 circonscriptions (dont 6 ou 7 gagnables) que leur a proposé le PS. Les écologistes présenteront donc 577 candidats le 10 juin prochain. Le Parti socialiste a annoncé qu'il ne présenterait pas de candidat contre les trois députés verts sortants candidats à leur réélection (Noël Mamère, Yves Cochet et Martine Billard) ainsi que face à François de Rugie, candidat dans la 1ère circonscription de Loire- Atlantique.

Le Mouvement démocrate (Modem), lancé le 10 mai par François Bayrou et qui se veut "une force politique nouvelle, indépendante et ouverte", présentera 535 candidats. "Nous pouvons espérer un groupe d'une quarantaine de députés" affirmait un responsable de l'équipe de François Bayrou au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle. Un espoir quelque peu inconsidéré compte tenu du mode de scrutin majoritaire en vigueur aux élections législatives qui handicape fortement la nouvelle formation, L'important est moins de recueillir des suffrages que de remporter des sièges. Seuls des accords de désistement semblent en mesure de permettre au Mouvement démocrate d'exister après le 17 juin, l'UMP ayant clairement annoncé sa volonté d'être présente dans chaque circonscription où le MoDem présentera un candidat. Le Mouvement démocrate a décidé, à 6 exceptions près, de ne pas présenter de candidat contre les députés sortants qui ont soutenu François Bayrou lors du premier tour de l'élection présidentielle. Ce dernier s'est pour l'heure refusé à envisager toute alliance électorale avant le premier tour de scrutin. "Nous verrons ensuite quels sont les candidats qui peuvent se maintenir au second tour" a-t-il déclaré.

Lors du premier tour de l'élection présidentielle le 22 avril, François Bayrou est arrivé en tête dans seulement quatre circonscriptions (les quatre dans son département des Pyrénées-Atlantiques) et deuxième dans environ 40 autres. Il franchit le seuil de 12,5% des inscrits dans 469 circonscriptions sur 577. Toutefois, la participation, exceptionnelle le 22 avril dernier, a peu de chance d'être aussi élevée le 10 juin prochain.

Parmi les cinq députés restés fidèles à François Bayrou, Anne-Marie Comparini sera candidate dans la 1ère circonscription du Rhône, Gilles Artigues dans la 1ère de la Loire, Jean-Christophe Lagarde dans la 5e de Seine-Saint-Denis et Jean Lassalle dans la 4e des Pyrénées-Atlantiques. Le dernier, Gérard Vignoble, député de la 8e circonscription du Nord, a renoncé à se présenter aux prochaines élections législatives où il aurait été opposé à Salem Kacet (UMP), son propre médecin traitant qui lui a sauvé la vie. "Je ne peux pas, je ne pouvais pas faire une campagne contre un homme que je respecte profondément" a-t-il expliqué.

François Bayrou sera candidat dans sa circonscription, la 2e des Pyrénées-Atlantiques, où il est régulièrement élu depuis 1986. Son ancienne directrice de la campagne présidentielle et numéro deux du Mouvement démocrate, Marielle de Sarnez, se présente dans la 11e circonscription de Paris où elle sera opposée au député sortant, Yves Cochet (Verts). Enfin, l'ancien ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Promotion de l'égalité des chances du gouvernement de Dominique de Villepin (2005-2007), Azouz Begag, défendra les couleurs du MoDem dans la 3e circonscription du Rhône.

Les autres forces en présence

Sur la gauche de l'échiquier politique, le Parti communiste ne devrait pas conserver son groupe parlementaire (un minimum de 20 députés est requis pour la constitution d'un groupe politique à l'Assemblée nationale). Sept élus pourraient conserver leur siège : Jean-Pierre Brard, Jacques Dellasangre, Patrick Braouezec, André Gérin, Alain Bocquet, Daniel Paul et la leader du parti, Marie-George Buffet (qui a recueilli 1,94% des suffrages lors du premier tour de l'élection présidentielle). Le Parti communiste présente 518 candidats aux élections législatives et soutiendra une dizaine de personnalités "anti-libérales".

La Ligue communiste révolutionnaire (LCR), qui entend "organiser la résistance face à Nicolas Sarkozy" et "s'opposer à la droite dure au pouvoir et à une gauche molle qui cherche une coalition avec le centre", présente 460 candidats, un record pour la formation d'extrême gauche qui n'était présente que dans 420 circonscriptions lors des dernières élections législatives des 9 et 16 juin 2002. Fort des 4,11% des voix qu'il a obtenues le 22 avril dernier, Olivier Besancenot veut reconstruire autour de sa formation l'unité "de la gauche de la gauche". Lutte ouvrière (LO) d'Arlette Laguiller (1,34% des suffrages le 22 avril dernier), sera également présente dans presque toutes les circonscriptions.

A droite, le Mouvement pour la France, dont le leader Philippe de Villiers avait appelé à voter en faveur de Nicolas Sarkozy au deuxième tour de l'élection présidentielle, devrait conserver ses deux sièges (occupés par Véronique Besse et Joël Sarlot) en Vendée, puisque l'UMP ne présentera pas de candidat dans ces 2 circonscriptions. Au total, le Mouvement pour la France présente 400 candidats le 10 juin prochain.

A l'extrême droite, le Front national affirme qu'il sera en état de se maintenir dans 237 circonscriptions, mais ce chiffre est, selon toute vraisemblance, surestimé. Selon les instituts d'opinion, le Front national pourrait, au mieux, être présent au deuxième tour dans 77 circonscriptions. Jean-Marie Le Pen, leader du parti et candidat malheureux à la dernière élection présidentielle (10,44% des suffrages le 22 avril), a annoncé qu'il dirigerait lui-même la campagne pour les élections législatives. Sa fille, Marine, qui pourrait lui succéder à la tête du Front national, sera candidate dans la 14e circonscription du Pas-de-Calais.

Autre formation d'extrême droite dirigée par Bruno Mégret, le Mouvement national républicain (MNR) présentera 430 candidats le 10 juin prochain.

Chasse, pêche, nature et traditions (CPNT), formation du candidat à l'élection présidentielle, Frédéric Nihous (1,15% des suffrages le 22 avril), sera également présente dans presque toutes les circonscriptions. Frédéric Nihous sera d'ailleurs opposé à François Bayrou dans la 2e circonscription des Pyrénées-Atlantiques.

Une douzaine d'autres formations politiques présenteront également des candidats, dont le mouvement de la gauche alternative.

A un mois du scrutin, l'ensemble des enquêtes d'opinion donnent l'Union pour un mouvement populaire (UMP) largement vainqueur du prochain scrutin législatif. Un sondage publié le 15 mai dernier par l'institut Ifop crédite l'UMP de 37% des intentions de vote, contre 28% pour le Parti socialiste. Le Mouvement démocrate recueillerait 14% des suffrages, le Front national 7%, le Parti communiste 4%, les Verts 4% et les formations d'extrême gauche 3%.

Le principal enjeu des élections législatives réside en fait dans l'ampleur de la victoire de l'UMP que tous les observateurs de la vie politique anticipent. Cependant, deux autres questions, essentielles pour la configuration future de la scène politique, se posent : dans quelle mesure le Parti socialiste parviendra t-il à rassembler les opposants au projet politique de Nicolas Sarkozy ? et quelles seront les performances électorales de la nouvelle formation centriste, le Mouvement démocrate, a priori fortement désavantagée par le mode de scrutin majoritaire ?

Rappel des résultats des premier et deuxième tours

des élections législatives des 9 et 16 juin 2002 en France

Premier tour

Participation : 64,52%

Source : Assemblée nationale

Deuxième tour

Participation : 57,69%

Source : Assemblée nationale

Elections législatives en France 10 et 17 juin 2007

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