L'UE et ses voisins orientaux
Virginie Symaniec
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Virginie Symaniec
1 - Penser l'Etat-nation
Lorsqu'en 1991, suite à la décomposition de l'URSS, l'ancienne république socialiste soviétique de Biélorussie proclame son indépendance, une relation d'équivalence est pour la première fois instaurée entre langue, Etat et Nation.
Avec le recul, la manière dont se pense cette relation d'équivalence peut paraître aujourd'hui équivoque à plus d'un titre.
D'un côté, les défenseurs de l'indépendance, majoritairement réunis autour du Front populaire de Biélorussie (BNF), alors dirigé par Zianon Pazniak, partagent une vision essentialiste du rapport entre langue et nation plutôt inspirée par la philosophie romantique allemande.
Selon cette conception, la langue est une sorte de « marque déposée » de la nation, prouvant son existence autant que sa vitalité.
Langue et nation préexistent donc à l'Etat. Mais contrairement au modèle français, la langue standard imposée par ce dernier n'est pas nécessairement celle de la nation. Les langues nationales peuvent donc entrer en conflit avec la langue que cherche à imposer l'Etat. Dans cette logique, les nations peuvent aussi entrer en conflit avec l'Etat à partir du moment où ce dernier s'en prend à leur langue, expression même de leur existence.
Ce modèle de pensée permettait de remettre en question l'Etat soviétique, tout en s'appuyant sur la réalité de la politique soviétique des nationalités où l'équation entre Etat et nation n'était pas de mise. La proclamation d'indépendance de la Biélorussie, suite à l'effondrement de l'URSS, a donc pu être interprétée, dans certains milieux, comme une victoire de la nation des Biélorussiens sur l'Etat soviétique, par ailleurs dénoncé comme invention et instrument de domination de la seule nation des Russes.
Dans ce contexte, et du point de vue nationaliste, utiliser le biélorussien consistait donc à montrer que la nation était toujours bel et bien vivante, qu'elle entendait rompre avec la domination d'un Etat que l'usage linguistique contribuait à marquer de façon « ethnique ». Dans le même temps, parler le biélorussien permettait d'entériner une rupture idéologique avec le régime soviétique.
Reste que le BNF n'accéda jamais au pouvoir en Biélorussie.
Certes, le gouvernement de Stanislas Chouchkevitch put toutefois reprendre à son compte et soutenir certains actes symboliques soutenus par le BNF, mais il fut aussi confondu à tort avec ce mouvement. Outre sa volonté d'orienter la Biélorussie vers l'Europe, ce gouvernement revendiquait surtout, et pour la première fois, l'instauration d'une relation d'équivalence entre langue, Etat et nation.
Tout en intronisant le biélorussien langue d'Etat de la nouvelle république, Stanislas Chouchkevitch posa que l'Etat, nommé dans la langue de la nation des Biélorussiens – BELARUS' [1] - devenait celui des Biélorussiens (Belarusy). Dans le même temps, ce nouveau dispositif rendait possible le développement d'une pensée « contractualiste » de l'Etat-nation à la française où la nationalité pouvait être considérée comme égale à la citoyenneté et où la langue imposée par l'Etat devait permettre d'unifier une communauté politique désireuse de démocratie et susceptible de se tourner vers l'Europe.
2 - Diviser pour mieux régner
Les événements n'abondèrent toutefois pas dans ce sens.
Dans le contexte d'une situation économique difficile, les phénomènes linguistiques furent utilisés comme instruments de division politique et sociale aussi bien que pour opposer deux visions présentées comme contradictoires de la construction nationale.
Une analyse de surface des phénomènes linguistiques permettait d'établir l'existence d'une fracture civilisationnelle entre deux groupes qu'on s'efforçait de territorialiser.
A l'instar du modèle appliqué à l'Ukraine, il fut admis que les Biélorussianophones résidaient plutôt à l'Ouest du pays tandis que les russophones résidaient plutôt à son Orient.
Tel Janus, le pays semblait désormais doté de deux visages contradictoires.
3 - La langue comme stratégie d'accession au pouvoir
C'est dans cet environnement de discours que, le 28 janvier 1994, Stanislas Chouchkevitch fut démis de ses fonctions et remplacé par Miatcheslav Grib. L'instauration d'un régime présidentiel qui prévoyait l'élection d'un président au suffrage universel est votée et, la même année, Aliaksandr Loukachenka, « l'outsider » de l'époque, est plébiscité au suffrage universel avec 81,1 % des voix au second tour sur la base d'un programme anti-corruption.
Si ce dernier fait son discours d'investiture en biélorussien, il ne fait pas moins le choix de s'adresser au peuple dans la « langue du peuple » qui ne correspond ni au russe, ni au biélorussien normés.
Cette langue sans grammaire est également appelée «trasianka », terme qui, au sens propre, signifie un mélange de foin et de paille destiné à nourrir les bovins.
Le terme « trasianka » fut certainement le qualificatif le plus employé par les intellectuels de l'époque pour définir la langue du président au début de son premier mandat. Le jeu sur la langue et les niveaux de langue du premier président de Biélorussie participait pleinement à la légitimation d'un régime politique de type populiste. Aliaksandr Loukachenka se présentait comme étant ce candidat qui, parlant « la langue du peuple », comprenait le peuple. Proche du peuple, et parlant sa langue, il pouvait s'ériger en son principal porte-parole. Le rapport d'intercompréhension et de proximité instauré entre le président et son peuple par le truchement de la langue permettait de passer outre tout type d'intermédiaires (partis politiques, Parlement, intellectuels, etc.) comme de montrer, par comparaison, leur inefficacité à entretenir un dialogue « direct » avec la population.
Par sa langue d'usage, le président biélorussien promouvait une forme de charisme perçu comme digne résultat de ses origines populaires, ce qui lui permettait de se présenter comme défenseur légitime de la « souveraineté du peuple ».
Rien de plus symptomatique qu'un de ses premiers gestes de politique intérieure fut de vouloir mettre un terme à « la question linguistique ».
Le référendum de mai 1995 permit, entre autres, de rétablir la langue russe comme langue officielle à côté du biélorussien, détrôné de son tout récent statut de langue d'Etat obtenu en 1991. Le retour au bilinguisme officiel, comme du temps de l'URSS, semblait toutefois se fonder sur une promotion de la langue russe, ne laissant aux citoyens de Biélorussie que l'illusion du choix.
4 - Des références équivoques
Progressivement, Aliakasandr Loukachenka met en place un régime autoritaire dont les premières victimes sont les intellectuels biélorussianophones. Depuis le référendum de 1995, les défenseurs de la langue biélorussienne ont cherché à alerter l'opinion internationale sur la possible disparition de leur langue, ce qu'ils assimilent à la disparition possible de leur nation. Leur lutte n'a souvent recueillie que peu d'échos en France où la pensée des phénomènes linguistiques propres à la Biélorussie a souvent été analysée à la lumière de conceptions héritées du Traité de Versailles.
Les questions relatives à la construction nationale biélorussienne ont en effet longtemps semblé ne devoir être analysées qu'à la lumière de la vieille thèse de Meillet qui affirmait, en 1913, que « les grands pays sont ceux qui disposent de grandes langues qui développent de grandes cultures ; les mouvements nationalistes développent de petites langues barbares qui conduisent à l'anarchie et sont donc moralement douteuses. (…). Il faut donc laisser ces langues particulières à des groupes sociaux bornés, comme les paysans, qui sont sans horizons larges et résignés à une culture élémentaire. Non seulement, ces langues particulières sont des langues de dégénérescence sociale, mais elles bloquent les communications [2]».
Ce type de jugements sur la petite langue biélorussienne a justement été ravivé, puis entretenu, par la propagande présidentielle au cours de la campagne référendaire de mai 1995. La collaboration de certains biélorussianophones au nazisme lors de la Seconde Guerre mondiale servit d'argument pour affirmerque la langue biélorussienne était « intrinsèquement » une langue de fascistes. De dérapages en autres dérapages, tous les locuteurs biélorussianophones devaient être désormais considérés comme des fascistes.
Toujours selon l'idée que la langue peut être associée à un contenu comme par « nature », les phénomènes linguistiques propres à la Biélorussie ne furent longtemps plus présentés que comme des actes politiques.
Pour les uns, la Biélorussie se divisait entre biélorussianophones, minoritaires, dont l'aspect marginal du comportement linguistique passait pour être la preuve d'une incapacité « naturelle » à penser en termes de haute culture et de démocratie, et les russophones, majoritaires, dont le comportement linguistique passait pour être le gage d'une aspiration « naturelle » à accéder à la civilisation au sein d'un empire de Russie légitimement reconstitué comme était censée en témoigner la langue d'usage dominante de la population.
Pour les autres, la Biélorussie pouvait se diviser entre biélorussianophones, certes minoritaires, mais dont le comportement linguistique passait pour être la preuve qu'existait une volonté d'affranchissement du totalitarisme soviétique - fondé, selon eux, comme par « nature » sur la langue d'Ivan le terrible - pour construire la démocratie de marché au sein d'un Etat européen indépendant, et les russophones, majoritaires, dont le comportement linguistique prouvait l'existence d'une nostalgie encore « naturelle » pour les rets du totalitarisme ainsi qu'une incapacité toujours « naturelle » à penser la démocratie.
Dans tous ces cas de figure, la langue d'usage passe pour être la preuve d'un niveau de civilisation, ce qui équivaut une fois de plus à s'affranchir de penser le contenu réel des discours, la question de leur énonciation et, dans le cas de la Biélorussie, celle des conflits propres à cette société.
5 - La fin justifie les moyens
Le fait qu'Aliaksandr Loukachenka ait souhaité rétablir la langue russe comme langue officielle à côté du biélorussien, et que lui-même ait finalement fait le choix de s'exprimer en russe bien que « relâché », passa pour être une preuve suffisante de sa bonne volonté à favoriser l'intégration de la Biélorussie à la Russie.
Le fait qu'il commença d'abord par s'exprimer dans un russe qui n'était pas celui de l'élite, et que son usage d'une forme de « trasianka » ait pu être utilisé par lui comme stratégie d'accès au pouvoir fut peu étudié.
Si sous son règne, le gouvernement biélorussien n'a jamais eu recours à la notion de « politique linguistique » et si du point de vue du pouvoir, il n'existe pas de « problème linguistique » aujourd'hui en Biélorussie, la question des langues a pourtant été un élément clé de l'accession d'A. Loukachenka au pouvoir, reflétant toujours ses principaux objectifs politiques.
C'est que le discours d'A. Loukachenka évolue.
Au début de son premier mandat, il s'était surtout exprimé sur le caractère selon lui indigent de la langue biélorussienne, défendant l'idée d'une supériorité « intrinsèque » des langues russe et anglaise sur les autres langues. Ces assertions associées aux répressions politiques anti-biélorussianophones permettaient de distinguer sa position du schéma nationaliste traditionnel qui considère que la langue est une variable à la nation. A. Loukachenka contestait ainsi une des thèses majeures du Front populaire de Biélorussie pour qui la langue était la preuve même de l'existence de la nation et pour qui la politique anti-biélorussianophone d'A. Loukachenka devait être dénoncée comme une atteinte portée à l'existence même de la nation.
Cette première posture suscita bientôt une évolution dans la manière de définir l'identité des Biélorussiens.
Si la langue biélorussienne pouvait ne plus être considérée comme une variable à la nation des Biélorussiens, il devenait possible d'envisager de se revendiquer Biélorussien tout en parlant le russe et sans être pour autant confondu avec la nation des Russes.
Reste que le discours d'A. Loukachenka ne s'arrêta pas à défendre la supériorité du russe sur le biélorussien. Il consista également à utiliser progressivement l'idée de supériorité « intrinsèque » de la langue russe au profit de la construction d'une identité collective nouvelle, également pensée à partir de « la langue du peuple ». Si le russe est une langue « intrinsèquement » supérieure, il fallait bien comprendre qu'elle était aussi celle des Biélorussiens.
Le peuple biélorussien pouvait donc être considéré comme « égal en supériorité » au peuple russe et sa culture pouvait accéder au rang des cultures dites supérieures.
En outre, le phénomène de mélange que désigne le terme « trasianka » pouvait désormais être utilisé comme preuve que le peuple russe était loin d'être le seul artisan de sa langue. En introduisant des éléments de sa langue dans la langue russe, le peuple biélorussien aurait contribué à enrichir la langue russe populaire, preuve que le russe de Biélorussie est dorénavant marqué par « l'âme » du biélorussien.
Contrairement au discours nationaliste traditionnel qui refuse « l'hybridation des langues » en vertu de la défense d'idées de pureté et d'homogénéité, A. Loukachenka développait donc progressivement une image positive de la « langue du peuple » fondée, elle, sur le mélange. Cette image positive de la « trasianka » a plusieurs avantages, dont celui de ne pas contredire la très célèbre métaphore de l'arbre à trois branches, très précisément datée du XIXème siècle, et qui établit que d'un tronc Grand russe auraient poussé deux rameaux : le Blanc russe (« biélorusse ») et le Petit russe (ukrainien).
La « trasianka » ou « langue du peuple » a donc toute son importance dans cette stratégie puisqu'elle permet de renouer avec l'utopie de création d'une langue panslave. Fruit de la créativité du peuple biélorussien, prouvant sa vitalité, sa créativité et son dynamisme, elle pourrait même finir par concurrencer le russe normé puisque A. Loukachenka a même été jusqu'à la qualifier de « langue de la communication internationale dans les frontières de l'ex-URSS [3]». Il n'y a donc aucune raison objective pour que russe et biélorussien normés, ces langues d'intellectuels, ne se retrouvent pas sujets – en même temps que les intellectuels, quelle que soit leur langue d'usage -, à la même politique de mise au placard.
6 - Le joker de la réforme du biélorussien
Œuvrer à établir une union panslave n'équivaut pas à œuvrer pour la restauration de l'empire de Russie, ce qui semble marquer un point de désaccord entre Aliaksandr Loukachenka et son homologue Vladimir Poutine. Construit sur l'idée d'une renaissance de l'ancienne Slavia orthodoxa, le panslavisme rêve plutôt d'unir les Biélorussiens aux Serbes que d'intégrer à toute force les Tchétchènes. Le panslavisme dont A. Loukachenka s'était fait le promoteur au cours de son premier mandat n'établissait ni la Biélorussie comme province de la Russie, ni son président comme gouverneur de cette province.
Or Vladimir Poutine ne semble décidément pas très coopératif lorsqu'il s'agit de permettre à son homologue biélorussien, et à sa « trasianka », d'espérer régner sur le corps regreffé de tous les slaves orientaux. Mieux vaut donc, dans l'attente, consolider l'ethnos biélorussien en se faisant le chantre de la souveraineté biélorussienne et, en plus d'élaborer une idéologie nationale et de continuer à défendre la supériorité « intrinsèque » de la langue russe, préparer le joker d'une nouvelle réforme de la langue biélorussienne.
En 2002, Aliaksandr Padloujny, directeur de l'Institut linguistique de l'Académie biélorussienne des sciences annonce que des amendements seront apportés à l'orthographe et à la ponctuation du biélorussien. Il évite soigneusement d'employer la notion de « réforme ». Lesdits amendements doivent contribuer à uniformiser l'écriture de la langue sans pour autant modifier profondément sa grammaire. Aussi lesdits amendements devraient, selon lui, entrer facilement dans l'usage. Mais tout comme les amendements apportés à la réforme soviétique du biélorussien de 1933 dans les années 1950, il s'agirait de rendre la langue biélorussienne, simplement « un peu plus biélorussienne ».
7 - Les stratégies d'évitement
Cet ensemble de constats est cause de l'évolution récente des usages linguistiques en matière de défense de la démocratie en Biélorussie. Dans le contexte du régime autoritaire d'Aliaksandr Loukachenka, la défense de la démocratie, des droits de l'Homme et de la liberté d'expression se pratique aujourd'hui de manière entièrement bilingue.
Il est même en train de se produire en Biélorussie ce qui avait toujours été considéré comme impensable, à savoir l'expression d'une solidarité entre biélorussianophones et russophones après constat que les « gens qui pensent » sont victimes des mêmes agressions morales et physiques de la part d'un régime qui entend faire taire les intellectuels, quelle que soit leur langue d'usage.
Naissent également de nouvelles revendications identitaires.
Outre les personnes qui, au cours du premier mandat d'Aliaksandr Loukachenka, ont pu se déclarer citoyens de la République populaire de Biélorussie (BNR), proclamée en 1918, et dont le siège du gouvernement en exil est actuellement aux Etats-Unis, d'autres personnes se déclarent désormais citoyens du grand-duché de Lithuanie, entité politique ayant été rayée de la carte de l'Europe suite aux trois partages de la confédération polono-Lithuanienne en 1791, 1793 et 1795. Loin d'être uniquement de la provocation, ces nouvelles revendications identitaires, même minoritaires, s'affirment clairement comme stratégies d'évitement des problèmes liés à la biélorussianité tels que générés par le régime soviétique aussi bien que par celui d'Aliaksandr Loukachenka.
Cette fois encore, la langue est au cœur du programme politique de ces nouvelles « communautés virtuelles » [4].
Par exemple, les « citoyens du grand-duché de Lithuanie » en viennent à dénoncer l'aspect artificiel de la dénomination « Biélorussiens », lui préférant l'identité « Litsvyne » qui n'est pas confondue avec la notion d'identité lituanienne moderne. Les « Litsvynes » se distingueraient des Biélorussiens par une identité nationale forte, l'usage de l'alphabet latin, leur religion catholique et une longue tradition étatique. Ils considèrent qu'il en va de leur survie d'écrire en « Lithuanien latin », langue d'une « nouvelle nation européenne à l'histoire ancienne » et tant fondée sur le vieux-biélorussien non russifié que sur les grammaires quelque peu modifiées du biélorussien dit « classique » (pré-soviétique). Aussi les « Litsvynes » travaillent-ils sur la rédaction de dictionnaires et de glossaires, déjà traduits en anglais sur internet, et qui disent réhabiliter des mots anciens, absents du vocabulaire biélorussien contemporain.
Fondant une nouvelle relation d'équivalence entre langue, Etat et nation, ces vœux de réhabilitation d'une monarchie parlementaire en Biélorussie sont aussi l'expression d'un rejet du régime présidentiel autoritaire d'Aliaksandr Loukachenka autant que d'un nationalisme d'Etat qualifié de « soviétique » et dénoncé comme portant atteinte à la « vraie » nation des Biélorussiens.
Conclusion
En Biélorussie, comme dans d'autres pays d'Europe centrale et orientale, la question de l'équivalence ou de la non équivalence entre langue, peuple, Etat et nation influe sur la composition de l'échiquier politique.
Le rôle que sont supposées jouer les langues (russe et biélorussienne), mais aussi les niveaux de langue (langue de l'élite et langue du peuple) induit des divergences fondamentales de vues dans la manière de penser l'Etat et la Nation.
Qu'ils soient d'obédience nationaliste, autonomiste, indépendantiste, monarchiste ou panslave, les projets politiques débattus au sein de la société biélorussienne se distinguent tous par la langue d'usage que leurs militants voudraient imposer à l'échelle de la société.
Dans tous les cas de figure, la question de la langue est au cœur de la théorisation de diverses conceptions de l'identité nationale et collective, mais aussi de discours de la légitimité politique qu'il est important de comprendre pour mieux appréhender la nature des conflits contemporains propres à cette société. Dans tous les cas de figure enfin, le « vrai » est opposé au « faux » et « l'authentique » à « l'inauthentique ». A nous donc de rester vigilants sur ces discours de « Vérité » aux arguments parfois plus qu'équivoques et d'œuvrer à dépasser les barrières induites par nos représentations sur les relations que sont censées entretenir langues et nationalismes. A l'heure où la Biélorussie devient un des premiers pays voisins de l'Europe, la question des langues ne devrait plus faire obstacle à une réflexion approfondie sur le contenu réel des discours et leur mode d'énonciation autoritaire.
Directeur de la publication : Pascale Joannin
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