Entretien d'EuropeEntretien exclusif avec Wolfang Schäuble
Entretien exclusif avec Wolfang Schäuble

Franco-allemand

Wolfgang Schäuble

-

19 septembre 2005

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Invité

Schäuble Wolfgang

Wolfgang Schäuble

Vice-Président du groupe parlementaire CDU/CSU au Bundestag, membre de la Kompetenzteam, ancien ministre, membre du Conseil d'administration de la fondation Robert Schuman.

1) Selon vous, qu'a révélé cette campagne sur l'Allemagne d'aujourd'hui et sur l'état d'esprit des Allemands en 2005 ?

Wolfgang Schäuble : N'oublions pas les raisons qui ont conduit à la tenue d'élections anticipées : Gerhard Schröder a bien été forcé de reconnaître que son gouvernement rouge-vert n'était plus en mesure de gouverner. Aujourd'hui, le projet rouge-vert pour lequel G. Schröder avait demandé aux Allemands le renouvellement de leur confiance a été clairement désavoué. De fait, la coalition CDU/CSU-FDP, que nous appelons de nos vœux, ne dispose pas non plus de la majorité parlementaire. Mais ce qui est clair, c'est que la CDU et la CSU constitueront la première force politique au prochain Bundestag et que c'est à Angela Merkel que revient la tâche de trouver une majorité gouvernementale stable. Au vu des résultats, deux options sont envisageables : une grande coalition avec le SPD, ou alors une coalition d'union avec les Libéraux et les Verts, configuration inédite dans l'histoire de la République fédérale mais que nous devrions étudier. Car l'important, c'est que notre pays se redresse enfin et aille de l'avant, que des réformes soient engagées, que le marché de l'emploi, le budget et le système de sécurité sociale soient remis sur les rails. Certes, le résultat des élections ne facilite pas la tâche sur le plan politique mais il ouvre aussi la voie à des solutions intéressantes.

2) Quels sont les enjeux de cette élection pour l'Europe ?

Wolfgang Schäuble : Un gouvernement fédéral conduit par la CDU/CSU – quelle qu'en soit sa composition – se donnera pour objectif de mener une politique qui rétablisse la confiance dans l'Europe et surmonte les divisions apparues entre les Etats partenaires de l'Union européenne. Je suis convaincu qu'à cet égard, l'amitié franco-allemande fera ses preuves dans toute sa singularité, y compris dans la manière dont nous prendrons en compte les souhaits et préoccupations des plus petits Etats membres et de ceux qui nous ont récemment rejoints. G. Schröder n'a jamais compris cette responsabilité fondamentale qui est la nôtre vis-à-vis de l'Europe. Le rôle naturel de l'Allemagne et la France, c'est d'être le moteur de l'Europe en entraînant les autres. G. Schröder restera le premier chancelier qui n'a jamais eu le souci d'être un « Européen ».

3) et pour le couple franco-allemand ?

Wolfgang Schäuble : L'Allemagne et la France sont parvenues à un rapprochement d'un niveau exceptionnel et à une intensité de relations que nous allons maintenir et élargir. Ceci est important en matière économique, mais également dans d'autres domaines tels que les sciences et la recherche ou encore l'apprentissage de la langue du voisin.

4) Quelles sont les conséquences des possibles changements politiques en Allemagne sur l'ouverture des négociations entre l'UE et la Turquie prévue le 3 octobre prochain ?

Wolfgang Schäuble : Nous avons toujours dit que nous voulions tout mettre en œuvre pour que la Turquie se développe dans le cadre d'une coopération la plus étroite possible avec l'Union européenne. Mais nous avons aussi toujours dit que la relation qui sera mise en place avec la Turquie ne devait en aucun cas remettre en cause la construction européenne. Sur des questions aussi fondamentales que les frontières et l'identité de l'Europe, nous ne pouvons pas gouverner dans le dos des citoyens européens. L'Europe ne peut fonctionner qu'avec l'adhésion de ses citoyens. C'est la raison pour laquelle nous voulons nous réserver, dans les négociations avec la Turquie, la possibilité de liens étroits mais d'une autre nature que l'adhésion pleine et entière à l'Union. Cette option a été clairement prise en compte et approuvée par le Conseil européen de décembre dernier qui a décidé que les négociations devaient être menées sans préjuger du résultat. Je demeure convaincu qu'à l'issue de longues négociations, nous trouverons un accord avec nos amis turcs pour la mise en œuvre d'un partenariat d'un nouveau type.

5) Quelles sont les priorités politiques du prochain chancelier et quelles sont ses marges de manœuvres, compte tenu des résultats ?

Wolfgang Schäuble : Sous la direction d'Angela Merkel, la CDU et la CSU se sont lancées dans un ambitieux programme porteur d'avenir et d'une honnêteté remarquable, et sont ainsi devenues la première force politique du pays. Les Allemands savent qu'il est nécessaire d'engager des réformes en profondeur, même si cela va bousculer les habitudes de beaucoup d'entre eux. Face à ces exigences, elle s'est donnée pour mission de s'atteler à une politique de réformes mûrement réfléchies et durables. L'état de délabrement budgétaire dans lequel la coalition rouge-vert a laissé le pays limite notre marge de manœuvre. Mais sitôt les réformes entreprises et la croissance et le dynamisme économiques retrouvés, s'ouvriront de nouvelles perspectives.

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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