Entretien d'EuropePrélèvements obligatoires : Mettre fin à l'exception française
Prélèvements obligatoires : Mettre fin à l'exception française

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25 novembre 2002

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Le Parlement français vient de tenir un débat spécifique sur les prélèvements obligatoires, à la suite de la réforme de l'Ordonnance de 1959 relative aux lois de finances.

Heureuse initiative alors que la question de la baisse des impôts prend une acuité accrue.

Contrairement à ses promesses et ses allégations, entre 1997 et 2002, le précédent gouvernement a maintenu les prélèvements à près de 45 % du PIB, maintenant la France dans une position défavorable parmi les pays de l'Union européenne et de l'OCDE et ceci malgré quatre années de forte croissance économique.

La concurrence fiscale entre États européens et l'impact croissant de la mondialisation obligent effectivement notre pays à opérer une baisse significative des prélèvements accompagnée évidemment de la réduction des déficits, d'une réforme appropriée de l'État et de notre système de protection sociale. La France possède des entreprises de grande qualité, innovantes et dynamiques. L'environnement législatif et fiscal a tendance malheureusement à les brider et les incite à délocaliser tout ou partie de leur activité. Même chose pour les entreprises étrangères qui investissent en France. Il est ainsi significatif de constater que les investissements étrangers en France représentent moins du tiers des investissements français à l'étranger.

La gestion socialiste entre mi-1997 et mi-2002 a malheureusement représenté cinq années de perdues en matière de réduction des prélèvements fiscaux et, parallèlement, en termes de baisse des dépenses.

Ainsi, en 1997, le déficit budgétaire était de 3 % du PIB. Après cinq années de croissance, le gouvernement de Lionel Jospin laisse un déficit de 2,6 %.

Une bien piètre performance si l'on se souvient qu'entre mars 1993 et 1997, les gouvernements Balladur et Juppé avaient ramené le déficit de 6,3 % à 3 % du PIB, en dépit d'une conjoncture très défavorable.

Conséquence directe de l'immobilisme de ces dernières années, la dette publique a augmenté de nouveau depuis 2000, pour atteindre 58,4 % du PIB 2002 alors que tous nos partenaires, à l'exception du Portugal, connaissait une situation inverse.

Or, la compétitivité dont la France a impérativement besoin implique à la fois une baisse significative des prélèvements obligatoires et une réduction du déficit.

Six mois après l'alternance que notre pays a connu, quel premier bilan peut-on faire à cet égard ?

Les premières mesures du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin sont tangibles et positives : dans le projet de loi de Finances 2003, l'augmentation des dépenses et en leur sein les dépenses de fonctionnement est ainsi sensiblement ralentie.

Parallèlement, le Gouvernement engage une baisse des prélèvements obligatoires de 0,7% en 2002-2003, avec notamment une réduction de l'impôt sur le revenu de 6 %. La baisse de cet impôt sur le Revenu reste la mesure phare du collectif d'été comme du projet de loi de Finances pour 2003 ; un signe fort vis-à-vis des seize millions de foyers qui acquittent cet impôt, qu'ils soient salariés ou travailleurs indépendants.

La baisse de l'Impôt sur le Revenu représente une étape marquante sur la voie d'un retour de notre niveau de prélèvements obligatoires au moins à la moyenne des niveaux de prélèvements de nos principaux partenaires et concurrents au sein de l'Union européenne.

Cette mesure est critiquée par l'Opposition car elle constituerait un cadeau aux riches. En réalité, la France ne peut pas se permettre d'avoir un barème plus progressif que ses partenaires européens sous peine de se résigner à la poursuite de la fuite des cerveaux et des capitaux. Rappelons qu'un pays comme l'Allemagne, à direction sociale-démocrate, a réduit son taux marginal de l'impôt sur le Revenu de 56% à 44 % dans une loi de finances dont le premier objectif affiché était de servir la compétitivité du pays.

Dans le domaine économique, plus que jamais, nos partenaires de l'Union l'ont bien compris, l'idéologie doit laisser la place au pragmatisme et à l'efficacité.

De 2000 à 2002, en dehors de la France et l'Italie qui ont opté pour des allègements proportionnels plus élevés pour les revenus faibles, les autres pays ayant baissé l'Impôt sur le Revenu ont choisi, soit d'effectuer des allègements proportionnellement équilibrés dans l'ensemble des barèmes - c'est le cas de l'Allemagne, de la Belgique et du Luxembourg - soit de favoriser les allègements des taux supérieurs - les Pays-Bas.

Mais il ne faut pas s'arrêter là !

La Mission du Sénat sur l'expatriation des capitaux, des compétences et des entreprises présidée par Denis Badré, (Union Centriste, Hauts-de-Seine), a effectué un certain nombre de propositions sur l'ensemble des impôts qui touchent le patrimoine : en particulier les droits de mutation et l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

S'agissant des entreprises françaises et étrangères qui investissent dans l'hexagone, elles doivent être encouragées par des mesures fiscales spécifiques. A cet égard, il faut saluer les mesures prévues par le projet de budget pour 2003, c'est à dire en particulier la suppression définitive de la part salaires de la taxe professionnelle, l'extension de cette réforme de la taxe professionnelle aux professions libérales et professions indépendantes, ainsi que l'abrogation par étapes de la contribution des institutions financières.

Mais les baisses à venir devront aussi concerner les secteurs à forte intensité de main d'œuvre à travers des baisses ciblées de la TVA dans le cadre de l'Union européenne, ainsi que l'ensemble des entreprises par une stabilisation à un niveau compétitif de l'impôt sur les sociétés.

Sans parler de la taxe sur les salaires, dont un récent rapport de la commission des finances du Sénat a montré tout le caractère obsolète et injuste.

Quant à la baisse générale des charges sociales, engagée dès l'entrée en fonction du nouveau gouvernement, elle doit être poursuivie et amplifiée. Rappelons que la France se situe entre le neuvième et le onzième rang en Europe en termes de salaire net, ce qui explique en grande partie la faible attractivité de notre pays qui est tombé du 2° au 5° rang européen de 1997 à 2001 pour les montants investis par des firmes étrangères.

Mais, parallèlement à l'indispensable baisse des prélèvements, il faut évidemment réduire le déficit et la dette publique.

Le Ministre délégué au budget Alain Lambert vient d'annoncer l'application d'un nouveau mode de gestion des crédits plus rigoureux et réaliste. Mieux vaut prévoir effectivement des crédits plus modestes qui correspondent à des besoins réels et seront effectivement dépensés, plutôt que des crédits virtuels sous-consommés.

Mais il faut également engager au plus vite la réforme de l'État [1]. Ce vaste chantier intègre à la fois l'approfondissement de la décentralisation et la modernisation des administrations centrales.

En tout état de cause, si la France ne procède pas à une réduction significative et durable de la dépense publique, elle s'imposera à elle.

L'harmonisation fiscale en cours au sein de l'Europe soulagera entreprises et contribuables Français.

Mieux vaut engager le processus dès que possible, car sinon, les gouvernements devront réduire la dépense publique au prix de choix draconiens.
[1] "La Fonction Publique française en Europe", Eugénie Rabourdin, Notes de la Fondation Robert Schuman http://www.robert-schuman.eu/notes.php?num=10

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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