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Analyse

Klaus Iohannis devrait être réélu pour un deuxième mandat à la présidence de la République en Roumanie

Élections en Europe

Corinne Deloy

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21 octobre 2019
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Klaus Iohannis devrait être réélu pour un deuxième mandat à la présidence de la ...

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Le 9 juillet dernier, les autorités roumaines annonçaient que le premier tour de la prochaine élection présidentielle aurait lieu le 10 novembre. Si aucun des candidats n'obtient plus de la moitié des suffrages exprimés, un deuxième tour de scrutin sera organisé deux semaines plus tard, soit le 24 novembre.

Les Roumains vivant à l'étranger seront autorisés à voter entre le 8 et le 10 novembre pour le premier tour (et entre le 22 et le 24 novembre pour le second tour). Toutes les personnes qui auront pris place dans la file d'attente deux heures avant l'heure de fermeture des bureaux de vote pourront remplir leur devoir citoyen jusqu'à minuit. Ces mesures sont destinées à ce que les incidents intervenus lors des dernières élections européennes ne se renouvellent pas. En effet, le 26 mai dernier, des dizaines de Roumains résidant à l'étranger avaient dû attendre des heures pour voter en raison de l'insuffisance du nombre d'isoloirs dans les bureaux de vote. Par ailleurs, de nombreux Roumains de l'étranger n'avaient pas pu voter lors du premier tour de la précédente élection présidentielle (2 novembre 2014) en raison, déjà, d'un nombre insuffisant de bureaux de vote (294 au total et seulement 160 000 bulletins imprimés pour environ 4 millions d'électeurs), notamment en France, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Belgique.

Entre les deux tours de scrutin, des manifestations avaient été organisées à Bucarest et dans les villes de Cluj, Timisoara, Sibiu, Brasov, Oradea et Constanta en solidarité avec les Roumains expatriés qui n'avaient pas pu remplir leur devoir civique. Le 10 novembre, le ministre des Affaires étrangères Titus Corlatean (Parti social-démocrate, PSD), responsable de l'organisation du vote des expatriés, avait dû démissionner de ses fonctions.

La campagne électorale a débuté le 12 octobre. L'ensemble des enquêtes d'opinion prédisent la victoire du président de la République sortant Klaus Iohannis. Selon le dernier sondage réalisé par l'institut Sociopol, celui-ci recueillerait 43% des suffrages lors du premier tour. Il devancerait Viorica Dancila (PSD), qui obtiendrait 21%; Dan Barna, (Union sauvez la Roumanie, USR), qui recueillerait 15%, et l'indépendant Mircea Diaconu, soutenu par l'Alliance des libéraux et démocrates (ADLE) et Pro Romania (PRO), 11%.

Les candidats

Grand favori de l'élection présidentielle, Klaus Iohannis sollicite donc un deuxième mandat. Le 11 mars dernier, le conseil national du Parti national libéral (PNL), parti auquel il a appartenu avant son élection à la tête de l'Etat, l'a désigné comme son candidat.

Klaus Iohannis a débuté sa campagne en s'opposant au gouvernement dirigé jusqu'au 10 octobre dernier par Viorica Dancila (PSD) qu'il a qualifié à plusieurs reprises de " corrompu " et de " toxique ". Le gouvernement[1] a chuté le 10 octobre dernier à la suite du vote d'une motion de censure du Parlement par 238 des 465 députés et sénateurs. " La Roumanie a gagné. Le chute du gouvernement social-démocrate est le résultat naturel de la réaction de l'ensemble de la société roumaine en face des abus et de l'incompétence de ce gouvernement. Un gouvernement totalement dérouté et qui a échoué. Le Parti social-démocrate appartient désormais à l'histoire " a déclaré Klaus Iohannis à l'annonce du résultat du vote. Le 15 octobre, il a nommé le dirigeant du Parti national libéral (PNL), Ludovic Orban, au poste de Premier ministre. La Constitution lui accorde dix jours pour former un gouvernement et remporter la confiance du Parlement.

Le président de la République sort bien sûr conforté par les déboires du gouvernement et notamment de Viorica Dancila, désignée le 23 juillet dernier candidate à l'élection présidentielle des 10 et 24 novembre prochains par le PSD. Elle avait décliné cette offre au mois de juin en affirmant qu'elle ne possédait pas un nom assez puissant pour mener son parti à la victoire. Elle a finalement dû se résoudre à accepter de représenter les sociaux-démocrates. " Je pense que la Roumanie peut avoir pour la première fois une femme chef de l'Etat. Je suis la première femme à avoir accédé au poste de Premier ministre, je vais devenir la première femme à accéder à la présidence de la République " a-t-elle déclaré.

Le Parti social-démocrate, dont la candidate est malmenée dans les enquêtes d'opinion, pourrait néanmoins ne pas accéder au deuxième tour du scrutin présidentiel, ce qui constituerait une première depuis la fin du communisme en Roumanie. Le PSD, au pouvoir depuis les élections parlementaires du 11 décembre 2016, est très impopulaire en raison notamment de la réforme du système judiciaire qu'il a fait adopter. Cette dernière a mécontenté les Roumains mais aussi l'Union européenne qui voit dans ce texte et dans l'assouplissement de la législation anti-corruption une menace pesant sur l'Etat de droit.

Viorica Dancila s'est engagée à ne plus toucher à la justice. Elle s'est également éloignée de Liviu Dragnea, ancien président du Parti social-démocrate (2015-2019) et ancien président de la Chambre des députés (2016-2019), condamné pour abus de pouvoir et détournement de biens sociaux le 21 juin 2018 à trois ans et demi d'emprisonnement, une peine confirmée par la Haute Cour de justice le 27 mai dernier.

Les sociaux-démocrates ont essuyé un revers aux élections européennes le 26 mai. Ils ont recueilli 22,5% des suffrages et ce n'est que d'extrême justesse qu'ils ont devancé l'Alliance 2020 composée du Parti de la liberté, de l'unité et de la solidarité (PLUS) de l'ancien Premier ministre Dacian Ciolos et de l'Union Sauvez la Roumanie (USR), dirigée par Dan Barna, qui a obtenu 22,4% des voix. Le Parti national libéral a remporté le scrutin avec 27% des suffrages. La moitié des Roumains se sont rendus aux urnes : la participation s'est élevée à 51,2%.

Outre les deux personnalités que sont le chef de l'Etat sortant Klaus Iohannis et Viorica Dancila, 12 autres personnes sont candidates à l'élection présidentielle des 10 et 24 novembre en Roumanie :

– Dan Barna, dirigeant de l'Union Sauvez la Roumanie (USR) ;

– Mircea Diaconu (indépendant), acteur et ancien député européen (2014-2019) soutenu par l'Alliance des libéraux et démocrates, présidée par l'ancien Premier ministre (2004-2008) Calin Popescu-Tariceanu, et Pro Romania (PRO), parti social-libéral conduit par l'ancien Premier ministre (2012-2015) Victor Ponta ;

– Kelemen Humor, candidat de l'Union démocratique des Hongrois de Roumanie (UDMR) ;

– Theodor Paleogu, candidat du Parti du mouvement populaire (PMP) ;

– Ramona-Ioana Bruynseels, candidate du Parti du pouvoir humaniste ;

– Catalin Ivan, candidat de l'Alternative pour la dignité nationale ;

– Ninel Peia, candidat du Parti de la nationalité roumaine ;

– Sebastian-Constantin Popescu, candidat du Parti de la nouvelle Roumanie ;

– Bogdan Marian-Stanoevici, indépendant ;

– John-Ion Banu, candidat du Parti de la nation roumaine ;

– Viorel Catarama, candidat du Parti de la droite libérale ;

– Alexandru Cumpanasu, indépendant.

La fonction présidentielle

En Roumanie, le Président de la République est élu pour 5 ans. Tout candidat à la magistrature suprême doit être âgé de 35 ans minimum et il doit déposer une liste d'au moins 200 000 signatures d'électeurs en faveur de sa candidature avant le scrutin. Il doit également jurer sur l'honneur ne pas avoir collaboré avec les services de la Securitate, police secrète roumaine sous le régime communiste.

Le chef de l'Etat roumain dispose de pouvoirs limités. Il nomme le Premier ministre " après consultation du parti disposant de la majorité absolue au Parlement ou, si cette majorité n'existe pas, des partis représentés au Parlement " (article 103-1 de la Constitution) mais il ne peut révoquer ce dernier.

La Roumanie possède un Parlement bicaméral renouvelé au système majoritaire mixte tous les 4 ans au sein de 43 circonscriptions. La chambre haute, le Sénat (Senatul) compte 134 membres et la chambre basse, la Chambre des députés (Camera deputatilor), 308. Les minorités nationales (Roms, Allemands, Arméniens, Italiens, Croates, Albanais, Serbes, etc.) disposent d'un nombre de sièges réservés à la Chambre des députés (17).

Rappel des résultats de l'élection présidentielle des 2 et 16 novembre 2014 en Roumanie

Participation  : 53,17% (1er tour) et 64,1% (2e tour)

Source : http://bec2014.roaep.ro/rezultate/index.html

[1] Les ministres de l'Alliance des libéraux et démocrates (ADLE) avaient démissionné du gouvernement le 26 août dernier. Sans le soutien de ce parti, les sociaux-démocrates, qui comptent 205 députés, ne disposaient plus de la majorité au parlement (celle-ci s'établit à 223).

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