Entretien d'EuropePlus d'Europe, la présidence espagnole de l'Union européenne
Plus d'Europe, la présidence espagnole de l'Union européenne

États membres

Elena Gonzalo

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22 juillet 2002

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Gonzalo Elena

Elena Gonzalo

1 - La lutte contre le terrorisme, au sein d'un espace de liberté, de sécurité et de justice

Les attentats du 11 septembre dernier, les longues années de terrorisme en Espagne, en particulier, et dans le monde, en général, obligent à réagir rapidement et efficacement. Les dirigeants des autres pays européens en ont été témoins lors des attentats à Séville pendant le Conseil européen.

La lutte contre le terrorisme a été au centre du débat de la première séance de travail du sommet de Séville.

Le Conseil européen a approuvé une augmentation de 45,9% du budget d'Europol par rapport à 2001; le budget de l'année 2002 s'élevant ainsi à 51,6 millions d'euros. Il est principalement destiné à la création du Système d'Information d'Europol et aux nouvelles compétences de cet organisme dans la lutte contre le terrorisme.

Le programme de la Présidence en matière de lutte antiterroriste a été centré sur le renforcement des instruments de l'Etat de droit dans l'Union européenne. Dans ce but, Eurojust a été formellement constitué et ont été adoptées des décisions-cadre sur la définition commune de terrorisme et le principe d'harmonisation des peines, ainsi que sur le gel et la saisie des biens et l'obtention de preuves. De grandes avancées ont été accomplies quant à la ratification parlementaire de la décision-cadre relative à la lutte contre le terrorisme ainsi que sur le mandat d'arrêt européen. Sur ce point, la Belgique, la France, le Luxembourg, le Portugal, le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Espagne visent sa mise en pratique au 1er janvier prochain.

Dans son discours devant le Parlement Européen pour y exposer les résultats de ce semestre, le Président du Gouvernement espagnol a affirmé: "La Présidence espagnole a examiné les mesures englobées par le Plan d'Action contre le terrorisme de l'Union européenne. Cet objectif n'aurait pas pu être atteint sans l'appui du Parlement et, plus particulièrement, sans celui de la Commission.

Je me souviens que ma dernière comparution devant cette Chambre eut lieu la même journée qu'un attentat terroriste en Italie. J'espère qu'il sera de plus en plus difficile d'achever ces actes, grâce aux mesures que nous avons adoptées au cours des derniers mois". [3]

Le futur de l'Europe passe par la nécessité de résoudre des questions aussi importantes que celle de l'immigration et l'asile au sein de la perspective d'un Espace de Liberté, de Sécurité et de Justice.

L'Union européenne considère que l'immigration est positive, à condition que ses flux soient ordonnés conformément à la loi et qu'il existe une coopération entre les pays d'origine, de transit et de destination de l'immigration.

Elle a donc pris des mesures en ce sens en matière d'immigration et d'asile.

l'immigration clandestine. Il est nécessaire de dresser la liste des pays tiers dont les citoyens sont soumis ou exemptés de visas ; d'instaurer un système commun d'identification des visas ; d'accélérer la conclusion des accords de réadmission en cours de négociation et de favoriser la négociation de nouveaux accords ; d'adopter enfin les éléments d'un programme de rapatriements et d'approuver des directives-cadre visant la traite d'êtres humains et le trafic illégal de personnes.

la gestion coordonnée et intégrée des frontières extérieures de l'Union. Les véritables frontières des États membres sont les frontières extérieures de l'Union. Il est nécessaire de gérer les frontières, en tant que limites territoriales de l'Union Européenne, et il faut le faire avec efficacité d'où un premier pas vers la création d'un corps de garde européen des frontières de l'Union. Avant le mois de juin 2003, l'Union devra définir le tronc commun relatif à la formation de ce corps, déterminer la répartition des charges entre l'Union et les États Membres concernant la gestion des frontières extérieures, et adopter une méthodologie permettant d'évaluer les risques dérivés du contrôle des frontières.

la politique d'immigration avec les pays tiers. L'Union considère que l'intensification de la coopération économique, le développement des échanges commerciaux, l'aide au développement et la prévention des conflits peuvent constituer des moyens pour réduire les causes des mouvements migratoires.

Le Conseil a décidé d'inclure une clause sur la gestion commune des flux migratoires et de réadmission obligatoire en cas d'immigration clandestine, dans tous les accords qui seront signés dorénavant. En outre, dans le but de renforcer la crédibilité de cet enjeu, le Conseil a déclaré que l'Union est prête à fournir l'aide technique et financière qui serait nécessaire à ces pays, afin de les aider à combattre l'immigration clandestine.

la définition d'une politique commune d'asile et d'immigration. Les règles concernant les demandes d'asile devraient être approuvées d'ici décembre 2002. Les règles relatives aux conditions requises pour obtenir le statut de réfugié et les dispositions concernant le regroupement familial ou le statut de résident permanent de longue durée devraient être adoptées avant le mois de juin 2003. Enfin, les règles communes à la procédure d'asile devraient voir le jour avant le mois de décembre 2003.

2 - Le processus d'élargissement de l'Union Européenne>

Soutenue par son opinion publique, l'Espagne a apporté son soutien sans réserve au processus d'élargissement. Il constitue, à la fois, un défi historique et un engagement politique commun prioritaire. La position unanime des formations politiques espagnoles a bénéficié d'un important soutien de l'opinion publique (58%), bien supérieur à celui de la majorité des autres États membres (Royaume-Uni 35%, Autriche 33%, Allemagne 35%, France 35%) selon l'Eurobaromètre.

Cela a été explicitement reconnu par le président du Conseil européen : «la Présidence espagnole a fait un effort considérable afin de parvenir à négocier 83 chapitres et fermer les positions communes des Quinze. (…) nous nous trouvons au moment des négociations et de la prise de décisions pour l'élargissement. Notre objectif pour la fin de l'année, sera l'obtention d'un résultat positif des négociations en cours, ceci étant à notre portée, tout comme à la portée de nos décisions. Cela favorisera la signature des Traités d'adhésion au cours du premier semestre 2003 et la participation de 10 pays candidats au total aux prochaines élections européennes de l'an 2004".

La position de l'Espagne en faveur de l'élargissement repose sur un intérêt objectif. En effet, l'intégration des pays candidats à l'Union européenne favorisera le plein développement des relations économiques, commerciales et culturelles qui, pour des raisons historiques, ont jusqu'à présent été limitées en Espagne.

L'objectif de la future action menée conjointement avec les pays candidats est de garantir une Europe unie, fondée sur le principe de la solidarité. Les Traités pour l'Adhésion que la Présidence espagnole a entamé au mois de mars, pourraient être signés au début de l'an 2003.

Le bilan du premier semestre de l'année 2002 s'établit comme suit: 96 chapitres de négociation ont été discutés, 52 provisoirement fermés, et 22 ouverts pour la première fois.

Dans ce sens, la Présidence a mis en évidence l'importance de l'élargissement : "ces pays cherchent à obtenir de l'Union européenne un entourage propice, une association inaliénable où ils pourraient ériger leur propre stabilité économique et déployer leur potentiel économique par la même occasion."

L'élargissement pose des exigences de solidarité d'où le besoin de préserver la politique de cohésion de l'Union Européenne. Il ne s'appuie pas uniquement sur une politique d'apports financiers. Le chef de cabinet du gouvernement autonome de la Catalogne a signalé que le transfert de fonds ne doit pas être considéré comme le noyau de l'action communautaire mais plutôt comme un instrument garantissant un minimum de cohésion, cohésion sans laquelle la réalisation du marché intérieur serait impossible.

3 - Le débat sur l'avenir de l'Europe

La Convention chargée de préparer la prochaine conférence intergouvernementale pour la révision des traités, le Forum ouvert aux organisations représentant la société civile et la poursuite, dans les États membres, du débat sur l'avenir de l'Europe constituent les manifestations concrètes d'une nouvelle manière de construire l'Europe. La Convention incarne l'organe qui reprend la « phase structurée » du débat public sur l'avenir de l'Europe, lancé à Nice.

A Séville, les Chefs d'Etat et de Gouvernements ont entendu un premier rapport du Président de la Convention, M. Valéry Giscard d'Estaing, sur l'état d'avancement des travaux. La Convention a été particulièrement sensible aux attentes des citoyens afin des les rapprocher des institutions communautaires. "Le Conseil européen appuie la démarche générale suivie par la Convention. Il souhaite qu'elle poursuive sur cette voie et aboutisse, dans les délais prévus, à un résultat positif." [4]

4 - Une Europe plus prospère, dynamique et au service du citoyen

À Lisbonne, l'Union européenne s'était fixée une série d'objectifs ambitieux et a adopté le programme de travail nécessaire pour les atteindre.

A Barcelone, une impulsion a été donnée à la Stratégie de Lisbonne. Cet événement a servi à promouvoir l'esprit d'ouverture, de modernisation et d'assouplissement des économies européennes, aspects essentiels afin d'atteindre les objectifs de plein emploi dans la perspective 2010.

En ce qui concerne les services financiers, une procédure normative plus souple a été mise en place par le biais des «propositions Lamfalussy».

À Barcelone, l'activité a été intense, la quasi totalité des règles prioritaires a été approuvée.

S'agissant du marché de l'énergie, d'importantes décisions ont été prises pour ouvrir la concurrence et accroître l'efficacité des marchés.

Il s'agit de l'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité pour toutes les entreprises européennes dans la perspective 2004, ainsi que les objectifs d'interconnexion électrique transfrontalière s'élevant à 10% de la capacité de production.

Pour l'espace européen, il a été décidé de réviser les réseaux de transports, y compris les nouveaux projets dans des régions comme les Pyrénées ou les Alpes ; le feu vert a été donné au projet Galiléo ; le « ciel unique » européen s'imposera en 2004; et le développement des réseaux européens de large bande a également été lancé.

Les grandes orientations de politique économique ont été approuvées à Madrid, fin juin. Deux dispositions les résument :

l'engagement des États membres pour la consolidation fiscale et pour le Pacte de Stabilité et de Croissance, a été réaffirmé selon lequel une situation d'équilibre devrait être atteinte en 2004 ;

la reconnaissance de progresser sur le chemin des réformes et de la modernisation de l'économie européenne pour élargir le potentiel de croissance et atteindre le plein emploi.

Outre la ratification du Protocole de Kyoto et la position commune démontrée par les Quinze lors du Sommet de Monterrey, l'Union Européenne entend réaffirmer son leadership à l'occasion du Sommet pour le Développement durable de Johannesburg, en suivant trois lignes essentielles: la lutte contre la pauvreté, l'essor de l'environnement et l'aide aux pays les plus défavorisés. Les mesures appliquées dans des affaires aussi concrètes que l'eau, l'énergie et la santé, confèrent à l'UE une position de premier plan « dans une optique constructive » [5].

5 - Relations extérieures

Après les attentats du 11 Septembre 2001, la Présidence espagnole a souhaité rappeler que l'engagement de l'Europe vis à vis des Etats-Unis repose, outre le fait de partager des valeurs et des principes communs, sur les nombreuses démonstrations de générosité et de solidarité entre l'Europe et les Etats-Unis. Le Sommet a aussi réaffirmé cette étroite identité de valeurs ainsi que la vision commune qui existe des deux côtés de l'Atlantique. Le Sommet a aussi réaffirmé l'engagement manifeste et réciproque de l'Union européenne et des Etats-Unis à combattre le terrorisme sans établir de distinctions et où qu'il se produise. La présidence a avancé dans le rapprochement progressif des listes de terroristes des Etats-Unis et de l'Union ; elle a négocié une convention de Coopération judiciaire en matière pénale, d'extradition et d'assistance mutuelle.

Avec la Russie, les principaux résultats portent sur la lutte contre le terrorisme au rang de nouvelle sphère de coopération entre l'Union européenne et la Russie, le renforcement du dialogue politique et la coopération en matière de sécurité et de gestion des crises, la reconnaissance de l'économie de marché de la Russie et l'appui européen à l'adhésion de la Russie à l'Organisation Mondiale de Commerce. Reste la question de l'enclave de Kaliningrad.

Le Sommet de Madrid entre l'Union européenne et les pays de l'Amérique latine et les Caraïbes réaffirme l'identité de valeurs et d'objectifs entre les deux continents sur la défense des droits de l'Homme, la lutte contre les drogues, la lutte contre le terrorisme ou les échanges commerciaux.

L'Union souhaite, en outre, contribuer à promouvoir l'intégration régionale dans la région, d'où le compromis de négocier des accords politiques et de coopération avec l'Amérique centrale et la Communauté andine. L'Acte formel de conclusions de l'Accord entre l'Union européenne et le Chili a aussi pu être signé.

Enfin, le Sommet Euro-méditerranéen a permis à l'Espagne de mettre en exergue la dimension méditerranéenne de l'Union. Le processus de Barcelone est le seul forum de rencontre directe entre les Israéliens et les Palestiniens. C'est la raison pour laquelle il est directement influencé par l'évolution du conflit au Proche-Orient. D'où l'importance de la Déclaration approuvée par l'Union européenne, les Etats-Unis, la Fédération de Russie et les Nations Unies pour tenir des consultations au plus haut niveau afin de soutenir conjointement les efforts réalisés par les envoyés spéciaux pour maintenir la paix dans cette région.

Au total donc, une Présidence bien remplie, démontrant, si cela était besoin, l'ancrage de l'Espagne en Europe et sa volonté de devenir l'un des pays moteurs de l'intégration.

[1] Discours du Premier ministre d'Espagne, Bruxelles 9 octobre 2001 [2] Rodrigo Rato Président de l'ECOFIN, Shanghai, 30 mai 2002 [3] Discours du Président du Gouvernement espagnol devant le Parlement européen (Strasbourg, 2 juillet 2002) [4] Conclusions de la Présidence- Séville, les 21 et 22 juin 2002 [5] José Maria Aznar, Strasbourg 2 juillet 2002

Directeur de la publication : Pascale Joannin

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