Election présidentielle en Serbie, Le point à une semaine du scrutin

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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14 janvier 2008
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Election présidentielle en Serbie, Le point à une semaine du scrutin

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Le 20 janvier prochain, un an après les élections législatives du 21 janvier 2007, plus de 6,5 millions de Serbes sont appelés à désigner leur futur Président de la République. Ce scrutin intervient alors que le Kosovo, province serbe sous administration internationale depuis 1999, parle de déclarer son indépendance. Le Chef de l'Etat sortant, Boris Tadic (Parti démocrate, DS), candidat à sa réélection, promet une Serbie européenne, mais qui se battra autant pour le Kosovo que pour son adhésion à l'Union européenne, tandis que son principal rival, Tomislav Nikolic (Parti radical, SRS), s'adresse principalement aux exclus et à tous ceux qui souffrent de la transition afin de les convaincre qu'il peut leur apporter "une vie meilleure".

9 personnes sont officiellement candidates :

- Boris Tadic (DS), Chef de l'Etat sortant, soutenu aussi par le Parti démocratique du Sandzak dirigé par le ministre du Travail, Rasim Ljajic, et l'Alliance démocratique des Croates de Voïvodine de Petar Kuntic ;

- Tomislav Nikolic, ancien vice-Premier ministre sous Slobodan Milosevic et leader par intérim du Parti radical (SRS) dont le leader, Vojislav Seselj, est inculpé de crimes de guerre contre les populations non-serbes de Croatie, de Bosnie-Herzégovine et de Voïvodine par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye ;

- Cedomir Jovanovic, leader du Parti libéral-démocrate (LDP) ;

- Velimir Ilic, ministre des Infrastructures et leader de Nouvelle Serbie (NS) soutenu par le Parti démocratique (DSS) du Premier ministre Vojislav Kostunica ;

- Jugoslav Dobricanin du Parti réformiste (RS) ;

- Marijan Ristevic du Parti populaire paysan (NSS) ;

- Itsvan Pastor, candidat de la minorité hongroise soutenu pour la première fois par les formations hongroises, l'Alliance des Hongrois de Voïvodine, l'Amitié démocratique des Hongrois de Voïvodine, le Parti démocratique des Hongrois de Voïvodine et l'Alliance civique hongroise ;

- Milutin Mrkonjic, président du Parti socialiste (SPS) et vice-président du Parlement;

- Milanka Karic, leader du Mouvement de la force (PSS).

Favori des sondages, le Président de la République sortant, Boris Tadic, a lancé sa campagne électorale le 22 décembre 2007 avec le slogan "Avec le peuple". Le candidat du Parti démocrate souhaite que sa campagne soit centrée sur les contacts directs avec les citoyens et les meetings plus que sur les médias. Boris Tadic a recueilli 18 903 signatures d'électeurs pour se présenter (chaque candidat doit recueillir au moins 10 000 signatures d'électeurs pour pouvoir se présenter aux suffrages des Serbes, chaque électeur ne pouvant accorder sa signature qu'à un seul candidat). Le Président sortant est également soutenu par le Parti démocratique du Sandzak dirigé par le ministre du Travail, Rasim Ljajic et le Parti du Sandzak de Fevzija Muric. Ce dernier a affirmé : "J'appelle les habitants de Novi Pazar, tous ceux du Sandzak et tous les Bosniaques à voter pour Boris Tadic. De cette façon, ils apporteront leur voix au Président de la République qui signera l'Accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne". Le texte européen doit être signé le 28 janvier prochain. Boris Tadic s'appuie sur son bilan des trois dernières années qu'il a passées à la tête de l'Etat et appelle à "une Serbie forte, stable et européenne". Le Chef de l'Etat souhaite voir son pays accéder au rang de candidat officiel à l'adhésion avant la fin de l'année 2008. "La Serbie a dit "non" à une politique de guerre et de meurtre et a choisi un avenir de paix. Le pays a besoin de victoires : dans les discussions sur le statut du Kosovo, dans l'intégration européenne et dans son combat contre la pauvreté et la corruption" répète Boris Tadic.

Son principal adversaire, Tomislav Nikolic, a démarré sa campagne électorale le 24 décembre dans sa ville natale de Kragujevac et avec le slogan "De tout coeur avec la Serbie". Le leader du Parti radical se veut le candidat du changement et s'affiche comme le seul capable de sortir la Serbie du chaos dans lequel l'a menée Boris Tadic. L'avenir du Kosovo occupe une grande partie de ses discours. "L'Union européenne a humilié la Serbie à tel point qu'elle veut maintenant lui ôter le Kosovo. C'est pourquoi Boris Tadic a organisé une élection présidentielle, pour permettre à Bruxelles de reconnaître l'indépendance du Kosovo" a-t-il déclaré au quotidien Blic. Il a demandé la tenue d'une session parlementaire sur le Kosovo durant laquelle chaque candidat viendrait dire ce qu'il compte faire pour la province, réunion après laquelle les Serbes pourraient décider de leur vote en toute connaissance de cause. Le leader du Parti radical affirme toutefois que, quelle que soit l'issue du conflit, la Serbie n'utilisera pas la force. "Nous n'entrerons pas en guerre. Nous ne le pouvons pas et nous le ferons pas" a t-il indiqué.

L'avenir du Kosovo est au coeur de la campagne électorale présidentielle ne serait-ce que parce qu'aucun homme politique serbe ne peut se permettre de "lâcher" la province. Le 26 décembre, le Parlement a voté par 220 voix pour, 14 contre et 3 abstentions, une résolution qui stipule que la Serbie pourrait rompre avec l'Union européenne si le Kosovo déclarait son indépendance. Le texte repousse également l'intégration du pays à l'OTAN et proclame la neutralité militaire du pays "jusqu'à un nouveau référendum sur cette question". "Nous ferons tout pour que le Kosovo reste en Serbie et que la Serbie demeure sur la voie de l'Europe" répète le Président de la République sortant, Boris Tadic. Le Premier ministre Vojislav Kostunica (DSS) a qualifié un éventuel futur Etat kosovar "d'Etat fantôme appelé à disparaître". Il accuse les Etats-Unis de soutenir l'indépendance du Kosovo pour leurs seuls intérêts militaires. Tout le monde s'accorde pourtant à penser que la province déclarera son indépendance rapidement après l'élection présidentielle serbe dont le 2e tour est prévu le 3 février prochain. L'Union européenne et les Etats-Unis ont expressément demandé aux autorités kosovares de différer leur annonce pour ne pas compromettre les chances de Boris Tadic de remporter le scrutin. Le 9 janvier dernier, Hashim Thaci (Parti démocratique du Kosovo, PDK) a été reconduit par le Parlement de la province à la présidence des institutions autonomes de la province de Serbie (gouvernement du Kosovo). Il gouvernera en coalition avec la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), formation du Président Fatmir Sejdiu. "Le Kosovo ne fera rien sans l'accord de Washington et de Bruxelles : pas d'action unilatérale" a indiqué Hashim Thaci.

Longtemps indécis sur la stratégie qu'il souhaitait suivre pour cette élection présidentielle, le parti du Premier ministre, Vojislav Kostunica, a annoncé, le 3 janvier dernier, son soutien à Velimir Ilic. C'est "le choix le plus naturel" puisqu'il s'agit de "notre plus proche partenaire de coalition" indique le communiqué du parti. Le DSS s'est effectivement allié avec Nouvelle Serbie lors des dernières élections législatives du 21 janvier 2007 une alliance que le parti peut difficilement négliger dans la perspective des élections municipales qui viennent d'être fixées au 11 mai prochain. Velimir Ilic est également soutenu par la Liste pour la coalition du Sandzak (LZS) dirigée par le maire de Novi Pazar, Suleiman Ugljanin.

Seul candidat à avoir voté contre la résolution du Parlement sur le Kosovo, Cedomir Jovanovic fait campagne sous le slogan "La vie est loi". Le leader du Parti libéral-démocrate, qui met en avant les questions socioéconomiques, attire un électorat européen et démocrate déçu par les alliances de Boris Tadic avec les nationalistes du DSS.

"Pour une Serbie où tout le monde se sent bien", tel est le slogan d'Itsvan Pastor qui a recueilli 13 018 signatures pour se présenter à cette élection présidentielle. Le candidat de la minorité hongroise mène campagne pour l'autonomie des Hongrois de Voïvodine et l'autonomie territoriale des 8 communes du Nord de la région au sein desquelles les Hongrois sont majoritaires. Il espère obtenir le soutien des autres minorités nationales du pays mais aussi celui des citoyens de Voïvodine. "Il est étrange qu'une communauté ethnique présente son propre candidat à l'élection présidentielle" a souligné le Chef de l'Etat sortant Boris Tadic à propos de la candidature d'Itsvan Pastor.

Enfin, le 11 janvier dernier, la Commission électorale a annoncé sa décision de ne pas autoriser les observateurs britanniques ou américains à se rendre en Serbie pour surveiller le déroulement de l'élection présidentielle "parce que ces pays veulent nous détruire et nous voler le Kosovo" a affirmé le représentant du Parti radical à la Commission, Slavoljub Milenkovic.

"La campagne électorale est principalement centrée sur les indécis et sur ceux qui ne se demandent pas pour qui ils vont voter mais s'ils vont se rendre aux urnes" indique Djordje Vukovic, analyste au Centre pour des élections libres et démocratiques (CeSID). Aucun des candidats ne semble être en mesure de remporter le scrutin dès le 1er tour. Dans ce cas, un 2e tour sera organisé le 3 février.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, Boris Tadic arriverait en tête avec 33% des suffrages. Le Président sortant devancerait le leader du Parti radical, Tomislav Nikolic, qui obtiendrait 27% des voix. Velimir Ilic et Milutin Mrkonjic recueilleraient chacun 4% des suffrages et Cedomir Jovanovic, 3% des voix. Les 4 autres candidats n'obtiendraient qu'un petit nombre de suffrages.

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