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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Une large majorité de Lettons (74,80%) se sont prononcés contre l'adoption du russe comme deuxième langue nationale officielle du pays. Un quart des électeurs (24,88%) a répondu "oui" à la question posée – Etes-vous favorable à l'adoption des amendements à la Constitution de la République lettone qui prévoit d'attribuer au russe le statut de deuxième langue nationale officielle ? – lors d'un référendum organisé le 18 février dernier.
Le "non" a atteint des sommets dans la région de Kurzeme (ouest) où 91,53% des électeurs ont rejeté la modification de la Constitution. A Riga, 63,82% ont fait ce même choix. Le "oui" n'est majoritaire que dans une seule des cinq régions du pays, à Latgale, où il a représenté 55,80% des suffrages.
La moitié des inscrits aux dernières élections législatives, soit 771 893 personnes, devaient voter "oui" pour que l'amendement soit adopté.
La consultation populaire a mobilisé les Lettons : plus des deux tiers (69,23%) se sont rendus aux urnes. La participation a été élevée à Riga (77%) et dans les régions de Vidzeme (nord), 72%, et de Kurzeme, 70%. "C'est une question d'identité nationale, ce qui explique pourquoi la plupart des gens n'ont pas considéré ce référendum comme un simple jeu politique et ont participé aussi massivement" a déclaré Ivars Ijabs, politologue de l'université de Lettonie,.
Environ 350 000 personnes, soit 17% de la population (chiffres fournis par le directeur de la Commission électorale centrale de Lettonie, Arnis Cimdars), "non-citoyennes" qui ne possèdent pas le droit de voter aux élections nationales et locales (ni celui de travailler dans la police ou dans l'armée) n'ont pas été autorisés à participer au référendum. En majorité de langue maternelle russe, ces personnes ne possèdent pas la nationalité lettone mais n'étant pas ressortissantes d'un autre pays, se retrouvent privées de toute autre nationalité. Leur statut leur donne le droit de résider dans le pays et l'accès aux services sociaux. Au total, 27% de la population lettone appartiennent à la minorité russophone.
Vladimir Linderman, l'un des organisateurs du référendum, a affirmé que les russophones de Lettonie poursuivront la lutte pour faire valoir leurs droits. "Pour le moment, nous n'avons pas d'autres projets concrets. Nous savons tout simplement que le référendum n'est pas une fin. Je pense que les habitants russophones poursuivront leur lutte pour l'égalité en droits. Tout se passera, bien entendu, dans le cadre de la loi. La lutte continue. Notre principal objectif était d'amorcer le dialogue et celui-ci vient de commencer, certes par une hystérie et un souffle de panique, mais c'est mieux que le silence qui avait pesé pendant une vingtaine d'années" a-t-il souligné, ajoutant "Nous, les Russes ne sommes pas ici des visiteurs de passage, ni des étrangers ni des occupants. Les Russes de Lettonie doivent avoir les mêmes droits et ne pas être considérés comme des citoyens de seconde zone". "Nous devons entamer un dialogue qui, j'espère, permettra aux gens qui parlent des langues différentes de mieux se comprendre et de se respecter mutuellement, ce qui, en fin compte, rendra la société lettone plus unie et l'Etat plus fort" a indiqué Nils Usakovs, maire de Riga et leader du Centre de l'Harmonie (SC) qui était favorable au "oui" au référendum.
Les partisans du "oui" voyaient dans la consultation populaire l'occasion de mettre fin à une forme de discrimination alors que leurs opposants préconisaient de voter "non" arguant qu'une telle modification de la Constitution menaçait l'indépendance de la Lettonie.
Le président de la République lettone Andris Berzins, le Premier ministre Valdis Dombrovskis Unité (Vienotoba, V) et la présidente du Parlement Solvita Aboltina (V) ont voté contre l'attribution du statut de langue nationale officielle au russe. Cette dernière a qualifié le référendum de "provocation" et le chef de l'Etat a déclaré qu'une victoire du "oui" serait "un vote contre la Lettonie". Quant au chef du gouvernement, il a souligné que la langue lettone constituait "l'un des fondamentaux de l'Etat".
Les mots étaient plus violents du côté de l'Alliance nationale-Tout pour la Lettonie, parti membre de la coalition gouvernementale actuelle. "C'est un coup de poignard dans le dos. Le référendum n'est pas seulement à propos de la langue, c'est une lutte pour le pouvoir" a déclaré son leader Raivis Dzintars.
Le référendum faisait suite au lancement le 7 mars par le mouvement pro-russe Dzimta valoda (Langue natale) d'une pétition en faveur de l'officialisation du russe en Lettonie. Celle-ci a été signée par 187 378 électeurs (dont 90 000 habitants de Riga), soit 12% du nombre total (un minimum de 154 379 signatures, représentant 10% des électeurs, était requis pour lancer la procédure). Les signatures ont été validées le 19 décembre dernier par la Commission électorale centrale de Lettonie. Trois jours plus tard, le 22 décembre, la Saeima, chambre unique du Parlement, rejetait le projet de loi visant à officialiser le russe (60 des 100 députés ont voté contre, aucun ne s'est prononcé pour), ce qui a conduit à l'organisation d'un référendum. 30 parlementaires (dont 15 du parti Unité, du Premier ministre Valdis Dombrovskis, 14 de l'Alliance nationale-Tout pour la Lettonie et 1 de l'Union des Verts et des paysans (ZZS) ont ensuite – en vain – déposé un recours devant la Cour constitutionnelle pour demander l'annulation (pour anticonstitutionnalité) de l'organisation du référendum.

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