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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Le 6 mai prochain, les Serbes sont appelés aux urnes pour trois scrutins : le 1er tour du scrutin présidentiel (si nécessaire, un 2e tour aura lieu deux semaines plus tard, soit le 20 mai prochain), des élections législatives (renouvellement des 250 membres de l'Assemblée nationale, chambre unique du Parlement) et enfin un scrutin municipal. Les électeurs de Voïvodine (nord du pays) désigneront également les membres de leur Assemblée provinciale.
Moment électoral de la plus haute importance donc pour les 7 millions d'électeurs serbes qui vont renouveler en l'espace de quelques jours l'ensemble de leurs représentants politiques.
L'élection présidentielle
12 personnes sont officiellement candidates à l'élection présidentielle serbe. :
– Boris Tadic (Parti démocrate, DS), chef de l'Etat sortant ;
– Tomislav Nikolic, leader du principal parti d'opposition, le Parti progressiste (SNS), et candidat pour la 4e fois consécutive à l'élection présidentielle ;
– Cedomir Jovanovic, leader du Parti libéral-démocrate (LDP), concourt pour la 2e fois à l'élection présidentielle (il avait recueilli 5,34% des suffrages au 1er tour du scrutin présidentiel du 20 janvier 2008) ;
– Itsvan Pastor, candidat de l'Union des Hongrois de Voïvodine (VMSZ) pour lequel il s'agit également de la 2e candidature (il avait obtenu 2,26% des voix le 20 janvier 2008) ;
– Vojislav Kostunica, ancien Premier ministre (2004-2008) et candidat du Parti démocratique de Serbie (DSS) ;
– Ivica Dacic, leader du Parti socialiste (SPS) et ministre de l'Intérieur sortant qui concourt pour la 2e fois (il avait recueilli 4,04% au 1er tour du scrutin présidentiel du 13 juin 2004) ;
– Zoran Stankovic, actuel ministre de la Santé et ancien ministre de la Défense (2005-2007), candidat du Parti des régions unies (URS) ;
– Jadranska Seselj (Parti radical serbe, SRS), épouse du leader du parti Vojislav Seselj, actuellement détenu à La Haye et en attente de procès pour son inculpation de crimes contre l'humanité et crimes de guerre par le TPIY ;
– Vladan Glisic, candidat indépendant soutenu par le mouvement d'extrême droite Dveri ;
– Danica Grujicic, candidate de l'Alliance social-démocrate ;
– Zoran Dragisic, candidat indépendant soutenu par le Mouvement des travailleurs et des paysans de Serbie
– Muamer Zukorlic, mufti de la communauté islamique de Serbie soutenu par la Coalition des Albanais de la Vallée de Presevo dirigée par l'unique député albanais au Parlement, Riza Halimi.
La décision du 4 avril dernier du président sortant Boris Tadic d'organiser le scrutin présidentiel le même jour que les élections législatives est judicieuse puisqu'elle lui permet d'appuyer la campagne de son parti (DS), à la peine dans les enquêtes d'opinion, sur sa propre personne et de dynamiser une campagne électorale jusqu'alors un peu atone. "Le scrutin présidentiel va aider les partis politiques car le charisme des leaders augmentera le taux de participation" estime le politologue Vladimir Goati. Le Parti démocrate (DS) devrait donc en bénéficier, les électeurs du principal parti d'opposition – le Parti progressiste (SNS) – étant traditionnellement très mobilisés.
Le Parti démocrate peut-il se maintenir au pouvoir ?
"Ces élections constituent une opportunité pour décider si nous voulons continuer le processus de réforme qui nous a valu la reconnaissance de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe et nous a donné l'opportunité de poursuivre une politique qui attire les investisseurs et créé des emplois" a déclaré le chef de l'Etat sortant, Boris Tadic.
Celui-ci répète à ses compatriotes que la voie choisie par son parti constitue une garantie pour l'avenir de la Serbie. "Tout autre chemin est incertain et serait risqué pour les citoyens comme pour l'Etat. Nous ne savons pas où irait le pays si la coalition rassemblant Tomislav Nikolic (leader du SNS), Bogoljub Karic (qui dirige le Mouvement de la force, PSS) et Velja Ilic (chef de Nouvelle Serbie, NS) remportait les élections" a souligné Boris Tadic. Celui-ci a mis ses compatriotes en garde quant à l'évolution de Tomislav Nikolic qui, a-t-il rappelé, dit actuellement des choses différentes de ce qu'il affirmait hier. "La question est : "que dira-t-il demain ?" a demandé le président sortant.
"Le Parti démocrate a modernisé le pays pour améliorer la vie des Serbes. Nous avons pris des risques à des moments difficiles, y compris celui de ne pas être populaires. Le Parti progressiste ne cache pas le fait qu'il dit certaines choses dans le seul but de remporter les élections" a-t-il souligné.
"Je m'attends à ce que Belgrade démarre les négociations d'adhésion avec l'Union européenne vers la fin de l'année. Si la Serbie continue sur le même chemin, elle rejoindra certainement l'Union européenne en 2020" répète Boris Tadic. Le chef de l'Etat a précisé qu'il excluait toute collaboration avec le Parti progressiste ainsi qu'avec le Parti radical serbe et le Parti démocratique de Serbie. "Nous sommes prêts à négocier avec tous les autres partis" a-t-il déclaré.
Le Parti démocrate doit cependant faire face au mécontentement des Serbes qui traversent une sévère crise économique même si le pays a renoué avec la croissance en 2010. La croissance du PIB reste faible (0,5% prévus en 2012), le chômage affecte près d'un quart de la population active (23,7% en février), 400 000 emplois ont été perdus depuis de début de la crise économique et 7,3 millions des Serbes vivent sous le seuil de pauvreté. En janvier dernier, le Fonds monétaire international (FMI) a gelé une tranche d'aide de 1,3 milliard $ destiné à Belgrade, le pays n'étant pas parvenu à suffisamment assainir ses finances publiques. Le FMI exige de la Serbie qu'elle réduise son déficit public à 4,25% de son PIB.
L'heure de Tomislav Nikolic a-t-elle sonné ?
"Les gens au pouvoir ne se soucient pas de vos conditions de vie" a déclaré le leader du Parti progressiste (SNS) aux 10 000 Serbes qui ont manifesté le 26 avril dernier dans le centre de Belgrade contre les difficultés économiques et la corruption. "S'ils étaient préoccupés, ils auraient fait quelque chose pour réduire le taux de chômage et attirer des investissements" a-t-il ajouté. Tomislav Nikolic a assuré que s'il était élu à la tête du pays en mai prochain, il améliorerait la vie quotidienne des Serbes en réformant le système des impôts, en augmentant les retraites et en attirant les investissements financiers.
Toujours nationaliste mais désormais pro-européen et donc favorable à l'intégration de la Serbie dans l'Union européenne, Tomislav Nikolic affirme néanmoins que l'adhésion de Belgrade doit passer après l'amélioration des conditions de vie de ses compatriotes. "Notre entrée dans l'Union européenne ne se fera pas avant 8 ou 10 ans. Mais c'est maintenant que nous devons vivre. Et nous devons trouver des réponses aux difficultés que nous rencontrons. Nous ne pouvons juste nous coucher et attendre de rejoindre Bruxelles. Et que se passera t-il si cela n'arrive jamais ?" s'interroge le leader progressiste.
Ce dernier aime également à rappeler que la Serbie est "une maison avec deux portes – l'une donnant sur l'Ouest et l'autre sur l'Est – qui doivent toutes deux rester ouvertes". Pour Tomislav Nikolic, Belgrade doit intensifier ses relations avec la Russie.
Reste que certains analystes serbes et européens redoutent toujours qu'une fois au pouvoir, le leader du Parti progressiste ne ramène le pays aux années de guerre, pas si anciennes que cela, et entretienne des relations conflictuelles avec les pays occidentaux.
Boris Tadic est le favori de l'élection présidentielle et les analystes politiques assurent que le Parti démocrate sera en mesure, à l'issue du scrutin législatif, d'obtenir une majorité parlementaire et de former une coalition gouvernementale.
Selon la dernière enquête d'opinion réalise par l'institut Faktor Plus à la fin du mois d'avril, Tomislav Nikolic et le président de la République sortant, Boris Tadic, sont au coude-à-coude dans la course présidentielle. Le premier recueillerait 36,1% des suffrages et le deuxième 35,7% des voix. Le socialiste Ivica Dacic arriverait en 3e position suivi du libéral-démocrate Cedomir Jovanovic et de l'ancien Premier ministre Vojislav Kostunica. Tomislav Nikolic et Boris Tadic devraient donc s'affronter lors d'un 2e tour de scrutin le 20 mai prochain.
En ce qui concerne les élections législatives, le Parti progressiste (SNS) est crédité de 33,5% des suffrages, devançant de plus de cinq points le Parti démocratique (DS) qui remporterait 28,3% des voix. Le Parti socialiste (SPS), membre de la coalition gouvernementale actuelle du Premier ministre Mirko Cvetkovic (qui rassemble également le Parti démocrate, le Parti des retraités unis (PUPS) de Jovan Krkobabic, G17+ de Mladjan Dinkic, le Parti des régions unies (URS), le Parti social-démocrate (SDP) de Rasim Ljajic et l'Action démocratique du Sandjak (SDA)) arriverait en 3e position avec 11,8% des suffrages, et se retrouverait alors en position de faiseur de roi. Le parti pourrait obtenir, en échange de son soutien au Parti démocrate, le poste de Premier ministre pour son leader Ivica Dacic.
Après environ dix ans de démocratie en Serbie et déjà deux affrontements entre les deux leaders politiques, Boris Tadic pourrait cependant jouer une partie plus difficile que prévue.
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