Résultats

Le président roumain Traian Basescu échappe de nouveau à la destitution

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

-

30 juillet 2012
null

Versions disponibles :

FR

EN

Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Le président roumain Traian Basescu échappe de nouveau à la destitution

PDF | 113 koEn français

Cinq ans après le 17 avril 2007, date du premier référendum sur sa destitution de la tête de l'Etat, le président de la République de Roumanie Traian Basescu est une nouvelle fois sorti victorieux du combat qui l'opposait, cette fois, au Premier ministre Victor Ponta (Parti social-démocrate, PSD). La majorité des Roumains, appelés à se prononcer pour ou contre la destitution du chef de l'Etat, ont en effet boudé les urnes le 29 juillet. Seuls 46,13% sont allés voter alors que la participation d'au moins la moitié des inscrits était obligatoire pour que la consultation soit valide. Le gouvernement avait tenté de supprimer ce seuil, inscrit dans la loi électorale de 2010, avant d'être rappelé à l'ordre par la Commission européenne et les chancelleries occidentales. Victor Ponta avait pourtant tout fait pour atteindre le seuil minimum de participation en augmentant de quatre heures les horaires habituels d'ouverture des bureaux de vote (de 7h à 23h) et en installant une cinquantaine de bureaux dans les hôtels et les restaurants du littoral de la mer Noire où certains Roumains passent leurs vacances.

"Les Roumains ont rejeté le coup d'Etat des 256 parlementaires conduits par le Premier ministre Victor Ponta et le président intérimaire Crin Antonescu. Les Roumains ont décidé de leur sort en invalidant le référendum" a déclaré président de la République Traian Basescu à l'issue des résultats. "La vraie question est : veut-on rester au sein de l'Union européenne ou passer sous la coupe d'une clique de politiciens et d'hommes d'affaires qui veulent contrôler le pays et son système judiciaire ?" avait interrogé le chef de l'Etat au cours de la campagne. "L'enjeu du vote n'est pas mon siège de président de la République mais la Roumanie européenne. Mon espoir, c'est que les Roumains mettront de côté les questions économiques et défendront une Roumanie européenne" avait-il répété.

Traian Basescu avait été destitué le 6 juillet dernier par le Parlement. L'Union sociale libérale (USL), coalition au pouvoir qui rassemble le Parti social-démocrate (PSD) de Victor Ponta, le Parti national libéral (PNL) de Crin Antonescu et le Parti conservateur (PC) de Daniel Constantin, accusait le président Basescu d'avoir "gravement violé la Constitution" en s'attribuant des prérogatives réservées au Premier ministre, d'avoir "enfreint la séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice" et enfin d'avoir "sapé la démocratie" en imposant des mesures d'austérité qui "ont appauvri la population".

"Quel que soit le taux de participation final, aucun homme politique ne peut ignorer la volonté de millions de votants sans être coupé de la réalité" a déclaré le Premier ministre Victor Ponta. Le retour de Traian Basescu au palais de Cotroceni (résidence du chef de l'Etat roumain) et la cohabitation avec le Premier ministre posent de nombreuses questions.

"La crise va s'aggraver, ce sera une catastrophe pour la Roumanie car Traian Basescu ne s'arrêtera pas là. Il va essayer de reconduire les mesures qu'il a déjà prises – imposition des revenus, coupes des salaires et des retraites" a déclaré le Premier ministre tentant de jouer sur l'impopularité du président de la République et d'effrayer les électeurs.

Aux yeux de nombreux analystes cependant, le gouvernement souhaitait, par l'organisation de ce référendum sur la destitution du chef de l'Etat, renforcer son pouvoir sur le pays et tenter d'éviter une série de procès dans le cadre de la lutte anti-corruption comme, par exemple, celui qui a vu Adrian Nastase (PSD), Premier ministre entre 2000 et 2004 et mentor du chef du gouvernement actuel, condamné à deux ans de prison ferme pour détournement de plus d'un million € de fonds publics le 20 juin dernier par la Haute Cour de justice – une première dans le pays pour un personnage aussi haut placé dans la hiérarchie

Le référendum du 29 juillet est donc loin de mettre un terme à la crise politique roumaine. Le président Basescu va se réinstaller à la présidence de la République mais les tensions avec le Premier ministre sont si fortes que l'on peut se demander si les deux hommes seront capables de cohabiter et d'agir pour le bien du pays.

Les Roumains sont de nouveau appelés aux urnes le 28 novembre prochain pour les élections parlementaires.

Bucarest va également devoir apporter des réponses aux 11 demandes que lui a faites le président de la Commission européenne José Manuel Barroso mi-juillet. Bruxelles a en effet dénoncé des atteintes à l'Etat de droit perpétrées par le gouvernement de Victor Ponta et demandé à ce dernier l'abrogation des deux décrets d'urgence (sur la modification des règles du référendum et sur la réduction des pouvoirs de la Cour constitutionnelle qui n'est par exemple plus habilitée à se prononcer sur les décisions du Parlement), la nomination d'un médiateur indépendant (celui-ci, seule personne habilitée à contester les décrets du gouvernement en Roumanie, a été remplacé), le renforcement du système judiciaire du pays, l'amélioration de la lutte contre la corruption et la restauration des pouvoirs de la Cour constitutionnelle.

Victor Ponta s'est engagé à répondre rapidement à la Commission européenne. "Nous allons regarder les lois et la mise en œuvre des lois, pas seulement les lettres (rédigées par Victor Ponta le 16 juillet dernier à l'attention de José Manuel Barroso)" a prévenu la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Justice, des Droits fondamentaux et de la Citoyenneté, Viviane Reding.

Le président roumain Traian Basescu échappe de nouveau à la destitution

PDF | 113 koEn français

Pour aller plus loin

Élections en Europe

 
2013-05-28-16-28-21.8807.jpg

Corinne Deloy

28 avril 2025

Les Polonais sont appelés aux urnes pour élire le successeur d’Andrzej Duda (Droit et justice, PiS) à la présidence de la République. Ce dernier, qui a effectu...

Élections en Europe

 
2013-05-28-16-28-33.2244.jpg

Corinne Deloy

28 avril 2025

Le 13 mars 2025, le président de la République portugaise, Marcelo Rebelo de Sousa, a annoncé la dissolution de l'Assemblée de la République, chambre unique du parle...

Élections en Europe

 
2013-05-28-16-30-07.6453.jpg

Corinne Deloy

14 avril 2025

Un pays en crise La Roumanie a plongé dans la tourmente après l’annulation par la Cour constitutionnelle, à l’unanimité de ses membres, du deuxième tour...

Élections en Europe

 
2013-05-28-15-22-23.2594.jpg

Corinne Deloy

24 février 2025

L'Union chrétienne-démocrate (CDU), principal parti d’opposition, dirigé par Friedrich Merz, a remporté les élections fédérales anticipées...

La Lettre
Schuman

L'actualité européenne de la semaine

Unique en son genre, avec ses 200 000 abonnées et ses éditions en 6 langues (français, anglais, allemand, espagnol, polonais et ukrainien), elle apporte jusqu'à vous, depuis 15 ans, un condensé de l'actualité européenne, plus nécessaire aujourd'hui que jamais

Versions :