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La droite arrive en tête des élections législatives bulgares mais le pays se retrouve dans l'impasse

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Corinne Deloy

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13 mai 2013
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

La droite arrive en tête des élections législatives bulgares mais le pays se ret...

PDF | 154 koEn français

Les Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB), parti dirigé par le Premier ministre sortant Boïko Borissov, sont arrivés en tête des élections législatives anticipées qui se sont déroulées en Bulgarie le 12 mai. Selon un dépouillement partiel, le parti a recueilli 30,53% des suffrages et remporté 97 sièges (-20 par rapport au dernier scrutin du 5 juillet 2009) à l'Assemblée nationale, chambre unique du parlement. Ce résultat constitue une première puisque jamais auparavant le Premier ministre sortant n'avait remporté les élections suivantes depuis 1990, date à laquelle le pays est redevenu démocratique. Cependant, le parti n'a pas obtenu la majorité nécessaire pour gouverner seul.

Le Parti socialiste (BSP), principal parti d'opposition, mené par l'ancien Premier ministre Sergueï Stanichev (2005-2009) a obtenu 26,65% des voix et 85 sièges (+45). Le Mouvement pour les droits et les libertés (DPS), dirigé par Lioutvi Mestan, qui représente la minorité turque de Bulgarie (environ 8,8% de la population), a pris la troisième place avec 11,22% des suffrages et 34 sièges (-3). Enfin, Ataka, parti d'extrême droite conduit par Volen Siderov, a recueilli 7,31% des voix et obtenu 24 sièges (+3). La participation a été faible : moins de la moitié des Bulgares (48%) se sont rendus aux urnes, tandis qu'ils étaient 60,2% à être allés voter lors des élections générales précédentes du 5 juillet 2009.

Source : Site internet (http://results.cik.bg/ )

Deux scénarios sont envisageables à l'issue du scrutin : une alliance du GERB avec Ataka ou avec le Parti socialiste. "Une grande coalition permettrait surtout de protéger les intérêts des hommes politiques" a déclaré Assen Yordanov, co-fondateur du site d'investigation Bivol.bg

"Oui, le pays va mal, comme toute l'Europe, d'ailleurs. Et ça n'ira pas forcément mieux. Mais, en temps de crise comme en temps de guerre, il faut des gens prêts à tout pour leur pays" a souligné Boïko Borissov qui s'est déclaré prêt à "se sacrifier" pour gouverner la Bulgarie quatre années supplémentaires éventuellement avec les autres partis de droite. Le Premier ministre sortant a en revanche écarté toute idée d'alliance avec les socialistes : "C'est comme si le Real de Madrid et le Barça décidaient de former une seule équipe" a-t-il souligné. "La Bulgarie a besoin de stabilité et si les partis sont responsables, ils devraient soutenir un cabinet minoritaire" a déclaré le ministre de l'Intérieur sortant, Tsvetan Tsvetanov (GERB).

"En aucun cas nous ne pouvons soutenir le GERB. Nous ne pouvons pas appuyer des gens qui se sont prononcés pour une politique anti-bulgare, pour une politique contre notre Etat" a déclaré le dirigeant nationaliste Volen Siderov à l'annonce des résultats. Ataka avait soutenu le gouvernement de Boïko Borissov en 2009 avant de prendre ses distances avec lui.

Une grande coalition entre le GERB et le Parti socialiste paraît impossible tant la campagne électorale a été violente entre les deux principaux partis du pays. "Il y a un très grand danger de blocage du parlement. Le caractère très négatif de la campagne, dominée par les scandales, a beaucoup entamé la légitimité de la classe politique aux yeux des Bulgares" a indiqué le directeur de l'Institut d'études régionales et internationales, Ognian Mintchev.

"Les principaux partis d'opposition - Parti socialiste et Mouvement pour les droits et les libertés - pourraient aussi avoir ensemble plus de 120 sièges et cela change tout" a indiqué Andreï Raïtchev, politologue et analyste à l'institut Gallup.

Le dirigeant socialiste Sergueï Stanichev a d'ailleurs déclaré qu'il se tenait prêt à négocier avec le parti turcophone, avec Ataka et avec les organisations représentant la société civile pour former un gouvernement et éviter de nouvelles manifestations. "Le GERB est complètement isolé, les résultats montrent le début de la mort lente du parti. La première chose à faire, c'est d'expulser le GERB du pouvoir" a-t-il souligné. "Nous allons aussi discuter avec différentes organisations de citoyens pour aider les citoyens à prendre le contrôle des institutions." a ajouté le leader de l'opposition. Plamen Oresharski, ancien ministre des Finances (2005-2009), tête de liste du Parti socialiste pour les élections législatives du 12 mai, et candidat du Parti socialiste au poste de Premier ministre.

"Nous devons empêcher l'aggravation de la crise politique en Bulgarie. Nous devons trouver vite la formule pour former un gouvernement stable" a affirmé Lioutvi Mestan.

Si les partis échouent à former une coalition à l'issue des élections législatives, le gouvernement intérimaire dirigé depuis le 12 mars dernier par Marin Raykov devra se maintenir dans ses fonctions. Le Président de la République Rossen Plevneliev (GERB) avait déclaré durant la campagne électorale que dans le cas où aucun gouvernement ne pourrait être formé à l'issue du scrutin, il serait préférable de constituer un gouvernement d'experts pour éviter le risque que le pays entre dans une période de déstabilisation.

"Mon vrai souci est que la classe politique mais aussi les institutions publiques ont été délégitimées au-delà du point de non retour" analyse Ivelin Sardamov de l'université américaine de Bulgarie. Les événements qui ont émaillé la campagne électorale ne peuvent que confirmer son intuition.

A la fin du mois de mars, le ministre de l'intérieur sortant (et vice-président du GERB) Tsvetan Tsvetanov a été accusé d'avoir organisé des écoutes téléphoniques illégales. Le Parquet de Sofia a déclaré disposer de suffisamment de preuves pour l'inculper. "L'affaire des écoutes téléphoniques, qui secoue le pays en ce moment, prouve une fois de plus que le système est gangrené. Des centaines d'opposants, d'hommes d'affaires, de journalistes auraient été espionnés par les services du ministre de l'Intérieur, Tsvetan Tsvetanov, candidat aux élections législatives. Cela montre que le système est entièrement corrompu. L'Union européenne doit mettre la Bulgarie en quarantaine, je ne vois pas d'autre solution" a affirmé le journaliste Assen Yordanov.

Le directeur de la direction générale de la lutte contre le crime organisé (GDBOP) Stanimir Florov, bras droit de Tsvetan Tsvenatov, directeur de campagne de Boïko Borissov, a été soupçonné d'avoir, en 1999, touché un dessous-de-table de 20 000 € afin de prévenir des suspects et/ou des prévenus d'éventuelles actions de la polices à leur encontre et d'avoir fermé les yeux en échange de pots-de-vin sur les canaux de la drogue contrôlés par des ressortissants du Moyen-Orient en Bulgarie. Le Président de la République Rossen Plevneliev a demandé à ce que Stanimir Florov soit suspendu de ses fonctions. Il a été remplacé à son poste par Valentin Trifonov.

Quelques jours avant le scrutin, le GERB a déposé un signalement pour abus de pouvoir auprès du Parquet à l'encontre du dirigeant socialiste Sergueï Stanichev. Il soupçonne ce dernier d'avoir, à l'époque où il était Premier ministre entre 2005 et 2009, choisi de façon frauduleuse l'entreprise chargée de réaliser les nouveaux documents d'identité des Bulgares et augmenté d'une manière injustifiée le budget de la commande (de 16 à 116 millions €). Parce que cette entreprise était représentée à l'époque par l'épouse d'un responsable du Parti des socialistes européens (PSE), Hannes Swoboda, le parti de Boïko Borissov a affirmé que Sergueï Stanichev pourrait avoir de cette façon "acheté" son poste de président du parti européen (le dirigeant socialiste préside le PSE depuis novembre 2011).

Enfin, la veille des élections législatives, le parquet de Sofia a annoncé la saisie de 350 000 bulletins de vote illicites dans une imprimerie de la ville de Kostinbrod, dont le patron, Yordan Bontchev, est un élu municipal membre du GERB. Le Parti socialiste a crié à la fraude électorale, le dirigeant du Mouvement pour les droits et les libertés, Lioutvi Mestan, a parlé d'une tentative de coup d'Etat via une prise du pouvoir par une falsification massive du vote et Ivan Kostov, ancien Premier ministre (1997-2001) et dirigeant des Démocrates pour une Bulgarie forte (DSB), a demandé le report des élections législatives du 12 mai.

Selon l'organisation Transparency International, la Bulgarie est le deuxième pays le plus corrompu de l'Union européenne.

L'Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE) avait envoyé plus de 200 observateurs en Bulgarie pour surveiller le déroulement du scrutin, soit sa plus grande mission dans le pays depuis les premières élections libres de 1990 dans le pays. Au total, 275 observateurs de 5 organisations internationales différentes étaient présents pour observer le scrutin. 15 ONG bulgares s'étaient également enregistrées pour surveiller le processus électoral. Plusieurs partis d'opposition (Parti socialiste, les Démocrates pour une Bulgarie forte, Ataka et le Mouvement pour les droits et les libertés) avaient demandé à l'institut autrichien SORA d'effectuer un comptage parallèle des bulletins de vote.

Durant les dernières semaines, le parquet a ouvert 43 enquêtes sur des achats de votes présumés pour les élections législatives du 12 mai. Dans une enquête d'opinion réalisée par l'institut NCIOM et publiée le 19 avril dernier, 11% des Bulgares se déclaraient prêts à vendre leur bulletin de vote. Selon l'adjointe au procureur général Assia Petrova, le prix d'une voix peut aller jusqu'à 100 leva (50 €). Après les élections présidentielle et locales des 23 et 30 octobre 2011, 102 personnes avaient été condamnées pour ce délit, dont deux à des peines de prison ferme, mais le plus souvent, les organisateurs des trafics de votes restent impunis.

La Bulgarie n'est pas à l'abri d'une reprise des manifestations (provoquées par une hausse importante des tarifs de l'électricité) qu'elle a connues au début de cette année. Les coordonnateurs du mouvement social ont ainsi menacé d'appeler la population à redescendre dans les rues. "Les hommes politiques n'ont pas écouté la voix du peuple et nous n'avons pas l'intention de battre en retraite" a déclaré Yanaki Gantchev, chef de file du mouvement du Pont aux aigles (Orlov most, carrefour de Sofia où se sont déroulés de violents heurts durant les premiers mois de 2013). " Ce vote est sur la voie de reproduire le précédent parlement de l'oligarchie et de la mafia que nous avons chassé. Je crains que nous n'assistions pas seulement à des manifestations, il y aura des barricades" a indiqué Anguel Slavtchev du Mouvement pour le contrôle citoyen qui était candidat le 12 mai (avec l'Initiative civique démocratique de Stefan Peev).

Difficile de prédire ce qui sortira des négociations postélectorales en Bulgarie. Le pays aurait pourtant besoin de la stabilité indispensable pour mettre en place les réformes qui permettront d'endiguer véritablement la corruption et de briser les monopoles, d'allonger le temps de travail avant l'âge de départ à la retraite ou encore de réduire le nombre des hôpitaux et des universités. Quoi qu'il arrive, la marge de manœuvre du prochain gouvernement sera probablement très étroite face aux revendications sociales.

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