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Corinne Deloy
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Andrej Kiska, qui se présentait en candidat indépendant, a été élu le 29 mars président de la République de Slovaquie au 2e tour du scrutin présidentiel. Avec 59,38% des suffrages, il a largement devancé le Premier ministre sortant Robert Fico (Direction-Démocratie sociale, SMER-SD) qui a obtenu 40,61% des voix. Au 1er tour de scrutin, ce dernier avait remporté 28,01% des suffrages et Andrej Kiska, 24,01%.
Andrej Kiska s'est imposé dans 7 des 8 régions slovaques, seule la région de Trencin a voté en faveur de Robert Fico. Il a également réalisé ses résultats les plus élevés dans les plus grandes villes du pays, et notamment à Bratislava (74,16% des voix).
La participation s'est établie à 50,48%, un taux plus élevé que celui enregistré lors du 1er tour (+ 7,08 points).

"Je veux remercier les électeurs qui m'ont donné un mandat fort. Je vais remplir toutes les promesses que je leur ai faites. J'ai promis d'être le président de tous les citoyens ; je vais œuvrer pour unir et motiver les gens, pour que nous puissions être fiers de notre pays, pour que les gens se sentent bien ici" a déclaré Andrej Kiska à l'annonce des résultats. "Andrej Kiska pourrait attirer des sympathisants des candidats qui ont échoué au 1er tour et s'assurer aussi des votes de contestation tandis que Robert Fico compte surtout sur la mobilisation de son parti" affirmait Grigorij Meseznikov, directeur de l'Institut des Affaires publiques (IVO) durant l'entre-deux tours. Le candidat indépendant a en effet manifestement bénéficié d'un sentiment anti-Robert Fico et de la méfiance de la population à l'égard de la classe politique. "La victoire d'Andrej Kiska témoigne du fait que les Slovaques veulent un président capable de les représenter tous (...) Robert Fico a échoué à mobiliser ses partisans. Beaucoup d'électeurs sont déçus de son gouvernement" a indiqué Grigorij Meseznikov.
La campagne du candidat indépendant, centrée sur la lutte contre la corruption et la concentration des pouvoirs, a été un succès auprès de Slovaques inquiets d'une éventuelle présidentialisation du système politique du pays et surtout de voir un seul parti, voire un seul homme, rassembler tous les pouvoirs. "Le vote ne s'est pas fait pour Andrej Kiska mais contre Robert Fico et la menace qu'il représentait d'un contrôle par son parti de toutes les positions de pouvoir" a indiqué le politologue Samuel Abraham. En ce sens, le vote du 29 mars rappelle les deux tentatives - vaines - de l'ancien Premier ministre (1993-1994 et 1994-1998) Vladimir Meciar (Mouvement pour une Slovaquie démocratique, HZDS) à se faire élire à la tête de l'Etat (1999 et 2004).
"Andrej Kiska est un homme sans opinions politiques et sans capacité de leadership, mais il est un joker idéal pour tous ceux qui détestent la politique traditionnelle, et donc aussi celle menée par Robert Fico. Pour la première fois, le Premier ministre n'a pas su évaluer une nouvelle tendance et un changement de l'opinion publique qui n'est plus dirigée contre la gauche ou la droite mais contre la politique en tant que telle" écrit Dag Danis, éditorialiste politique au quotidien Dnes.
En dépit de sa forte popularité (liée à sa politique anti austérité et à sa défense des plus défavorisées et de la classe moyenne) et du soutien que lui avait apporté le président de la République sortant Ivan Gasparovic, le Premier ministre Robert Fico, qui n'avait pas hésité à qualifier l'élection présidentielle de "référendum sur (son parti) Direction-Démocratie sociale", a donc échoué dans son pari d'accéder à la tête de l'Etat. Dans la campagne pour le 2e tour, le chef du gouvernement avait dénoncé le passé de son adversaire qu'il avait qualifié d'"usurier" (Andrej Kiska a dirigé des sociétés de crédit à la consommation) et accusé d'être proche de l'église de scientologie. La question religieuse est un enjeu important en Slovaquie où 60% de la population se déclare catholique. Robert Fico a d'ailleurs à plusieurs reprises évoqué mis en avant son éducation catholique.
"Même en cas de sa défaite, Robert Fico continuera à occuper son poste de premier ministre, le gouvernement et le parlement continueront leur travail" a indiqué dans l'entre-deux tours le président du Conseil de la République, chambre unique du parlement, Pavol Paska (SMER-SD). "Robert Fico ne démissionnera pas de son poste et tentera de conserver le poste de Premier ministre jusqu'à la fin de son mandat en 2016, en dépit d'une autorité ébranlée" a déclaré Grigorij Meseznikov.
Agé de 51 ans, Andrej Kiska est né à Poprad, ville située au cœur de la Slovaquie. Il est diplômé de la faculté d'ingénierie électrique de l'université de technologie de Bratislava. Il a débuté sa carrière professionnelle comme designer avant de fonder, en 1996 TatraCredit, Triangle et Quatro, trois sociétés de crédit à la consommation qu'il revendra en 2005 à la banque slovaque VUB. Devenu multimillionnaire, il crée cette même année avec Igor Brosmann L'Ange de la charité (Dobry Anjel), association qui soutient financièrement les familles slovaques et tchèques défavorisées dont les enfants sont atteints de maladies graves et à laquelle il a fait don de 2,5 millions €. Andrej Kiska en a démissionné du conseil d'administration le 1er juin 2013 pour se consacrer à sa candidature à l'élection présidentielle.
Première personne à se déclarer candidate à ce scrutin à l'automne 2012, Andrej Kiska est également le premier chef de l'Etat slovaque qui ne possède pas de passé communiste depuis l'indépendance du pays en 1993.
Reste à voir ce que le nouveau chef de l'Etat, novice en politique positionné au-dessus des partis mais dont la vision politique reste floue, fera de son mandat. Il a assuré qu'il souhaitait faire contrepoids au gouvernement dirigé par Robert Fico. "Le nouveau chef de l'Etat est certes moins expérimenté que Robert Fico, mais il est un homme politique favorable à la démocratie, à l'économie de marché et à une orientation pro-occidentale de la politique étrangère" a indiqué Dag Danis. "Le seul risque, c'est que le Premier ministre Robert Fico, une fois vaincu, cherche un conflit avec le nouveau président de la République" affirme Grigorij Meseznikov.
Andrej Kiska prêtera serment le 15 juin, jour de l'expiration du 2e mandat de l'actuel président, Ivan Gasparovic. Il a indiqué que sa première visite à l'étranger le conduirait "bien sûr" en République tchèque.
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