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La Coalition de la gauche radicale (SYRIZA) d'Alexis Tsipras remporte les élections législatives en Grèce

Élections en Europe

Corinne Deloy

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21 septembre 2015
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Le Premier ministre sortant et dirigeant de la Coalition de la gauche radicale (SYRIZA), Alexis Tsipras, a réussi son pari en remportant les élections législatives anticipées qui se sont déroulées en Grèce le 20 septembre. SYRIZA a recueilli 35,46% des suffrages et remporté 145 sièges, soit -4 par rapport au précédent scrutin législatif du 25 janvier 2015. Il a devancé la Nouvelle démocratie (ND) d'Evangelos Meimarakis qui a obtenu 28,10% des voix et 75 sièges (-1). Aube dorée (XA), parti d'extrême droite dirigé par Nikolaos Michaloliakos, a conservé sa 3e place avec 6,99% des suffrages et 18 sièges (+1).

Le Mouvement socialiste panhellénique (PASOK) de Fofi Gennimata a recueilli 6,23% des voix et 17 sièges (+5) ; le Parti communiste (KKE), dirigé par Dimitris Koutsoumbas, a obtenu 5,55% des voix et 15 sièges (=). To Potami (La rivière), parti centriste de Stavros Theodorakis, qui avait fait campagne sur le fait qu'il n'avait jamais participé à aucun gouvernement, est en recul : 4,09% des suffrages et 11 sièges (-6). Les Grecs indépendants (ANEL), parti de droite populiste, membre du gouvernement sortant conduit par Panos Kammenos que beaucoup d'enquêtes d'opinion ne voyaient pas dépasser le seuil de 3% de voix indispensable pour se maintenir, a finalement recueilli 3,63% des suffrages et remporté 10 sièges (-3). L'Union centriste (EK) dirigée par Vassilis Leventis a recueilli 3,49% des suffrages et fait son entrée à la Vouli, chambre unique du parlement (9 sièges).

En revanche, l'Unité populaire (Laiki Enotita, LE), parti formé le 21 août dernier par 25 membres de SYRIZA opposés à la politique d'austérité qui ont fait sécession et dirigé par l'ancien ministre de la Restructuration, de la Production, de l'Environnement et de l'Energie (janvier-juillet 2015), Panayotis Lafazanis, n'a pas réussi à attirer les déçus d'Alexis Tsipras. Il a obtenu 2,86% des voix. " Nous avons perdu la bataille, mais nous n'avons pas perdu la guerre" a souligné Panayotis Lafazanis. Peut-être, mais les Grecs ont clairement indiqué qu'il ne souhaitaient pas se lancer dans de nouvelles négociations, voire dans un bras de fer avec les créanciers.

La participation a été très faible pour ce scrutin dans un pays où le vote est obligatoire. Un peu plus de la moitié des Grecs se sont rendus aux urnes : 56,14%, soit -7,73 points par rapport au scrutin du 25 janvier 2015.

Les Grecs vont élire un gouvernement de combat qui continuera avec la même détermination, le même sens du sacrifice, à mener des batailles pour défendre les droits de notre peuple, prendre son avenir en main et sceller la transition vers une ère nouvelle " avait déclaré Alexis Tsipras en allant voter. " Devant nous s'ouvre la voie du travail et des luttes " a-t-il tweeté à l'annonce des résultats. Enfin, il a précisé au cours de la soirée électorale : " Dès demain, nous nous retroussons les manches pour travailler dur ".

Le Premier ministre sortant conserve donc son poste. S'il s'est désormais débarrassé des opposants qui contestaient sa politique au sein même de son parti, sa majorité parlementaire devrait être fragile. Il a décidé de poursuivre sa coalition avec les Grecs indépendants (ANEL) " Ensemble, nous allons continuer le combat que nous avons commencé il y a 7 mois " a déclaré Alexis Tsipras lors d'un meeting aux côtés de Panos Kammemos au cours de la soirée électorale. " Lundi, avec le Premier ministre Alexis Tsipras nous allons procéder à la formation d'un gouvernement de coalition pour faire sortir la Grèce de la récession et du chômage " a confirmé le leader nationaliste.

Alexis Tsipras a visiblement convaincu une partie des Grecs qu'il était le mieux placé pour mettre en place de façon équitable et sociale des réformes exigées par les organisations internationales en échange du 3e plan d'aide signé le 13 juillet dernier. " Nous utiliserons chaque fenêtre d'opportunité possible pour alléger les effets de ce mémorandum " a répété Yiannis Burnous, responsable des relations internationales de SYRIZA.

Les Grecs ont sans doute apprécié que le Premier ministre sortant ait tout fait pour résister aux créanciers du pays et par là-même leur ait rendu un peu de leur dignité. Alexis Tsipras a en effet obtenu un plan d'aide d'une durée de 3 ans (alors que celui-ci était initialement prévu pour 5 mois) et contribué à faire bouger l'Europe selon ses propres termes.

Alexis Tsipras incarne toujours une rupture par rapport à l'ancienne classe politique hellène, une nouvelle fois fortement rejetée par les électeurs. " Les Grecs ne veulent pas de l'ancienne classe politique corrompue et l'opposition actuelle ne représente pas une voie alternative " indiquait Giorgos Contogeorgis, professeur de sciences politiques. " Alexis Tsipras bénéficie encore de l'image sentimentale du bon garçon qui fait ce qu'il peut dans un contexte difficile. Et surtout, il n'a aucun challenger crédible. Il est encore un homme neuf " confirmait Georges Sefertzis, politologue. Ses compatriotes ont donc décidé d'accorder au chef du gouvernement le temps qu'il leur demandait pour gouverner.

Il n'empêche : " Alexis Tsipras, qui a passé tant d'années à combattre l'austérité, pourrait se retrouver dans la position du cinquième Premier ministre grec à devoir imposer des mesures de rigueur " affirmait Georges Sefertzis. " Les électeurs ont voté pour un parti qui a abandonné ses promesses, changé de politique et provoqué l'effondrement des banques grecques, causant une inutile  récession" a déclaré Stathis Kalyvas, professeur de sciences politiques de l'université de Yale ajoutant. " Le gouvernement va désormais devoir mettre en œuvre un ensemble de réformes budgétaires et structurelles qu'il a rejeté vigoureusement auparavant ".

Agé de 41 ans et originaire d'Athènes, Alexis Tsipras est diplômé d'ingénierie civile de l'université polytechnique d'Athènes (UPNA). Il a travaillé plusieurs années comme ingénieur civil dans l'industrie du bâtiment. Très jeune, il s'engage dans les Jeunesses communistes (KNE) et milite dans plusieurs mouvements étudiants. Il fait partie du mouvement de réformateurs qui fait scission du Parti communiste à la fin des années 1980 et, en 1999, devient le premier secrétaire politique de la section de la jeunesse du parti (Neolaia Syn), une fonction qu'il exercera jusqu'en 2003.

Elu conseiller municipal d'Athènes en octobre 2006, Alexis Tsipras devient deux ans plus tard président du Synaspismos (ancien parti d'extrême gauche) et l'année suivante, entre à la Vouli. Il est réélu lors des élections législatives du 6 mai 2012 où la Coalition de la gauche radicale (dont il devient président le 22 mai), enregistre le résultat le plus élevé de son histoire, avec 16,78% des suffrages et 52 sièges (26,9% des suffrages et 71 députés le 17 juin suivant). Le parti s'impose aux élections législatives du 25 janvier 2015 et Alexis Tsipras devient alors le premier chef du gouvernement issu de la gauche radicale en Europe.

L'homme qui ne porte jamais de cravate et qui a prêté serment sur sa conscience plutôt que sur la Sainte Trinité à l'instar de ses prédécesseurs conserve donc son poste à la tête du gouvernement pour quatre années supplémentaires.

Le futur gouvernement grec ne dispose que de peu voire d'aucune marge de manœuvre. Le texte signé le 13 juillet dernier par Athènes et ses partenaires européens accorde en effet à la Grèce un 3e plan d'aide de 86 milliards € sur 3 ans - après ceux de 2010 et 2012 –, en échange de réformes structurelles et de nouvelles mesures d'austérité : hausse de la TVA, baisse du minimum retraite de 450 à 382 € mensuels (celui-ci ne pourra être perçu qu'à partir de 67 ans), libéralisation de plusieurs marchés et création d'ici à mars 2016 d'un fonds de privatisation contrôlé par les créanciers internationaux pour dégager 50 milliards € de recettes. Alexis Tsipras doit maintenant respecter ses engagements et mettre en application les réformes promises.

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