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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Le Parti républicain, dirigé par le Premier ministre Andranik Marguarian et favorable au Président de la République Robert Kotcharian (réélu à la tête de l'Etat le 5 mars dernier après une élection présidentielle contestée par l'opposition), sort vainqueur des élections législatives qui se sont déroulées en Arménie le 25 mai dernier.
Selon des résultats encore provisoires, la formation recueille 22,5% des suffrages, devançant la principale formation d'opposition, le Bloc Justice, dirigé par le candidat malheureux à l'élection présidentielle, Stepan Demirtchian (Parti populaire), qui obtient 13% des voix. A l'issue de ces élections, le Président Kotcharian perd sa majorité au Parlement ; il pourrait néanmoins conclure une alliance avec les petites formations centristes, Dashnaktsutun et Orinats Erkir (le Pays de la loi), comme il l'avait évoqué avant les élections.
Quatre autres partis seront également représentés au Parlement. Il s'agit de Orinats Erkir, qui recueille 11,8% des suffrages, la formation pro-gouvernementale Dashnaktsutun, 10,9% des voix, le Parti de l'Unité nationale, dirigé par Artaches Guegamian, candidat à la dernière élection présidentielle, 8,4% et le Parti des travailleurs unis qui avec 5,5% des suffrages dépasse tout juste la barre des 5% indispensables pour obtenir des députés.
Dix-sept formations politiques et quatre listes d'union avaient été enregistrées pour ces élections législatives afin de pourvoir cent trente et un sièges de députés, soixante-quinze selon le scrutin proportionnel à l'échelle nationale et cinquante-six au scrutin majoritaire à un tour à l'échelle locale. Le taux de participation a été faible, s'élevant à 52%, témoignant du peu de foi de la population dans la capacité du pouvoir d'organiser des élections véritablement démocratiques. Depuis le dernier scrutin présidentiel (19 février-5 mars 2003), les formations de l'opposition n'ont cessé de contester l'élection de Robert Kotcharian à la tête du pays, allant jusqu'à menacer de boycotter les élections législatives. « Il serait naïf de penser que ce régime peut s'en sortir sans fraude et va organiser des élections équitables. C'est le même régime, avec les mêmes méthodes, et ils feront tout pour obtenir un Parlement obéissant » déclarait Stepan Demirtchian quelques jours avant les élections législatives.
Le 25 mai dernier, les Arméniens se prononçaient également par référendum sur une réforme constitutionnelle, contestée par les formations d'opposition, visant à rééquilibrer les pouvoirs du Parlement face aux pouvoirs présidentiels (autorisant par exemple les députés à proposer leur propre candidat au poste de Premier ministre) et à accepter la double nationalité. Ce dernier point, espèrent les autorités, incitera les Arméniens vivant à l'étranger à investir dans leur pays d'origine. Les résultats du référendum ne sont pas encore connus à ce jour.
Une fois de plus, les élections législatives ont donc été marquées par de nombreuses fraudes constatées par les observateurs internationaux présents à l'occasion du scrutin. « Les législatives arméniennes restent en deçà des normes internationales » a ainsi déclaré Robert L. Barry, émissaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Arménie, dénonçant « les cas de falsification des résultats, de bourrage des urnes, de vol de bulletins de vote et d'intimidation d'observateurs internationaux ». Les élections ont également été ternies par une fusillade qui a fait un mort à proximité d'un bureau de vote de Chaumian, dans le sud du pays. Un représentant de la principale formation d'opposition, le Bloc Justice, a été blessé ainsi que le chef de la commission électorale locale. La police a toutefois déclaré qu'il n'était pas certain que l'incident soit lié aux élections législatives.
« Il faut tout faire pour empêcher les violations », avait déclaré le Président Robert Kotcharian à la veille du scrutin, ajoutant « Bien entendu, nous ne pouvons tout contrôler mais nous faisons ce que nous pouvons ». Le pays s'était doté de trois mille quatre cents urnes transparentes pour se protéger de la fraude. « Ces urnes seront scellées et resteront dans le bureau de vote jusqu'à la fin du scrutin » avait précisé Elaine Conkievich, chef de la mission de l'OSCE. Une mesure qui n'a pas eu les effets attendus puisque des fraudes ont été tout de même signalées dans 30% des bureaux de vote. Le vote des « âmes mortes », des personnes décédées, a également été dénoncé. Enfin, toutes les listes électorales n'ont pas fait l'objet d'une mise à jour récente, ce qui a pu permettre à certaines personnes peu scrupuleuses de faire voter les émigrés. Selon l'Office international des migrations, près du tiers de la population arménienne vit à l'étranger, un grand nombre d'entre eux ayant quitté le pays pour échapper à la pauvreté et à la guerre contre l'Azerbaïdjan. La majorité de ces émigrés peuvent voter dans les ambassades arméniennes des pays où ils résident mais peu utilisent réellement cette possibilité. Ainsi, lors de la dernière élection présidentielle, seules quelques centaines de personnes ont voté à Moscou.
Ces élections législatives auront donc failli dans leur principale mission qui était d'établir la légitimité de l'autorité du Président Robert Kotcharian, élu le 5 mars dernier à l'issue d'un scrutin dont la validité est à ce jour toujours largement contestée par les formations de l'opposition. « L'image de l'Arménie sera sérieusement ternie et sa stabilité politique interne sera affaiblie si ces élections sont entachées de graves irrégularités » déclarait quelques jours avant le scrutin l'ambassadeur des Etats-Unis en Arménie John Ordway. Les Etats-Unis, où vivent six millions de personnes d'origine arménienne, ont, comme l'Union européenne, suivi de près le déroulement de ces élections législatives. La construction d'un oléoduc, financé en grande partie par Washington, va en effet faire prochainement de l'Arménie une zone stratégique pour le transport du pétrole de la mer Caspienne vers les marchés mondiaux.
Les formations d'opposition renforcent donc leurs positions au Parlement. Les projets de loi seront donc probablement l'objet de discussions houleuses, sans que toutefois, aucun de ces partis ne puisse empêcher légalement le Président Kotcharian d'appliquer son programme politique.
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