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Branko Crvenkovski est Élu Président de la République

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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14 avril 2004
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Branko Crvenkovski (Union social-démocrate de Macédoine, SDSM) a remporté le deuxième tour de l'élection présidentielle de Macédoine du 28 avril 2004, recueillant 62,66% des suffrages, contre 37,34% à son rival Sasko Kedev (Parti démocratique pour l'unité nationale, VMRO-DPMNE). La participation, qui devait obligatoirement atteindre plus de 50% des électeurs inscrits pour que cette élection soit déclarée valide, s'est élevée à 53,39% selon les résultats rendus publics par Stevo Pendarovski, président de la Commission électorale.

Le candidat du Parti démocratique pour l'unité nationale (VMRO-DPMNE) a, dès l'annonce des résultats, remis en cause le chiffre de la participation, considérant que cette élection présidentielle représentait « la plus grande violation de la démocratie et la plus grande fraude de l'histoire de la Macédoine souveraine et indépendante ». Sasko Kedev a également affirmé sa volonté de déposer une plainte auprès de la Commission électorale, ce qu'il ne peut faire que durant les quarante-huit heures suivant l'élection, et de demander l'annulation du scrutin. « Nous présenterons des preuves solides sur la fraude électorale, le jeu n'est pas terminé, nous ne reconnaîtrons pas le président autoproclamé de Macédoine » a déclaré Sasko Kedev, ajoutant « Branco Crvenkovski ne sera jamais reconnu comme Président et n'aura pas de légitimité ». Le VMRO-DPMNE a adressé une lettre aux représentants de l'OSCE, de l'Union européenne ainsi qu'aux ambassadeurs de la Russie et de différents pays occidentaux pour dénoncer les irrégularités. Selon ce parti, la participation aurait atteint 44%, soit un chiffre inférieur au minimum requis par la loi électorale pour valider le scrutin.

Le deuxième tour de l'élection présidentielle a été suivi par deux cent quarante observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et quatre mille observateurs locaux. Selon Carlos Pais, chef de la mission d'observation de l'OSCE, le scrutin a été entaché d'irrégularités sérieuses mais néanmoins « localisées » dans un petit nombre de bureaux de vote. « Les problèmes identifiés ont été plus vastes que lors du premier tour, portant sur le vote en groupe et par procuration jusqu'au bourrage des urnes », a t-il déclaré.

La Commission européenne a salué l'élection du nouveau Président Branko Crvenkovski. Le Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, Javier Solana, s'est félicité du « déroulement réussi de l'élection » dans lequel il a vu « un exemple de maturité et de responsabilité » du peuple macédonien. « C'est une victoire pour les dirigeants engagés dans la mise en oeuvre des accords d'Ohrid et un vote en faveur de l'Europe. C'est aussi un signal positif pour la région. Le peuple a parlé: il n'y a plus de doute aujourd'hui que Skopje est la capitale d'un Etat multiethnique et démocratique qui fonctionne », a-t-il affirmé, concluant « Nous continuerons à aider le pays dans sa route vers l'Union européenne ».

Branko Crvenkoski, jusqu'alors Premier ministre, succède donc à la Présidence de la République à Boris Trajkovski, tragiquement disparu dans un accident d'avion le 26 février dernier. Ingénieur de formation âgé de 41 ans, le leader de l'Alliance social-démocrate a déjà derrière lui une longue expérience politique. Nommé Premier ministre en 1992 alors qu'il n'avait que vingt-neuf ans, il était évincé du pouvoir six ans plus tard lors des élections législatives de 1998, sa formation faisant alors l'objet d'une accusation de corruption. Il reprend la tête du gouvernement en septembre 2002 à l'issue d'élections législatives organisées après la signature d'un accord de paix qui a mis un terme à sept mois d'affrontements entre les forces gouvernementales et la guérilla albanaise.

Pour cette élection présidentielle, Branko Crvenkovski a fait campagne sur l'intégration de son pays à l'Union européenne et à l'OTAN ainsi que sur l'instauration de bonnes relations entre les communautés macédonienne et albanaise. L'Union démocratique pour l'intégration (PDI), formation albanophone membre de la coalition gouvernementale, avait appelé à voter en faveur du Premier ministre. Le Parti démocratique albanais (PDA), autre parti albanophone, n'avait en revanche pas donné de consigne de vote à ses électeurs, n'appelant pas cependant à un boycott du scrutin. De son côté, le Mouvement des Turcs avait décidé de soutenir la candidature de Sasko Kedev.

« La Macédoine a passé un nouveau test de démocratie. Il n'y a aujourd'hui ni vainqueur ni vaincu. Les seuls perdants sont ceux qui ont appelé au boycottage du scrutin. La Macédoine a montré qu'elle ne retournerait pas en arrière et que son avenir était résolument en Europe» a déclaré le nouveau Président, ajoutant qu'il souhaitait être le Président de tous les Macédoniens.

Si le pays est aujourd'hui pacifié, le conflit de 2001 entre Macédoniens et Albanais a laissé de nombreuses marques sur l'économie du pays. L'insuffisance de capitaux et d'investissements directs étrangers affecte évidemment la situation économique générale de la Macédoine. Ces derniers mois, Branko Crvenkovski est parvenu à regagner la confiance des organisations financières internationales et son gouvernement a beaucoup travaillé à assainir le budget de l'Etat et à maîtriser l'endettement extérieur du pays. Cependant, les effets de cette politique sont peu visibles aux yeux de la population qui reste très touchée par le chômage (35% de la population active est sans emploi) et la pauvreté (600 000 Macédoniens vivent sous le seuil de pauvreté).

Le nouveau Président souhaite que la Macédoine poursuive ses efforts sur la voie qu'il a lui-même tracée. « Soyons logique jusqu'au bout, ces investissements ne viendront pas si nous n'avons pas su recréer une stabilité politique et interethnique et si nous n'avons pas pu rétablir de communications saines avec la communauté internationale, l'Europe ainsi qu'avec nos voisins. Aucun investisseur ne voudra investir son argent dans un pays ayant un avenir incertain. Heureusement, en ce moment, l'avenir de Macédoine est de plus en plus serein et certain. Grâce à notre politique, aujourd'hui la Macédoine représente un partenaire sûr et le pays va de ce fait attirer plus d'investissements et ainsi créer de nouveaux emplois » a déclaré durant sa campagne électorale Branko Crvenkovski.

Entre les deux tours du scrutin, le candidat du VMRO-DPMNE avait mis en garde la population du fait qu'avec l'élection de Branko Crvenkovski, le SDSM concentrerait l'ensemble des pouvoirs (Présidence et gouvernement) entre ses mains. Si Sasko Kedev, inconnu du grand public avant cette élection, peut se targuer d'avoir réalisé un résultat respectable lors de cette élection présidentielle, il reste qu'en dépit des difficultés actuelles que traverse le gouvernement, le Parti démocratique pour l'unité nationale VMRO-DPMNE, principale formation d'opposition, ne semble pas actuellement en mesure d'incarner une véritable alternative à la politique menée par l'Union social-démocrate de Macédoine.

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