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Sans surprise, Stjepan Mesic est réelu président de la Croatie

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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2 janvier 2005
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Comme attendu, Stjepan Mesic a été réélu pour cinq ans Président de la République croate le 16 janvier dernier lors du second tour de l'élection présidentielle. Le président sortant a fait mieux que ce que les enquêtes d'opinion lui prédisaient en recueillant 66% des suffrages, contre 33% à sa rivale Jadranska Kosor (Communauté démocratique, HDZ) qui a amélioré de treize points son résultat du premier tour du 2 janvier dernier.

La participation, qui s'est élevée à 51,13%, a été équivalente à celle enregistrée lors du premier tour.

Les Croates ont visiblement entendu leur Président qui, durant toute la campagne électorale, leur a conseillé de « ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier ». « Tous les pouvoirs entre les mains d'un même parti, cela signifie un retour en arrière et ne va pas rapprocher la Croatie des critères européens » avait averti Stjepan Mesic. « Je suis fier de la maturité de la démocratie croate qui a été reconnue par l'Europe et par le monde entier » a déclaré le nouveau Président après sa victoire. Très populaire auprès de ses concitoyens, fidèle et valeureux défenseur des valeurs démocratiques, Stjepan Mesic a beaucoup œuvré pour briser l'isolement international dans lequel son prédécesseur, l'autoritaire Franjo Tudjman, avait plongé la Croatie. Il s'est ainsi rendu en Israël en octobre 2001 pour ouvrir un nouveau chapitre de l'histoire entre les deux Etats dont les relations étaient très tendues à cause du refus de Franjo Tudjman de reconnaître le rôle de la Croatie dans l'extermination de milliers de Juifs durant la Deuxième Guerre mondiale.

Agé de soixante-dix ans et juriste de formation, Stjepan Mesic, qui a été le dernier Président de la Fédération yougoslave aujourd'hui démantelée, a commencé sa carrière politique dans les années soixante en siégeant au Parlement de Croatie. En 1971, il participe au « printemps croate », mouvement de protestation durant lequel les Croates s'élèvent contre la mainmise des Serbes sur l'ensemble des centres de pouvoir au sein de l'ex-Yougoslavie. Son engagement vaut à Stjepan Mesic d'être condamné à un an de prison et d'être exclu à vie de la politique. En 1990, il devient le secrétaire de la Communauté démocratique (HDZ) dirigé par le nationaliste Franjo Tudjman. Il quitte la formation en 1994 à la suite de désaccords profonds avec son leader. Stjepan Mesic dénonce les privatisations frauduleuses et l'implication de la Croatie dans la guerre de Bosnie-Herzégovine (1992-1995). Le 7 février 2000, il succède à la tête de l'Etat à Franjo Tudjman qui a dirigé la Croatie de son indépendance en 1991 jusqu'à sa mort en décembre 1999. Rappelons qu'en 2003, Stjepan Mesic s'était rangé aux côtés de la France et de l'Allemagne pour s'opposer à l'intervention militaire anglo-américaine en Irak. Suivant les recommandations de l'Union européenne, il a également refusé de signer avec les Etats-Unis un accord visant à accorder l'immunité aux Américains inculpés par la Cour pénale internationale (CPI).

Avec 33% des suffrages, la ministre des Affaires sociales obtient un résultat très proche de celui réalisé par sa formation lors des dernières élections législatives du 23 novembre 2003 (33,9%). « Ce résultat confirme l'unité de notre formation ainsi que le fait qu'elle est le premier parti de Croatie » a souligné le chef du gouvernement Ivo Sanader à l'issue des résultats. « Nous avons dû affronter un candidat qui avait l'avantage d'être déjà Président et qui est sans aucun doute populaire en Croatie. Jadranska Kosor a démontré cependant qu'elle était à la hauteur du défi que constituait cette élection » a ajouté le chef du gouvernement. « Président Mesic, je vous félicite » a déclaré la candidate malheureuse en reconnaissant sa défaite.

Le 17 mars prochain, l'Union européenne doit engager des négociations d'adhésion officielles avec la Croatie. Celles-ci comprendront cependant des critères contraignants, dont la coopération pleine et entière de Zagreb avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye (TPI), le retour des dizaines de milliers de réfugiés serbes ayant fui le pays lors de la guerre serbo-croate de 1991 à 1995 et enfin l'arrestation et le transfert à La Haye du général Ante Gotovina, en fuite depuis son inculpation par le TPI en 2001. L'officier croate est recherché pour son rôle dans le massacre d'au moins cent cinquante Serbes de Croatie à la fin de la guerre serbo-croate. « La Croatie est le dernier pays où Ante Gotovina pourrait essayer de se cacher, car ici, tout le monde est intéressé à sa capture » a toujours déclaré Stjepan Mesic qui affirme que son pays devrait apporter d'ici le mois de mars les preuves que le général en fuite se ne se trouve pas en Croatie. « Nous devons convaincre que nous faisons tout pour localiser la résidence d'Ante Gotovina, nos services doivent faire de leur mieux et l'Union européenne et le Tribunal pénal international vont finir par nous faire confiance » a souligné le nouveau Président.

« Je fais confiance au gouvernement de Croatie pour qu'il continue de fournir des efforts soutenus en vue d'établir une coopération entière avec le TPI » a déclaré le Commissaire européen à l'Elargissement, Olli Rehn, à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre, Ivo Sanader. « Si ce n'est pas le cas, nous ne serons pas à même alors d'entamer les négociations d'adhésion le 17 mars prochain, ce qui constituerait une énorme déception pour tout le monde » a t-il ajouté. Une évaluation de la coopération de Zagreb devrait avoir lieu dans quelques semaines.

« Aujourd'hui, on se dirige à grands pas vers l'Europe. Nous devons faire preuve d'unité et de consensus national afin de remplir nos objectifs » a déclaré Stjepan Mesic à l'annonce des résultats. « Puisque je suis celui qui a ouvert la Croatie au monde, je pense être en mesure de faire davantage pour poursuivre sur la même voie. Vers la fin de mon nouveau mandat, la Croatie sera certainement reconnue en tant que membre de l'Union européenne » a ajouté le nouveau Président de la République qui estime que son pays pourrait rejoindre les Vingt-cinq d'ici 2008. La Croatie deviendrait alors la deuxième des Républiques de l'ex-Yougoslavie à intégrer l'Union européenne.

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