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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Le 25 juin prochain, les Bulgares sont appelés à élire leur quarantième Parlement. Vingt-deux formations ou coalitions politiques participeront à ce scrutin législatif. Les quatre principales sont le Mouvement national Siméon II (NDS II), parti de l'actuel Premier ministre, Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha, le Parti socialiste (BSP), principale force d'opposition, les Forces démocratiques unies (ODS), formation située à droite sur l'échiquier politique, et le Mouvement pour les droits et les libertés (DPS), parti membre de l'actuelle coalition gouvernementale et représentant la minorité turque du pays (environ 8% des Bulgares).
L'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne est un thème central de la campagne électorale. Le Président de la république, Gueorgui Parvanov, a tenu à rappeler le 10 juin dernier que celle-ci devait constituer la priorité du prochain gouvernement. Le Mouvement national Siméon II laisse entendre que les autorités de Bruxelles pourraient rejeter un gouvernement dirigé par le Parti socialiste, dont vingt-sept têtes de listes sont d'anciens ministres de l'ancien Premier ministre (décembre 1994-février 1997) Jan Videnov (celui-ci fut contraint à la démission à la suite d'une importante crise politico-économique et des violentes manifestations de janvier 1997). Le vice-président du Parti socialiste, Roumen Ovtcharov, réfute cet argument rappelant que l'ancien ministre des Finances du gouvernement de Jan Videnov, Dimitar Kostov, a été nommé sous-directeur de la Banque centrale par le gouvernement de Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha, qui a donc reconnu ses qualités. « En huit ans, nous nous sommes réformés, nous avons réformé le parti et nous promettons de réformer la Bulgarie pour la rendre un membre digne de l'Union européenne » a-t-il déclaré.
Le ministre des Affaires étrangères Solomon Passi a également argué du fait qu'une victoire du Parti socialiste compromettrait l'entrée de la Bulgarie dans l'Union européenne. « La vérité est que le BSP est une formation incapable de mener à terme le processus de négociations, ce qui provoquera l'application de la clause de sauvegarde (les Vingt-cinq se sont réservés par une clause de sauvegarde la possibilité de retarder l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie d'un an dans le cas où les engagements pris par ces deux Etats n'auraient pas été tenus) » a-t-il affirmé. Le président du Parti socialiste, Serguei Stanichev, a demandé au Premier ministre, Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha, de se démarquer des propos de son ministre des Affaires étrangères. « L'adhésion à l'Union européenne est une priorité nationale que personne ne doit exploiter à des fins politiques » a déclaré le leader de la principale formation d'opposition. Lidia Chouleva, directrice de la campagne du Mouvement national Siméon II, a invité l'ensemble des formations de droite à se rassembler pour empêcher une victoire du Parti socialiste qui, selon elle, « cache un risque pour le pays et pourrait ralentir l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne ». Selon une enquête d'opinion réalisée parmi les sympathisants socialistes par l'institut pour la recherche européenne de l'université libre de Bruxelles et publiée le 14 juin dernier, neuf personnes interrogées sur dix (89,6%) soutiennent l'adhésion de leur pays à l'Union. Selon ce sondage, les trois quarts des proches du Parti socialiste soutiennent l'idée d'une alliance gouvernementale du BSP avec le Mouvement national Siméon II comme avec le Mouvement pour les droits et les libertés. Ce dernier a d'ailleurs annoncé sa volonté de participer au prochain gouvernement et déclaré qu'il « gardait les portes ouvertes pour trouver la coalition la plus apte à gouverner » selon les mots de son vice-président, Lutvi Mestan. « Une formation qui détermine ses choix à l'avance ne connaît rien à la politique » a affirmé le président du parti Ahmed Dogan. Ce dernier est, comme la loi électorale le lui permet, tête de liste dans deux circonscriptions, Kardjali et Bourgas. Le Mouvement pour les droits et les libertés compte environ un tiers de nouvelles personnalités parmi ses listes de candidats.
Le NDS II insiste sur la notoriété internationale de son leader et actuel Premier ministre Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha tout en mettant en doute la capacité de Serguei Stanichev d'assumer les responsabilités de Premier ministre. Enfin, le Mouvement national Siméon II insiste sur le fait que la Bulgarie, qui a encore beaucoup à faire pour achever sa transition économique et sociale et remplir les conditions pour entrer dans l'Union européenne, n'est pas prête pour la politique de redistribution que veut mettre en place le Parti socialiste. Une enquête d'opinion, réalisée par l'institut Euréka début juin, montre que les sympathisants des formations de droite sont plus conscients que les proches des partis de gauche du fait que l'adhésion à l'Union européenne exige encore de nombreux sacrifices et qu'elle ne passera pas sans de nouvelles embûches. Ils sont également plus prêts à soutenir des formations qui leur prouvent qu'elles connaissent ces obstacles et leur montrent la façon de les dépasser que des partis qui leur font des promesses sans expliquer comment ils les financeront.
Le 15 juin dernier, la Cour suprême administrative a autorisé l'organisation de la grande loterie prévue par le gouvernement pour encourager la participation aux élections législatives. La Cour a rejeté les requêtes de Nadejda Mihaïlova, leader de l'Union des forces démocratiques, Serguei Stanichev, président du Parti socialiste, Ivan Kostov, leader du Parti des démocrates pour une Bulgarie forte, et Ivan Tatartchev du Mouvement pour l'unité nationale et la justice sociale. Le Président de la République, Gueorgui Parvanov, s'est déclaré opposé à cette tombola. « Au lieu de gaspiller de l'argent pour une tombola, il faudrait financer l'achat de médicaments » a-t-il souligné. De son côté, le Parti socialiste accuse le gouvernement d'essayer d'empêcher par ce moyen son parti, dont l'électorat est traditionnellement le plus mobilisé, d'obtenir la majorité absolue le 25 juin prochain.
Le grand prix de la loterie sera une voiture. L'organisation de cette tombola a été confiée aux entreprises Globul et BTK. La compagnie Mobiltel a renoncé à s'impliquer, en raison de la polémique suscitée par cette initiative. Outre cette tombola, le gouvernement a affecté cinq cent mille leva (environ deux cent cinquante mille euro) à la diffusion de six clips publicitaires destinés à inciter les électeurs à se rendre aux urnes le 25 juin prochain.
Les résidents bulgares de soixante-douze pays seront appelés aux urnes pour ces élections législatives. Trois cent dix-neuf bureaux de vote seront installés, soit plus de deux fois plus que lors du précédent scrutin du 17 juin 2001. Selon la loi électorale, un bureau de vote doit obligatoirement être ouvert dans les pays où la Bulgarie ne possède pas de représentation diplomatique permanente dès lors qu'au moins vingt citoyens bulgares expriment leur volonté de voter. Deux cent neuf fonctionnaires seront envoyés en renfort dans les bureaux de vote de l'étranger. Le nombre de Bulgares résidant à l'étranger s'est considérablement accru ces dernières années, s'établissant à environ un million et demi. Les résidents bulgares de Turquie sont traditionnellement les plus participatifs aux élections législatives : soixante deux mille six cent trente personnes se sont inscrites sur les listes électorales pour le scrutin du 25 juin prochain (ils étaient quarante mille votants le 17 juin 2001). Les formations politiques qui enverront des représentants suivre le vote à l'étranger devront désormais en assumer les frais.
Les enquêtes d'opinion accordent la victoire au Parti socialiste sans toutefois créditer cette formation de la majorité absolue. Selon le sondage réalisé par l'institut Alpha research et publié le 7 juin dernier, le Parti socialiste recueillerait 40% des intentions de vote, contre 21,3% au Mouvement national Siméon II. L'Union des forces démocratiques obtiendrait 10,8% des suffrages et le Mouvement pour les droits et les libertés, 7,6%. Une telle répartition des voix donnerait cent huit sièges au BSP, cinquante-six au MNS II, vingt-neuf à l'ODS et vingt au DPS. Deux autres formations, l'Union populaire bulgare et le Parti des démocrates pour une Bulgarie forte, dirigé par l'ancien Premier ministre Ivan Kostov, pourraient franchir la barre des 4% de suffrages indispensable pour être représenté à l'Assemblée nationale, Chambre unique du parlement. « Si ces deux partis échouent à entrer au Parlement, le Parti socialiste aurait alors de fortes chances d'obtenir la majorité absolue » affirme la présidente de l'institut Alpha research, Boriana Dimitrova.
Une autre enquête d'opinion réalisée par l'institut Gallup et publiée le 8 juin accorde 42,6% des voix au Parti socialiste bulgare, contre 22,7% au Mouvement national Siméon II. L'Union des forces démocratiques recueillerait 11,2% et le Mouvement pour les droits et les libertés, 7,3%. Cependant, ces résultats sont antérieurs à la déclaration de Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha de refuser de participer à une coalition gouvernementale avec le Parti socialiste. Les propos du Premier ministre ont quelque peu « brouillé les cartes » aux dires de nombreux analystes politiques. Aux débuts de la campagne électorale, le Mouvement national Siméon II avait laissé entendre qu'une alliance MNS II-BSP était possible. La déclaration du Premier ministre a cependant réjoui la formation de droite, l'Union des forces démocratiques. « Les propos de Siméon II sont encourageants, a déclaré sa présidente, l'ancienne ministre des Affaires étrangères, Nadejda Mihaïlova, ils reviennent à dire que chaque voix en faveur de l'ODS va dans le sens de la formation d'un gouvernement de centre-droit ». Selon le sociologue Kantcho Stoïchev, le Mouvement national Siméon II « s'est enlisé dans le marécage de la droite (...) Pour la première fois, un parti en fin de course avait réussi à remonter dans les enquêtes d'opinion jusqu'à pouvoir prétendre à un second mandat. Mais cette tendance positive a été rompue. Nous assistons désormais au rétablissement du système bipolaire et les gens de tendance centriste se demandent pour qui voter. Cette attitude du MNS II ne pourra en aucun cas attirer l'électorat de droite mais se retournera contre lui. Le parti de Siméon II est en train de perdre la plus belle perle de sa couronne, le centrisme ».
Le Premier ministre Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha, le « tsar » comme l'appellent les Bulgares, a-t-il d'ores et déjà perdu toute chance de rester au pouvoir et de participer au gouvernement qui fera entrer son pays dans l'Union européenne en refusant au préalable toute alliance avec le Parti socialiste ? Réponse des électeurs le 25 juin prochain.
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