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Victoire des forces de gauche au pouvoir au deuxième tour des élections législatives hongroises

Actualité

Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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25 avril 2006
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Deloy Corinne

Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Robert Schuman Fondation

Fondation Robert Schuman

Deux semaines après leur victoire au premier tour, les forces de gauche au pouvoir ont remporté, le 23 avril, le deuxième tour des élections législatives en Hongrie, les cinquièmes depuis la chute du communisme en 1989 et les premières depuis l'adhésion du pays à l'Union européenne le 1er mai 2004. Le Parti socialiste (MSZP), emmené par l'actuel Premier ministre Ferenc Gyurcsany, recueille 48,19% des suffrages et obtient 192 sièges. Son allié au gouvernement, l'Alliance des démocrates libres (SZDSZ), formation dirigée par Gabor Kuncze, obtient 4,66% des voix et 18 sièges. Enfin, l'alliance des deux formations de la majorité Parti socialiste -Alliance des démocrates libres (MSZP-SZDSZ) remporte 6 sièges. L'Alliance des jeunes démocrates-Union civique (FIDESZ-MPP) est donc devancée ; la formation de l'ancien Premier ministre (1998-2002) Viktor Orban recueille 42,49% des suffrages et 164 sièges. Le Forum démocratique (MDF), ancien allié de l'Alliance des jeunes démocrates, obtient 2,85% des voix et 11 sièges. Un candidat indépendant a été élu lors de ce deuxième tour.

La participation a été légèrement inférieure à celle enregistrée lors du premier tour, s'élevant à 64,36%, soit 3,47 points de moins que le 9 avril dernier. Elle est néanmoins supérieure à celle attendue par les enquêtes d'opinion et, comme le prévoyaient les analystes politiques, a été favorable au Parti socialiste.

Ferenc Gyurcsany, qui devient le premier Chef du gouvernement à être reconduit à son poste, remporte donc une victoire personnelle. Le Premier ministre, qui avait succédé à Peter Medgyessy le 25 août 2004, a su conduire à la victoire une formation sociale-démocrate pourtant impopulaire et vieillissante il y a encore deux ans, un parti défait aux élections européennes du 13 juin 2004 et largement dominé dans toutes les enquêtes d'opinion par son principal adversaire, l'Alliance des jeunes démocrates-Union civique jusqu'à quelques semaines avant le scrutin.

Ancien consultant financier puis fondateur de la société Altus, le Premier ministre, né il y a quarante-quatre ans à Papa (ville située à l'Ouest de la Hongrie), fait partie des cent hommes les plus riches de Hongrie. Il est un adepte fervent de l'économie de marché mais également un défenseur du droit des salariés à une réelle protection sociale. Adhérent du Parti socialiste depuis l'année 2000, il était devenu trois ans plus tard ministre de la Jeunesse et des Sports dans le gouvernement de Peter Medgyessy avant de remplacer ce dernier à la tête du gouvernement en août 2004.

« Nous avons gagné ! Je remercie ceux qui ont dit que la coalition devait continuer, avec même plus de courage et plus d'influence, tout ce qu'elle a commencé. Nous mesurons la responsabilité qui nous est confiée. Nous devons créer une meilleure Hongrie, qui réussit mieux et où l'on vit mieux. Le parti a gagné, mais c'est le pays entier qui doit gagner à l'avenir, un pays où chacun pourra être fier. Ce que nous avons gagné, ce n'est pas le pouvoir, c'est la responsabilité et le travail » s'est exclamé le Premier ministre devant ses partisans.

« L'essentiel est de rendre le pays fort et compétitif, de protéger la vie quotidienne des gens dans une Europe commune » avait t-il souligné alors qu'il se rendait voter en famille. Durant toute la campagne électorale, Ferenc Gyurcsany s'est voulu rassurant, mettant en garde conter « l'idéologie qui divise » et affirmant que son principal objectif serait d'apporter paix et sécurité à ses concitoyens à tout moment de leur vie tout en améliorant la compétitivité du pays. « Je voudrais créer plus d'union que nous n'en avions » a-t-il déclaré. Dimanche soir, citant le Président américain John Fitzgerald Kennedy, il a souligné que « l'important n'est pas de savoir ce que la Hongrie peut faire pour vous mais ce que nous pouvons donner à la nation ».

« La coalition gouvernementale est en tête, il faudra un véritable miracle pour que la situation soit renversée » déclarait le politologue Miklos Tamas Gaspar à l'issue du premier tour des élections législatives le 9 avril dernier. Viktor Orban savait que seul un miracle pouvait lui permettre de sortir victorieux de ce scrutin. Pour ce faire, il lui fallait en effet remporter au moins 75 des 110 mandats en jeu lors du deuxième tour, un pari quasi-impossible.

L'ancien Premier ministre n'aura cependant pas ménagé ses forces pour tenter de retourner la situation, faisant campagne jusqu'à la dernière minute du temps autorisé par la loi électorale au point de se voir adresser une mise en garde de la Commission électorale nationale. Il avait également renoncé à redevenir chef du gouvernement en cas de victoire, proposant de laisser la tête du gouvernement à un membre du Forum démocratique, une proposition refusée par la présidente du Forum démocratique, formation auparavant alliée à l'Alliance des jeunes démocrates-Union civique, Ibolya David. Celle-ci, critiquant les « positions politiques populistes et démagogiques » de Viktor Orban avait affirmé qu'elle ne ferait rien pour l'aider à retrouver le pouvoir.

Dimanche soir, le président de l'Alliance des jeunes démocrates-Union civique a reconnu sa défaite et téléphoné à Ferenc Gyurcsany pour le féliciter de sa victoire. « Nous connaissons tous les résultats finaux, il va de soi que la courtoisie nous dicte de féliciter nos adversaires » a déclaré Viktor Orban. « Ceux qui unissent leurs forces gagnent, les perdants sont ceux qui ne sont pas capables de coopérer » a t-il ajouté, faisant reposer la responsabilité de la défaite sur le Forum démocratique. Après avoir, à l'issue du premier tour, manifesté le désir de quitter la tête de sa formation en cas d'échec aux élections législatives, Viktor Orban a de nouveau fait part lundi matin de son intention de cesser de diriger l'Alliance des jeunes démocrates-Union civique. « Tout le monde propose de démissionner, le président et les vice-présidents du parti. Il reviendra au congrès national de prendre une décision » a-t-il déclaré, ajoutant qu'il prenait « la pleine responsabilité pour toutes les erreurs de la campagne ».

Après le temps des promesses électorales, voici donc venu celui du retour à la réalité et, très probablement après quatre années de dépenses excessives, celui des douloureuses réformes économiques. Le Premier ministre Ferenc Gyurcsany a promis que les premiers cent jours de son nouveau gouvernement seront consacrés à la mise en place d'une réforme de l'Etat.

Avec son gigantesque déficit budgétaire, un taux de chômage en progression et des secteurs comme celui de la santé et de l'éducation ayant grand besoin de réformes, le prochain gouvernement aura la douloureuse tâche de mettre en oeuvre les réformes nécessaires pour redresser les finances publiques et préparer le pays à l'adoption de la monnaie unique européenne. Le pays doit en effet absolument parvenir à un déficit budgétaire inférieur à 3% en 2008 s'il souhaite pouvoir adopter l'euro en 2010. Premier rendez-vous du futur gouvernement : septembre prochain où les autorités hongroises devront présenter leur plan d'assainissement des comptes publics devant la Commission européenne.

« Le gouvernement disposera d'une base beaucoup plus solide qu'après 2002 pour gouverner » a souligné le politologue de l'Académie des sciences, Laszlo Keri. Le Premier ministre Ferenc Gyurcsany en aura bien besoin pour mener à bien la politique de rigueur, qu'en dépit des promesses électorales qui leur ont été faites attendent tous les Hongrois, et qui seule pourra éviter au pays une crise financière.

Résultats du deuxième tour des élections législatives du 23 avril 2006 en hongrie

Participation : 64,36%

Source : commission électorale hongroise

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