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Monténégro : victoire programmée de la coalition au pouvoir ?

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Corinne Deloy,  

Fondation Robert Schuman

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17 septembre 2012
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

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Monténégro : victoire programmée de la coalition au pouvoir ?

PDF | 164 koEn français

Le 14 octobre prochain, les Monténégrins sont appelés aux urnes pour renouveler les 81 membres du Parlement. Ces élections législatives sont anticipées de 6 mois. Dominant la scène politique nationale depuis près de 20 ans, l'Union démocratique des socialistes (DPS) du Premier ministre Igor Luksic et du président de la République Filip Vujanovic, devrait, selon toute probabilité, s'imposer de nouveau lors du scrutin.

Des élections municipales seront organisées le même jour dans les villes de Niksic, Budva et Kotor.

La situation politique

Les élections législatives sont consécutives à la dissolution du Parlement votée le 26 juillet dernier par 47 voix, contre 27. Les membres du DPS, du Parti social-démocrate (SDP) de Ranko Krivokapic, du Parti bosniaque (BS) dirigé par Rafet Husovic et de l'Union démocratique des Albanais (DUA-UDSh) de Ferhat Dinosa ont voté en faveur de la dissolution. "Nous croyons qu'un parlement et un gouvernement dotés d'un mandat complet de 4 ans permettront de mieux répondre aux défis de la difficile phase d'intégration que nous traversons" a déclaré Milutin Simovic, député (DPS), pour justifier l'organisation d'élections législatives anticipées. Les autorités ont mis en avant leur désir que le gouvernement et le parlement puissent avancer dans le processus d'adhésion à l'Union européenne avec un plein mandat de 4 ans. Le Monténégro est devenu candidat officiel depuis le 17 décembre 2010, 2 ans après avoir déposé sa demande. Les négociations d'adhésion de Podgorica avec l'Union européenne se sont ouvertes le 29 juin dernier.

Le commissaire européen chargé de l'Elargissement, Stefan Füle, a rappelé le 7 septembre dernier à Nebojsa Kaludjerovic, nouveau ministre des Affaires étrangères et de l'Intégration européenne, que Podgorica devait absolument poursuivre ses réformes. "L'ouverture des négociations d'adhésion en juin a été une juste reconnaissance des progrès impressionnants que le Monténégro a réalisés dans le processus de réformes" a déclaré Stefan Füle, ajoutant "La réforme constitutionnelle, le renforcement global de l'indépendance judiciaire et la lutte contre la corruption et le crime organisé sont parmi les questions les plus importantes". "Le Monténégro pourrait devenir le prochain pays à rejoindre l'Union européenne après la Croatie" a déclaré le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.

Les partis d'opposition accusent le gouvernement de précipiter le scrutin pour échapper à l'impopularité que devraient entraîner, selon elles, les mesures économiques d'austérité que le gouvernement sera contraint de prendre dans les prochains mois. "Des moments difficiles s'annoncent et les membres de la coalition gouvernementale en sont parfaitement conscients" a souligné Andrija Mandic, leader de la Nouvelle démocratie serbe (NSD).

"L'opposition ne sait pas si elle pourra se présenter unie aux élections et le gouvernement a peur de vivre un nouvel hiver difficile (les manifestations se sont succédées depuis le début de l'année 2012 au point que l'on a pu parler de "Printemps monténégrin"), c'est pourquoi celui-ci souhaite que le scrutin législatif soit organisé aussi vite que possible" affirme Milan Popovic, professeur de science politique à l'université de Podgorica.

Le système politique

Le Monténégro possède un parlement monocaméral (Skupstina) qui compte 81 députés élus au système proportionnel (selon la méthode d'Hondt) au sein d'une seule circonscription nationale pour 76 sièges et d'une circonscription spéciale pour les 5 sièges réservés aux minorités nationales. Pour ces élections législatives, toutes ces dernières sont autorisées à présenter des listes de candidats spécifiques, une mesure autrefois réservée à la seule communauté albanaise. Chaque liste doit recueillir au moins 3% des suffrages exprimés pour être représentée au Parlement mais ce seuil est plus bas pour les minorités.

L'opposition accuse le DPS de tenter par cette mesure d'obtenir les faveurs des partis représentant les minorités et notamment du Parti bosniaque de Rafet Husovic, membre du gouvernement sortant qui se présentait jusqu'alors en coalition avec le DPS et le SDP.

Les candidatures individuelles sont également acceptées. Chaque candidat doit obtenir le soutien d'au moins 1% des électeurs pour être officiellement enregistré (4 983 précisément).

Actuellement, 11 partis politiques sont représentés au Parlement:

– l'Union démocratique des socialistes (DPS), du Premier ministre sortant Igor Luksic dirigée par l'ancien chef du gouvernement (2003-2010) Milo Djukanovic, alliée au Parti social-démocrate (SDP), au Parti bosniaque (BS) et à l'Initiative citoyenne croate (HI) de Marija Vucinovic. Ensemble, ces 4 partis comptent 48 députés ;

– le Parti populaire socialiste (SNP), parti d'opposition dirigé par Srdjan Milic, possède 16 sièges ;

– la Nouvelle démocratie serbe (NSD), parti d'opposition d'Andrija Mandic, compte 8 députés ;

– le Mouvement pour les changements (GZP), parti d'opposition dirigé par Nebojsa Medojevic, compte 5 députés ;

– l'Union démocratique des Albanais (DUA-UDSh) de Ferhat Dinosa possède 1 siège ;

– Forca, dirigé par Nazif Cungu, compte 1 député ;

– l'Alternative albanaise (AA) de Vesel Sinishtaj possède 1 siège ;

– l'Alliance démocratique du Monténégro (DCG), dirigée par Mehmet Bardhie, compte 1 député.

Source : Commission électorale du Monténégro

La campagne électorale

3 coalitions électorales sont en lice pour le scrutin législatif du 14 octobre prochain. La première unit l'Union démocratique des socialistes au Parti social-démocrate ; la deuxième rassemble sous le nom de Nouveau Front démocratique la Nouvelle démocratie serbe, le Mouvement pour les changements et le Parti des retraités, des invalides et de la justice sociale et la troisième – Srpska sloga – réunit la Liste serbe, le Parti des radicaux serbes, le Parti populaire et le Parti serbe pour la patrie.

Le Nouveau front démocratique est dirigé par l'ancien ministre des Affaires étrangères et ex-ambassadeur de Yougoslavie en Italie, Miodrag Lekic. Janko Vucinic, président du comité principal de l'Union des syndicats libres, et Ognjen Jovovic, représentant des étudiants de Niksic, ont rejoint cette coalition. "Nous voulons contribuer au progrès politique, économique et quotidien du Monténégro" a déclaré Miodrag Lekic qui a indiqué que le parti était ouvert à tous les partis et notamment au Parti populaire socialiste de Srdjan Milic.

Celui-ci a cependant refusé de rejoindre l'alliance. "Nous pensons sérieusement à boycotter les élections législatives" a déclaré le vice-président du parti, Neven Gosovic, il y a quelques semaines. Le Parti populaire socialiste se présentera finalement seul, mais certains de ses membres, comme son ancien président Predrag Bulatovic, ont néanmoins rejoint le Nouveau Front démocratique. "Mon seul opposant est la coalition au pouvoir" affirme Srdjan Milic.

Dans un entretien qu'il a accordé au quotidien Pobjeda, le sociologue Srdjan Vukadinovic a souligné que la campagne électorale était plus dynamique entre les composantes de l'opposition qu'entre l'opposition et les partis au pouvoir.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, la coalition conduite par l'Union démocratique des socialistes (DPS) arriverait largement en tête des prochaines élections législatives du 14 octobre. Elle recueillerait 44% des suffrages. Le Nouveau Front démocratique obtiendrait 17% des voix. L'ensemble des autres partis seraient en dessous de 10%.

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