Démocratie et citoyenneté
Luigi Gianniti
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ENLuigi Gianniti
Directeur du Service des études du Sénat de la République d’Italie
La question de la défense européenne est plus actuelle que jamais en cette année 2024. Les crises et les conflits en cours aux frontières de l’Union européenne posent des défis géostratégiques incontournables, qui ne sont toutefois pas nouveaux. A la question : « La Défense de l’Europe par les Européens : un mythe, une nécessité, une ambition, un espoir ? » le général Jean-Paul Paloméros soulève la nécessité de revenir à la genèse de ce qui a inspiré la création d’une Communauté européenne de Défense (CED) et ce qui a empêché sa réalisation alors. Alors que la candidate à sa propre succession comme présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avance même la possibilité de créer un poste de commissaire à la défense pour la mandature 2024-2029, le précédent des années 1950 mérite toute notre attention. En particulier si l’on se penche sur le projet d’instituer un tel commissaire et encore plus si l’on compte sur la Commission européenne pour favoriser les industries de la défense et faciliter les procédures d'achat.
Dans le manifeste du Parti populaire européen (PPE), au paragraphe intitulé « Notre Europe doit se protéger par elle-même », il n’est pas seulement question d'affirmer que « nous devons renforcer notre base industrielle de défense en investissant davantage », que « nous devons mieux travailler ensemble en utilisant toutes les options disponibles dans les traités de l'Union, y compris la PESCO et ses projets phares », et que « nous devrions également envisager l'établissement d'un budget de défense de l'Union dans le cadre du CFP, doté de ressources suffisantes pour faire face aux défis de demain ». Le groupe propose aussi « Notre objectif à long terme est de développer une véritable Union européenne de la défense avec des forces européennes intégrées dans les domaines terrestre, maritime, cybernétique et aérien. Ces forces devraient compléter les armées nationales, en s'alignant sur le nouveau modèle de forces de l'OTAN, avec une capacité de déploiement rapide d'une force permanente et immédiatement disponible. »
Ceci nous amène à imaginer une initiative aussi ambitieuse que celle qui a abouti à la signature du traité de la CED en 1952. Elle permettrait de franchir le pas que l'Assemblée nationale française a refusé il y a soixante-dix ans. La gravité des problèmes de sécurité et de paix sur notre continent semble devoir nous y conduire.
Pourquoi relire le Traité signé à Paris le 27 mai 1952 ?
Sur le sol européen, une politique d'expansion impériale a de nouveau cours à l'Est. Ceux qui la mènent semblent ne pas comprendre d'autre moyen de résoudre les problèmes que la force et ne pas connaître d'autres limites qu'une autre force capable et déterminée à s'opposer à eux. De l'autre côté de l'Atlantique, on appelle les Européens à prendre leurs responsabilités.
Il convient de se remémorer qu’une demande similaire, dans les années 1950, conditionnait le renforcement des forces américaines stationnées en Europe à l'engagement des Européens de former une armée unifiée sous un commandement unique intégré à l'OTAN et qui accepterait l'incorporation d'unités allemandes en son sein. Désormais, elle est formulée de manière rude et négative par le candidat républicain à la présidence des Etats-Unis mais le résultat nous apparaît comme étant le même. Les Européens doivent penser à garantir leur propre sécurité par eux-mêmes, avant tout en construisant un pilier européen au sein de l'OTAN, capable de fonctionner de manière autonome.
Ce sont les États-Unis qui poussent les Européens, après le déclenchement de la guerre de Corée en 1950 et face à la possibilité d'un conflit sur deux fronts (en Asie et en Europe), à construire une défense plus solide et plus intégrée, dans laquelle l'Allemagne aurait pu être pleinement incluse. Suivant ces demandes, le traité est rédigé, négocié par Jean Monnet, Alcide De Gasperi et Konrad Adenauer. En France, Jean Monnet inspire la déclaration du président du Conseil René Pleven devant l'Assemblée nationale le 24 octobre 1950, pour une intégration des organisations militaires des six États fondateurs, calquée sur le modèle de la Communauté économique du charbon et de l’acier[1].
En présentant le texte au Parlement italien, le rapport illustratif signé par Alcide De Gasperi commence par rappeler « la situation politique actuelle, si lourde d'inconnues pour l'Europe occidentale et pour tout ce qu'elle représente de civilisation et de valeurs spirituelles dans le monde ». La réponse, poursuit-il, n'est pas « une alliance militaire traditionnelle, mais un organisme auquel les États participants ont transféré une partie de leurs pouvoirs souverains (...) Des forces armées communes (non pas coalisées mais intégrées) et un budget commun ». Car, « comme son nom l'indique, la Communauté a des objectifs exclusivement défensifs, objectifs énoncés dans le préambule et précisés dans les premiers articles du traité », poursuit le rapport, « elle coopère étroitement avec l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord » : une coopération à laquelle sont consacrés plusieurs articles et un protocole entier.
L'un des objectifs à atteindre avec le traité CED est de faire en sorte que les objectifs militaires communs imposés par les besoins de défense soient réalisés conformément aux objectifs économiques posés par les Six en 1950. Un principe est énoncé clairement dans le préambule : « Cette intégration aboutira à l'emploi le plus rationnel et le plus économique des ressources de leurs pays. » En particulier, grâce à l'établissement d'un budget commun et de programmes d'armement communs, les représentants de France, Italie, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas et Allemagne annoncent vouloir « assurer le développement de leur force militaire sans qu'il soit porté atteinte au progrès social ». Ces défis sont les mêmes qu'aujourd'hui.
Ces principes sont développés dans différentes dispositions du traité à partir de l'article 3. L'objectif explicite est donc l'utilisation plus rationnelle des ressources de chaque pays ainsi que l'élargissement des marchés de production et de consommation.
Le cœur de l'accord se trouve à l'article 9, qui régit les « forces européennes de défense », constituées à partir des contingents mis à disposition par les États membres en vue de leur fusion dans les conditions prévues par le traité ». Le même article précise - c'est un passage crucial - que « les États membres n'ont pas de forces armées nationales », sauf quelques exceptions strictement réglementées (comme les corps destinés à la garde personnelle des chefs d'État). Une discipline particulière est prévue pour la Marine : seules les formations de défense côtière feront partie des forces européennes. Vient ensuite la question des forces armées destinées à être déployées dans des territoires non européens : essentiellement, à l'époque, les colonies françaises. Toutefois, le traité lui-même prévoit que « le volume total de ces forces nationales ne doit pas être de nature à compromettre la participation de l'État membre aux forces européennes de défense ». Si les forces de police et autres forces chargées du maintien de l'ordre public conservent leur caractère national, leur volume est toutefois « proportionné aux limites de leur mission » (article 10).
Les « Unités de base » des forces terrestres européennes correspondent, selon le traité, à la division traditionnelle. Jusqu'à ce niveau, il n'y a pas d'intégration entre des éléments de nationalités différentes, comme c'est le cas au niveau des corps d'armée (article 68). Pour chaque Unité de base, le protocole prévoit des effectifs de 13.000 hommes pour les forces terrestres et de 1.300 hommes pour les forces aériennes.
Bien entendu, les accords de l'époque supposent une conscription obligatoire dans tous les États membres. Cette dernière a disparu dans la plupart des pays européens. Mais elle est redevenue obligatoire en Lettonie et en Suède et l’Allemagne envisage une solution basée sur le volontariat. Les chiffres sont éloquents et montrent la distance qui sépare les ambitions de l'époque des perspectives actuelles : la « boussole stratégique », approuvée en mars 2022, prévoit, parmi ses principaux objectifs, que l'Union dispose d'ici 2025 d'une capacité d'intervention rapide pouvant atteindre 5.000 unités, à utiliser pour la gestion des crises extérieures, un objectif sur lequel il n'y a pas non plus d'accord, malgré les appels en ce sens. Le ministre letton de la Défense a par exemple déclaré que cette force européenne devrait essentiellement être utilisée « pour des interventions de défense des ambassades ». Il ne s'agit pas de remplacer l'OTAN même si l’on envisage une certaine autonomie, ce qui n’était pas le cas du traité CED. L'article 18 prévoit clairement que les forces européennes de défense doivent être confiées au commandement suprême de l'OTAN (« Le Commandant Suprême compétent, appartenant à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, est habilité à s'assurer que les Forces européennes de défense sont organisées, équipées, instruites et préparées à l'emploi de façon satisfaisante ») et que ce commandement suprême doit avoir tous les pouvoirs et toutes les responsabilités à l'égard de ces forces en temps de guerre.
Dorénavant, la question est plus complexe et il y a un débat entre ceux qui parlent d' « autonomie stratégique » de l'Europe et ceux qui sont plus soucieux du rôle de l’OTAN. Les ministres des Affaires étrangères de la France, de l'Allemagne et de la Pologne, réunis à Paris le 12 février 2024, annoncent clairement dans une déclaration commune : « Notre objectif est de rendre l’Union européenne plus unie, plus forte et mieux à même de faire face aux enjeux actuels en matière de sécurité, vers une Union de sécurité et de défense », tout en se disant « également attachés à une Organisation du traité de l’Atlantique Nord unie et forte ». Ursula von der Leyen, lors de la session plénière du Parlement européen du 28 février 2024, précise que « la souveraineté européenne ne rognera jamais l'importance et la nécessité de notre alliance au sein de l'OTAN. En fait, une Europe plus souveraine, en particulier en matière de défense, est essentielle au renforcement de l'OTAN. »
Pour en revenir au traité CED, outre l'intégration des écoles militaires (article 74), les uniformes communs (article 15), le transfert à un tribunal communautaire des pouvoirs de répression des infractions pénales commises par les membres des forces européennes (article 18), le texte prévoit également un ensemble de dispositions de nature économique.
En particulier, il est prévu un budget commun préparé par le « Commissariat » (l'organe principal de la Communauté, composé et organisé de manière similaire à la Haute Autorité de la CECA et à ce qui sera la Commission de la CEE) ; un budget qui doit être approuvé par le Conseil et ensuite par l'Assemblée parlementaire. Le traité CED confie également au Commissariat (« en consultation avec les gouvernements des États membres ») la préparation de « programmes communs pour l'armement, l'équipement, l'approvisionnement et l'infrastructure des forces de défense européennes » (article 101).
C'est désormais « le développement en commun de capacités militaires de pointe » qui est peut-être l'élément le plus prometteur de la « boussole stratégique ». À cet égard, le traité CED préfigure une politique industrielle coordonnée.
L'article 101 prévoit que le Commissariat prépare « les programmes communs d'armement, d'équipement, d'approvisionnement et d'infrastructure des Forces européennes de défense et assure, (…), l'exécution de ces programmes ». L'article 102 précisait que le Commissariat devait utiliser au mieux les spécificités techniques et économiques de chaque État et, en coopération avec les organes compétents de l'OTAN, « opérer dans le but de simplifier et de standardiser les armements, les équipements, les approvisionnements et l'infrastructure autant et aussi rapidement que possible ».
Aujourd’hui, c’est précisément de cela qu'il s’agit : assurer la standardisation des produits et l'interopérabilité des instruments militaires en tant qu'objectifs essentiels et primordiaux de la défense européenne. L'article 104 contient une discipline articulée pour assurer la compétitivité (sauf exceptions justifiées par le secret militaire). L'article 107 - une autre disposition cruciale du traité - prévoit que « la production de matériel de guerre, l'importation et l'exportation de ce matériel, les mesures concernant les installations destinées à la production de ce matériel, la fabrication de prototypes et les recherches techniques relatives au matériel en question ne peuvent être effectuées que sur la base d'une autorisation du Commissariat, sinon elles sont interdites », sauf autorisation spécifique du Commissariat. Deux annexes à cette disposition indiquent les matériels auxquels cette disposition se réfère. Une distinction est faite entre les armes dont la production (importation ou exportation) est soumise à une simple autorisation du Commissariat et d'autres pour lesquelles, si cette production a lieu dans des « régions stratégiquement exposées », une décision unanime du Conseil (c'est-à-dire des États) est également requise. L'arme atomique en fait partie. Le développement de ces armes est donc lui aussi envisagé dans un contexte européen, en confiant des tâches précises au Commissariat, donc à l'organe supranational, et la localisation des sites de production et d'installation est soumise à une décision unanime des États.
Cette question de l'introduction d'éléments de planification centralisés pour la production d'armes est également revenue sur le devant de la scène après l'agression de la Russie contre l'Ukraine. Le règlement visant à soutenir la production de munitions (ASAP), approuvé en un temps record en juillet 2023, prévoyait, dans une version initiale, un deuxième pilier, qui aurait donné à la Commission des pouvoirs très importants (bien que devant être exercés en accord avec les États) pour intervenir sur le marché des munitions et des missiles (une urgence primordiale pour les forces armées ukrainiennes). La Commission devait établir une cartographie des entreprises du secteur, afin de contrôler leur capacité de production et leurs chaînes d'approvisionnement et d'évaluer leur « capacité globale à répondre à l'évolution attendue de la demande du marché ». Sur la base de cette cartographie, la Commission aurait pu identifier une liste de « produits critiques » pour lesquels, en cas de nécessité (par exemple, pénurie de produits à envoyer en Ukraine), et toujours en dialogue avec les États, elle aurait pu établir des « commandes prioritaires », exigeant de l'entreprise qu'elle les exécute en priorité, « à un prix juste et raisonnable », même en ce qui concerne les commandes déjà acceptées. Malheureusement, cette proposition a immédiatement rencontré l’objection des États, notamment en raison de la pression exercée par l'industrie, ainsi qu’en raison d'une base juridique quelque peu incertaine.
Quelle défense pour l’Europe ?
Alcide De Gasperi conclut un discours à Strasbourg, en 1951, en s'adressant aux jeunes générations : « Il est vrai que chacun d'entre nous a des problèmes dans son propre pays qui le pressent de toutes parts, il est vrai que certains peuvent souhaiter poursuivre ce travail de coordination dans d'autres secteurs plus faciles, mais chacun sent que c'est une occasion qui passe et qui ne reviendra jamais. Il faut la saisir et l'insérer dans la logique de l'histoire. » Peut-être l’occasion se présente-t-elle à nouveau : le défi posé par l'invasion de l'Ukraine puis les attaques qui rendent le golfe d'Aden dangereux - donc la voie par laquelle passe une grande partie du commerce vers et depuis l'Europe - et les perspectives d'un désengagement américain conduisent avec force à la nécessité de considérer une défense européenne, dans des termes similaires à ceux d'il y a soixante-dix ans.
Pour construire une défense européenne efficace qui puisse fonctionner en cas de désengagement ou de réduction des engagements américains, la simple augmentation des dépenses militaires ne peut suffire. Même l'objectif de 2 % du PIB serait insuffisant. La capacité de déployer un nombre suffisant de troupes régulières en cas de besoin n’est pas possible sans les États-Unis. Ces derniers sont actuellement les seuls à disposer d’un ensemble de forces complètes. Mais si l’Europe ne peut plus compter sur le parapluie américain, il est nécessaire de construire un pilier européen réel et solide au sein de l'OTAN, capable de fournir les moyens militaires cruciaux, tels que la capacité de transport lourd et l’intelligence, que seuls les États-Unis possèdent à l'heure actuelle.
L'Union européenne devrait également jouer un rôle plus important dans le développement et l'acquisition en commun de systèmes d'armement ainsi que dans d'autres projets de collaboration. Dans la proposition de règlement EDIP, l’idée est d'utiliser le budget de l'Union pour augmenter le financement afin de compléter les acquisitions conjointes d'armement signées par les États membres, ainsi que pour garantir que la production soit achetée (à l'instar de ce qui a été fait pour les vaccins contre le coronavirus, une expérience qui a finalement abouti à une augmentation de la production européenne). Selon la Commission, cela permettrait de rationaliser l'industrie de la défense du continent, qui est largement divisée en fonction des frontières nationales, et d'encourager l'achat de produits européens plutôt que d'acheter à des pays tiers. Le règlement propose également de renforcer les chaînes de production européennes et de construire un mécanisme d'incitation à l'exportation, sur le modèle américain. Malheureusement, les ressources disponibles (1,5 milliard €) semblent insuffisantes pour des objectifs aussi ambitieux.
De plus en plus, la défense commune apparaît clairement comme un bien public européen. On ne peut que regretter le fait que la question du financement des politiques communes et des investissements nécessaires ait été absente des débats lors du scrutin européen. S'appuyant sur l'expérience de NextGenerationEU, il conviendrait d’envisager sérieusement l'opportunité d'émettre des obligations européennes, autrement dit l’idée de procéder à des opérations d’emprunts européens communs pour financer des achats conjoints ou la production d’armement. Une offre stable et régulière de ces titres renforcerait d’ailleurs également le rôle international de l'euro.
Encore une fois, une initiative commune, organique et ambitieuse telle que celle envisagée par le traité CED, apparaît comme une anticipation et, à certains égards, comme une vision pour un renouveau institutionnel européen.
En effet, le « commissaire à l'industrie » est déjà responsable du marché intérieur, y compris l'industrie de la défense. Le traité de Lisbonne prévoit également un rôle clair pour le haut représentant en matière de défense. On peut toutefois se demander si cette voie « fonctionnaliste » est suffisante. Une dimension européenne de la défense peut certes être développée sur la base du traité de Lisbonne sans qu'un commissaire européen ad hoc soit nécessaire. Il suffirait de donner au haut-représentant, vice-président de la Commission, les pouvoirs appropriés. Toutefois, sa mise en œuvre se heurte à des difficultés objectives, comme le montre la question de la difficulté de renforcer la soi-disant Facilité européenne pour la paix, c’est peut-être le signe d’un nécessaire renouveau institutionnel.
***
Si l’objectif est de faire en sorte que l'Europe n'ait pas besoin du parapluie américain pour se défendre, il convient donc qu'elle construise sa propre capacité de défense autonome au sein de l'OTAN, avec toutes les différences d'un contexte historique différent (scénario global différent, acteurs différents engagés sur le terrain, rôle et poids différents de l'Europe dans le monde). Le moment est peut-être venu d’effectuer un saut qualitatif dans le processus d'intégration, soumettant au débat public, puis aux citoyens européens et, enfin, aux parlements nationaux un nouveau traité sur la défense européenne.
Comme souvent, on peut se référer aux mots sages de Robert Schuman[2] : dans le processus d'intégration européenne « il y a lieu de procéder par étapes, dans des secteurs psychologiquement mûrs et où des facilités techniques particulières laissent prévoir un résultat spectaculaire ». Dans le cas de la CED, il admet en 1963 qu’ « on n'est pas toujours maître des choix à faire ni de l'ordre d'urgence des problèmes (...) ; la CED conçue pour éviter la reconstitution d'une armée nationale allemande, de son état-major, fut prématurément imposée à l'opinion publique par le blocus de Berlin et la guerre de Corée. Il faut préparer les esprits à accepter les solutions européennes en combattant partout non seulement les prétentions à l'hégémonie et la croyance à la supériorité, mais les étroitesses du nationalisme politique, du protectionnisme autarcique et de l'isolationnisme culturel ».
[1] De Gasperi meurt le 19 août 1954, au moment de la conférence qui doit discuter des amendements français. Absent de la table des négociations, comme Robert Schuman, seul Konrad Adenauer est resté au gouvernement après avoir obtenu une nette majorité parlementaire lors des élections de septembre 1953.
[2] Robert Schuman, Pour l’Europe, Paris, 1963, pp. 46-47.
Directeur de la publication : Pascale Joannin
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