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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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ENCorinne Deloy
Fondation Robert Schuman
La Belgique est dirigée par une coalition gouvernementale regroupant le Mouvement réformateur (MR), les libéraux et démocrates flamands (VLD), le Parti socialiste wallon (PS), le Parti socialiste flamand (SP.A) et enfin les écologistes d'Ecolo (wallons) et d'Agalev (flamands). Le Premier ministre (VLD) de cette coalition arc-en-ciel, Guy Verhofstadt, a convoqué les élections législatives pour le 18 mai prochain avec un mois d'avance sur le calendrier initialement prévu. « Je pense que cette date convient mieux aux électeurs que la date du 15 juin, moment des examens scolaires et des préparatifs de vacances » a t-il déclaré pour justifier ce changement de date. En effet, les élections se déroulant en mai, le Premier ministre espère que le nouveau gouvernement sera formé avant l'été.
Le système politique belge
Le système politique belge est fondé sur ce que l'on appelle la « pilarisation ». Les formations politiques se sont développées, au sein du royaume, à partir de clivages internes à la société : les premières autour du clivage religieux Eglise / Etat ; les suivantes autour du clivage régional opposant les Wallons aux Flamands et enfin du clivage social, opposant le travail au capital, les ouvriers aux patrons. Les partis politiques, nés de ces clivages, constituaient de véritables petites entités au sein de la société belge ; de nombreuses organisations (écoles, compagnies d'assurance, etc.) existaient autour de chaque parti prenant en charge les membres de ce parti et leurs familles quasiment de la naissance à la mort. Ainsi, en échange de leur loyauté politique, les membres de ces organisations pouvaient obtenir des emplois, des logements ou divers autres avantages sociaux. De leur côté, les leaders des différentes formations politiques se répartissaient, de façon équitable, les postes à pourvoir au sein des administrations publiques.
Ce système a très bien fonctionné jusque vers la fin des années soixante-dix. Dans les années quatre-vingts, le paysage politique s'est recomposé ; deux nouvelles tendances politiques sont apparues : les mouvements écologistes (Ecolo et Agalev) et les formations d'extrême droite (Vlaams Blok et Front national). Ces partis ont obtenu un succès grandissant au fil des deux dernières décennies. Après avoir été longtemps - de l'après-guerre aux années soixante-dix - dominée par les formations socialiste et démocrate-chrétienne, la vie politique belge a connu, ces dernières années, une montée des partis régionaux (Volksunie et Vlaams Blok en Flandre, Front démocratique des francophones bruxellois et Rassemblement wallon en Wallonie ainsi qu'à Bruxelles capitale). Depuis les deux dernières décennies, on constate une percée des formations d'extrême droite (Vlaams Blok) et des écologistes (Ecolo et Agalev). Alors que les partis socialiste et démocrate-chrétien regroupaient, dans les années d'après-guerre, la majorité du corps électoral, ils ne rassemblent plus qu'un tiers des Belges.
Depuis les années soixante-dix, la Belgique ne possède plus de formations politiques nationales. En Wallonie se présentent donc des partis francophones, en Flandre, des partis néerlandophones, les formations francophone et néerlandophone ne se retrouvant plus que dans la région de Bruxelles, appelée Bruxelles capitale. Les résultats de chaque parti sont donc calculés au sein de chacune des régions. Nous noterons que la communauté germanophone a récemment revendiqué une garantie de représentation d'au moins deux députés au Parlement fédéral, arguant du fait qu'elle est la seule communauté de Belgique à ne pas posséder d'autonomie constitutive. Les germanophones réclament donc la création d'une nouvelle région sur le modèle de la région de Bruxelles capitale.
Plusieurs réformes constitutionnelles (1970, 1980, 1988-1989, 1993 et 2001) ont transformé la Belgique en un Etat fédéral. Les trois régions du pays (Flandre, Wallonie et Bruxelles capitale) et les communautés linguistiques se sont vues accorder de nouvelles compétences économiques et culturelles. Afin de « rationaliser le système mis en place lors des précédentes réformes de l'Etat », le gouvernement a décidé d'engager la révision de plusieurs articles de la Constitution lors de la prochaine législature. Le Sénat devrait ainsi perdre une grande part de ses pouvoirs législatifs pour devenir le « lieu de rencontre des communautés et des régions qui forment la Belgique » selon les propres termes du Premier ministre. Composée de soixante-dix membres désignés par les Parlements francophone et néerlandophone, la Chambre haute n'exercerait plus de contrôle politique sur le gouvernement et son rôle législatif serait essentiellement circonscrit aux questions constitutionnelles et à celles ayant trait à la monarchie.
Les élections législatives ont lieu tous les quatre ans, le vote se déroulant selon un système de représentation proportionnelle intégrale à la plus forte moyenne (méthode d'Hondt).
Onze formations politiques sont représentées dans l'actuel Parlement fédéral belge :
les libéraux et démocrates flamands (VLD), parti du Premier ministre Guy Verhofstadt ;
le Parti démocrate-chrétien flamand (CD&V pour Christen democratisch en Vlaams), ex-Parti populaire chrétien flamand (CVP), formation de l'ancien Premier ministre Jean-Luc Dehaene ;
le Parti socialiste (SP.A pour Sociaal Progressif. Alternatif), formation social-démocrate flamande, ex-Parti socialiste (SP) ;
le Vlaams Blok (VB), formation flamande d'extrême droite dirigée par Filip Dewinter ;
Agalev (Anders Gaan Leven, Vivre autrement), parti écologiste flamand ;
Spirit (Social, progressif, internationaal, regionalistisch, integraal democratisch en toekomstgericht), formation issue de la dissolution le 19 septembre 2001 de la Volksunie, parti régionaliste flamand ;
le Parti socialiste (PS), formation social-démocrate wallonne ;
le Parti réformateur libéral (PRL), parti libéral wallon devenu Mouvement réformateur (MR) ;
Ecolo (Ecologistes confédérés pour l'organisation de luttes originales), formation écologiste wallonne créée en 1980 ;
le Parti social chrétien (PSC), parti chrétien-démocrate wallon devenu récemment le Centre démocrate humaniste (CDH) ;
le Front national (FN), formation wallonne d'extrême droite créée en 1985 par Daniel Féret.
Les enjeux électoraux
Pour les libéraux et démocrates flamands (VLD) du Premier ministre Guy Verhofstadt, l'enjeu majeur de ces élections législatives est de conserver leur place de première formation politique de Flandre devant le Parti démocrate-chrétien flamand (CD&V). En Wallonie, la principale bataille électorale opposera le Mouvement réformateur (MR) (formation des ministres des Affaires étrangères Louis Michel, de l'Intérieur Antoine Duquesne et des Finances Didier Reynders) et le Parti Socialiste (PS) au Centre démocrate humaniste (CDH).
Ces derniers mois, la scène politique flamande a connu d'importantes transformations. Le Parti socialiste (SP) a changé d'appellation pour devenir le Parti socialiste alternatif (SP.A, le point séparant le SP du A ayant été introduit à la demande du producteur des eaux de Spa, marque protégée) et le Parti populaire chrétien (CVP) s'est transformé en Parti démocrate-chrétien flamand (CD&V), confirmant ainsi son identité flamande et s'éloignant encore un peu plus des sociaux-chrétiens. Par ailleurs Johan Van Hecke, ancien président du Parti populaire chrétien, a créé une nouvelle formation : la Nouvelle démocratie-chrétienne (NCD).
Du côté des régionalistes, de nombreux parlementaires de la Volksunie, dont le président du parti Geert Bourgeois, se sont opposés au projet de réforme de l'Etat du gouvernement, estimant que celle-ci était trop favorable aux francophones. Les tensions internes ont finalement provoqué l'éclatement du parti. Lors d'un référendum organisé les 15 et 16 septembre 2001, 47% des membres ont choisi de soutenir la fraction nationaliste radicale du président Geert Bourgeois contre 23% qui se sont prononcés en faveur des réformistes emmenés par les deux ministres du gouvernement flamand (et anciens présidents de la Volksunie) Bert Anciaux et Paul Van Grembergen. 30% des membres du parti se sont prononcés pour un apaisement des tensions et un dépassement du conflit interne au parti. La Volksunie s'est donc auto-dissoute le 19 septembre 2001, donnant naissance à deux nouvelles formations politiques : Spirit (Social, progressif, internationaal, regionalistisch, integraal democratisch en toekomstgericht), dirigé par Annemie Van de Casteele, et la Nouvelle alliance flamande (N-VA), que préside Geert Bourgeois.
Côté francophone, en septembre dernier, le Parti socialiste (PS) et les Verts d'Ecolo ont scellé, en vue des élections législatives du 18 mai prochain, une alliance en forme de programme commun de gouvernement intitulé « Convergences à gauche ». Les socialistes et les écologistes souhaitent renforcer le poids électoral de la gauche face au Mouvement réformateur (MR), formation libérale, comme à l'opposition de droite du Centre démocrate humaniste (CDH).
Mais le véritable enjeu de ces élections législatives est certainement, pour l'ensemble de la classe politique belge et en particulier pour les formations flamandes, de contenir une nouvelle poussée du Vlaams Blok en Flandre, région regroupant 60% de la population belge. En mars dernier, la deuxième ville du pays, Anvers, a été secouée par un scandale financier mettant en cause trois fonctionnaires soupçonnés d'avoir puisé dans les caisses d'associations municipales pour financer des dépenses personnelles. Cette crise a abouti à la démission du bourgmestre (maire) Léona Detiège (Parti socialiste flamand, SP.A) et à celle de deux de ses échevins (conseillers municipaux) socialistes ainsi que des libéraux, démocrates-chrétiens et écologistes associés avec les socialistes dans la gestion municipale. Anvers est connu pour être le bastion du parti d'extrême droite, le Vlaams Blok y a recueilli 33% des suffrages aux élections municipales de 2000 et occupe vingt des cinquante-cinq sièges du conseil municipal. A l'issue de ce scrutin, l'ensemble des partis politiques ont formé une coalition municipale pour faire barrage au parti extrémiste. Le Vlaams Blok a obtenu 9,87% des voix aux dernières élections législatives du 13 juin 1999 et 15,54% des suffrages aux élections du Conseil régional flamand de la même année (lors de ce scrutin, le Vlaams Blok a d'ailleurs, pour la première fois, dépassé en nombre de voix le Parti socialiste). Le scandale financier d'Anvers ne peut qu'être favorable au Vlaams Blok qui se présente comme la seule formation politique « propre » de Belgique et fait campagne sur son exclusion de l'équipe municipale alors même qu'il est le premier parti de la ville. Le 31 mars, les partis politiques, à l'exception de la formation extrémiste, sont parvenus à s'entendre sur la nomination de Patrick Janssens (Parti socialiste) à la mairie d'Anvers, les libéraux et démocrates flamands acceptant cette candidature en échange de la création d'un « bureau d'intégrité » chargé de veiller à la bonne gestion de la ville.
Enfin, nous signalerons que, le 26 février dernier, la Cour d'appel de Bruxelles s'est déclarée incompétente pour juger du caractère éventuellement raciste du Vlaams Blok ; la formation extrémiste avait été assignée en justice par les trois associations par lesquelles transitent les subventions publiques dont elle bénéficie. Le Centre pour l'égalité des chances et la Ligue des droits de l'Homme avaient présenté au tribunal des textes émanant du Vlaams Blok prônant l'instauration d'un enseignement séparé pour les enfants musulmans et une diminution des allocations de chômage pour les personnes ne disposant pas de la nationalité belge. Cependant, en se déclarant incompétente, la Cour a permis au Vlaams Blok de se présenter comme victorieux et surtout de voir s'éloigner tout risque d'être privé, à la veille des élections législatives, d'un financement public annuel d'environ quatre millions d'euros.
Le 18 mai prochain, les Belges voteront également pour leurs représentants régionaux et « communautaires ». Par ailleurs, les sénateurs seront désignés par les Parlements francophone et néerlandophone. Concernant les élections législatives, les candidatures pour les élections législatives du 18 mai prochain seront définitivement closes le 1er mai. Pour ce scrutin, le principe de la parité a été rendu obligatoire : toutes les listes devront donc compter autant d'hommes que de femmes, les deux sexes devant être présents aux trois premières places de chacune d'elles. Par ailleurs, les circonscriptions électorales coïncideront, dans l'ensemble du pays, avec les limites provinciales, ce qui bouleversera les habitudes des électeurs des provinces du Hainaut et de Liège, provinces jusqu'alors divisées en trois arrondissements distincts. Enfin, nous rappellerons que le vote est obligatoire en Belgique.
Rappel des résultats des élections législatives du 13 juin 1999:
Participation : 85% (la participation est obligatoire en Belgique)
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