Analyse
Élections en Europe
Corinne Deloy
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Corinne Deloy
Le président tchèque, Petr Pavel, a fixé le 13 mai dernier la date des prochaines élections législatives et convoqué 8 millions d’électeurs aux urnes les 3 et 4 octobre prochains, soit la dernière date possible du calendrier électoral puisque le scrutin législatif doit obligatoirement se tenir au moins 30 jours avant le terme de la législature en cours (pour mémoire, les dernières élections législatives ont été organisées les 8 et 9 octobre 2021). « le premier weekend d’octobre constituait le meilleur moment, le week-end précédent, fin septembre, correspondant aux célébrations de la saint Venceslas (qui est le saint patron du pays) et organiser les élections législatives en même temps aurait été très compliqué pour toutes les communes » a déclaré Petr Pavel.
Pour la première fois, les Tchèques résidant à l’étranger (environ 500 000) seront autorisés à voter par correspondance. Jusqu’à maintenant, ceux-ci devaient obligatoirement se rendre dans les ambassades tchèques pour accomplir leur devoir civique. « Dans le passé, les votes de l’étranger allaient principalement aux partis de droite. Les partis qui mettaient l’accent sur l’individualisme prospéraient à l’étranger et leur sentiment anticommuniste jouait également un rôle. Mais les temps ont changé. L’opposition actuelle, l'Action des citoyens insatisfaits (ANO) et Liberté et démocratie directe (SPD) peut désormais tirer profit du conflit entre conservateurs et libéraux ou entre traditionalistes et progressistes, tant au niveau national qu’international. Les deux partis appartiennent au camp « trumpiste » qui n’a fait que se renforcer sur la planète » a indiqué Lukas Jelinek, commentateur politique.
25 listes conduites par des partis politiques et une liste emmenée par une coalition ont été enregistrées pour ce scrutin. Le nombre de candidats est le plus faible enregistré depuis 1998, cela s’explique notamment par les nombreuses alliances électorales.
Dans un contexte de méfiance après la constatation d’ingérences électorales lors de scrutins nationaux dans plusieurs Etats européens, notamment en Roumanie, le réseau Tiktok a dépêché une équipe de 53 modérateurs pour surveiller les contenus de la plateforme autour des élections.
La République tchèque est dirigée par une coalition gouvernementale qui comprend 4 partis : le Parti démocrate-civique (ODS) du Premier ministre Petr Fiala ; l'Union chrétienne-démocrate-Parti du peuple (KDU-CSL), dirigée par Marek Vyborny ; Tradition, responsabilité, prospérité 09 (TOP 09), conduit par Marketa Pekarova Adamova (ces 3 partis s'étaient rassemblés dans la coalition Spolu (Ensemble) lors des élections législatives des 8 et 9 octobre 2021) et Maires et indépendants (STAN), dirigé par Vit Rakusan.
Selon la dernière enquête d’opinion réalisée par l’institut Kantar et publiée le 22 août, l'Action des citoyens insatisfaits (ANO), parti populiste fondé en 2012 par l’ancien Premier ministre (2017-2021) Andrej Babis, arriverait en tête avec 33% des suffrages. Il serait suivi par les 3 partis (ODS, KDU-CSL, TOP 09) de la coalition Spolu (Ensemble), 22% ; Maires et indépendants (STAN), parti membre de la coalition gouvernementale sortante, 12%; la coalition d’extrême droite emmenée par Liberté et démocratie directe (SPD) de Tomio Okamura, 10% ; le Parti pirate (CSP) qui se présente en coalition avec les écologistes, 9,5% ; la Liste Stacilo! (ça suffit !) qui rassemble les forces de gauche dont notamment Social-démocratie (SOCDEM), ancien Parti social-démocrate (CSSD), présidé par Jana Malacova, et le Parti communiste de Bohême et Moravie (KSCM), conduit par Katerina Konecna, 6% et, enfin, les Automobilistes pour eux-mêmes (Motoriste sobe), formation radicale de droite dont Filip Turek est le président d’honneur, 5,5%.
Les 3 partis de la coalition Spolu, Maires et indépendants et le Parti pirate ont déclaré qu'ils ne collaboreraient pas avec Stacilo!, ANO ou Liberté et démocratie directe. De leur côté, ces deux derniers partis ont exclu toute coopération avec les partis du gouvernement sortant.
Enfin, le président de la République a déclaré qu'il se réservait le droit de refuser de nommer des ministres favorables au retrait de la République tchèque de l'OTAN ou de l'Union européenne et qu'il ne nommerait aucun candidat de Stacilo! ou de Liberté et démocratie directe à un poste ministériel relevant de la « sécurité ou de la politique étrangère ».
Andrej Babis peut-il former un gouvernement ?
Vainqueur des élections législatives d’octobre 2021, mais dans l'impossibilité alors de trouver des partenaires de gouvernement à l'issue du scrutin, et battu au 2e tour de l'élection présidentielle de janvier 2023 par Petr Pavel, Andrej Babis veut sa revanche et conduira la liste en Moravie-Silésie. « Jamais dans l’histoire, nous n’avons eu un gouvernement aussi arrogant, amateur et incompétent » dirigé par un Premier ministre « complètement déconnecté de la réalité » a déclaré Andrej Babis. Il promet de faire baisser l'inflation (2,7% en juillet). « Seuls nos candidats défendent les intérêts tchèques » répète-t-il.
Au cours des dernières années, Andrej Babis a transformé ANO, à l’origine libéral, centriste et pro-européen, en un parti populiste opposé à Bruxelles et anti-immigration et il s’est rapproché des Premiers ministres hongrois Viktor Orban (Alliance des jeunes démocrates-Union civique, FIDESZ-MPSZ) et slovaque Robert Fico (Direction-Démocratie sociale, SMER-SD). Il a déclaré qu’il envisageait de s’unir avec les forces opposées à l’octroi d’aide à l’Ukraine et qu’il était prêt à abandonner les engagements de défense pris par son pays auprès de l’OTAN estimant que « 2% du PIB pour la défense sont suffisants ».
« Nous allons relancer l'économie, augmenter les pensions de retraite et plafonner l'âge de la retraite à 65 ans, réduire les impôts des entreprises (de 21 % à 19 %), augmenter les déductions fiscales pour les particuliers, réduire la TVA pour les restaurants, supprimer les redevances audiovisuelles et geler les salaires des politiciens » a-t-il déclaré ajoutant qu'il s'opposerait à l'imposition aux ménages des quotas d'émissions de carbone de l'Union européenne, qui doivent entrer en vigueur en 2027 et à l’ensemble du Pacte vert comme du pacte européen sur les migrations et l’asile qu’il a qualifiés de « menaces pour l’économie et la sécurité tchèques ». « Nous garantirons une énergie bon marché pour tous. Nous n'autoriserons en aucun cas de nouvelles taxes vertes pour les ménages et les transports ». L’ancien Premier ministre a indiqué que le financement de ces mesures proviendrait d'une meilleure perception des impôts et d'une croissance économique plus forte.
Andrej Babis est en attente d’un nouveau procès depuis que sa relaxe dans l'affaire dite du Nid de cigogne (Capi hnisdode) de fraude aux fonds européens a été annulée le 23 juin dernier par la Cour d’appel (le tribunal avait acquitté l'ancien Premier ministre en première instance en février 2024). Il est soupçonné d’avoir exclu sa ferme nommée « Le nid de cigogne » du conglomérat qu'il possédait pour que celle-ci puisse bénéficier d’une subvention communautaire de 2 millions € destinée aux petites entreprises. « Il s'agit d'un procès politique. C’est complètement absurde, scandaleux et sans motif » a-t-il déclaré.
ANO s'est imposé lors des élections sénatoriales de septembre 2024 pour la première fois de son histoire, recueillant 40,27% des suffrages (2e tour) et 12 sièges, son résultat le plus élevé pour ce scrutin. La coalition gouvernementale Spolu de Petr Fiala a toutefois conservé sa majorité relative avec 37 sièges (32,13%). ANO a également remporté les élections régionales organsinées concomitamment au 1er tour du scrutin sénatorial en arrivant en tête dans 10 des 13 régions que compte la République tchèque. Andrej Babis est parvenu à transformer les élections régionales en un scrutin national. La participation a été faible, le pays a connu des inondations la semaine précédant le scrutin, rendant parfois la participation difficile. Par ailleurs, et c’est un élément important, Prague, où vivent une partie importante des électeurs des partis conservateurs et libéraux qui forment la coalition gouvernementale, ne vote pas pour les élections régionales.
Si ANO est en tête de toutes les enquêtes d'opinion, il dispose d'un nombre restreint de partenaires avec lesquels s'allier pour former une coalition gouvernementale à l'issue du scrutin.
Seule Liberté et démocratie directe (SPD), parti d'extrême droite, semble pour l'heure susceptible de s'allier avec Andrej Babis. Le parti a fusionné le 21 mars 2025 avec 3 groupes nationalistes de droite : Tricolore (Trikolora), dirigé par Zuzana Majerova ; Loi, Respect, Expertise (Pravo Respekt Odbornost) (PRO) emmené par Jindich Rajchl ; Svobodni, conduit par Libor Vondracek. Ce faisant, il tente ainsi d'éliminer toute concurrence sur sa droite.
« Je doute du fait que cette concentration des forces dans le camp patriote puisse aboutir à une augmentation marquante des votes en leur faveur. D’abord parce que pour une grande majorité des électeurs, le patriotisme n’est pas un thème déterminant et a beaucoup moins d’importance qu’en Pologne, en Slovaquie ou en Hongrie. Aucun parti politique tchèque ne peut espérer remporter une élection avec un discours axé essentiellement sur le patriotisme. Et puis, il existe d’autres partis anti-système et anti-européens comme la liste Stacilo! ou les Motoriste sobe. Cela me fait penser qu’en cas de forte participation aux élections, tous ces partis pourraient s’entretuer en quelque sorte et finalement rester en dessous de la barre de 5 % des suffrages » a souligné Vaclav Dolejsi, analyste politique du site d’information Seznam Zpravy.
Soutenu par les anciens présidents de la République Vaclav Klaus (2003-2013) et Milos Zeman (2013-2023), Tomio Okamura propose un programme souverainiste et eurosceptique (il propose la tenue d’un référendum sur la sortie du pays de l’Union européenne), opposé à toute immigration, à la poursuite de l'aide à l'Ukraine et l'accueil de réfugiés ukrainiens. Il défend la démocratie directe et souhaite que les citoyens puissent révoquer les responsables politiques si bon leur semble. : « La République tchèque n’appartient pas aux fonctionnaires de Bruxelles. Elle n’appartient pas aux mafias politiques ni aux spéculateurs énergétiques. Elle n’appartient qu’aux citoyens tchèques. Notre pays, nos règles ». Il s’est vu retirer son immunité parlementaire au début de l'année 2025 à la suite d'accusations portées contre lui pour avoir tenu des propos racistes lors de la campagne électorale des élections européennes de juin 2024.
Un autre mouvement d'extrême droite, les Automobilistes pour eux-mêmes, qui ont pris la 3e place aux élections européennes de juin 2024 avec 10,26% derrière ANO, 26,14% et la coalition Spolu, 22,27%, a le vent en poupe. Ils se présentaient en coalition avec Prisaha (Serment), autre parti populiste de droite dirigé par l'ancien officier supérieur de l'unité de la police contre le crime organisé Robert Slatcha qui a fait de la lutte contre la limitation de la souveraineté de la République tchèque et de la protection des frontières de l’Union européenne ses priorités.
Le parti a été fondé sur les cendres du Parti de l’indépendance en 2022 et choisi son nom pour marquer son opposition à l’interdiction de la production de véhicules équipés de moteurs thermiques et, au-delà, de toutes les initiatives proposées dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe ainsi que son désir du maintien du modèle traditionnel de l’industrie automobile. « Nous avons choisi « automobiliste » comme un symbole compréhensible par le public pour représenter tout ce que les progressistes de gauche attaquent de façon si agressive de nos jours. Nous nous trouvons à une époque où ces gens-là dépeignent et présentent comme des ennemis les choses ordinaires, les valeurs fondamentales et les domaines dont dépend la vie de la grande majorité de la société. Ennemis de la planète, ennemis de la morale, ennemis de l’Occident, ennemis de l’avenir et même, de plus en plus souvent, ennemis de notre présent » a déclaré Petr Macinka, dirigeant du mouvement.
Celui-ci défend une baisse du coût de la vie, le rejet de l’interdiction des moteurs à combustion et des limites d’émissions de gaz carbonique et la défense de la souveraineté tchèque.
Le parti espère entrer à la Chambre des députés et a pour ambition de participer à une coalition gouvernementale avec ANO.
La coalition Spolu conservera-t-elle le pouvoir ?
Le Premier ministre Petr Fiala veut tout faire pour lutter contre « la menace » Andrej Babis. La domination du parti ANO dans les enquêtes d'opinion a conduit 3 des 4 partis de l’actuelle coalition gouvernementale (ODS, KDU-CSL, TOP 09) à s'unir de nouveau pour ce scrutin législatif. « Il est encore trop tôt pour dire si cette coalition est une bonne chose ou pas, même si on peut penser qu’elle est une nécessité pour les 3 partis concernés, car dans l’état actuel des choses, si l’on s’en tient aux sondages, il est peu probable que TOP 09 et KDU-CSL réalisent un résultat supérieur à 5% des suffrages qui leur permettrait d’être représentés à la Chambre des députés » a indiqué Vladimira Dvorakova, politologue, ancienne directrice du département de science politique de la faculté des relations internationales de l'université de Prague.
« Ce seront des élections fondamentales. Les électeurs décideront s’ils veulent que notre pays soit dirigé par des forces pro-démocratiques qui ont l’ambition de continuer à faire avancer la République tchèque ou s’ils préfèrent se laisser leurrer par la propagande et les mensonges de la gauche, des populistes et de diverses autres forces radicales qui, s’ils ont la possibilité de former le gouvernement, représenteront le plus grand danger pour notre pays depuis novembre 1989 » a déclaré Petr Fiala. Le Premier ministre sortant met en avant le risque d'une coopération d’ANO avec les partis situés aux extrêmes sur l'échiquier politique « qui remettent en question notre appartenance à l’Ouest et qui courbent la tête devant le Kremlin alors que l’Europe subit une agression russe et une guerre de désinformation » ajoutant « C’est un risque fondamental pour la République tchèque. Nous rejetons cette voie. Nous nous tenons fermement du côté de la démocratie, de la règle de droit et de l’ancrage clair à l’espace euro-atlantique ».
Zbynek Stanjura, ministre des Finances, ajoute « La priorité absolue pour les 4 années à venir sera de faire en sorte de ne pas laisser les citoyens perdre confiance dans la capacité de l’Etat à garantir leur sécurité (…) Les principaux thèmes de la campagne sont clairement établis : sécurité, capacité de défense, prospérité. Mais il n’y aura bientôt plus de prospérité si l’on ne vit pas dans un pays sûr. Nous devons avoir cela bien à l’esprit ».
La coalition Spolu, qui a fait de la lutte contre le populisme et l’extrémisme sa priorité, promet d’assainir les finances publiques et de réduire la dette du pays. Elle souhaite également renforcer la défense et la sécurité du pays en modernisant l’armée.
Le gouvernement sortant a été fragilisé mi-juin après qu'a été rendu public le fait que l'Etat avait accepté de recevoir un paiement de 468 bitcoins, soit l'équivalent de 38,5 millions € et d'environ un milliard de couronnes tchèques. Dans un message publié sur le réseau X en mai, le ministère de la Justice se félicitait d'une vente aux enchères pour environ 500 bitcoins. Le site d’information Denik N a révélé que ces bitcoins provenaient de Tomas Jirikovsky, criminel condamné en 2017 pour détournement de fonds, trafic de drogue et possession illégale d’armes, qui a été libéré de prison en 2021. L'avocat de Tomas Jirikovsky s’est adressé au ministre de la Justice pour l'informer que son client souhaitait faire un don de 30% de ses bitcoins au ministère. Le ministre de la Justice Pavel Blazek (ODS) a affirmé qu’il ne voyait rien d’illégal ni de contraire à l’éthique dans l'acceptation de cette somme et s'est justifié en indiquant que les tribunaux n’ont pas démontré que la crypto-monnaie était le produit d’une activité criminelle. Il a indiqué que cette somme servirait à financer la numérisation de la justice, la lutte contre la drogue en prison et le logement du personnel pénitentiaire. Le scandale provoqué par cette affaire a conduit à sa démission le 31 mai et au dépôt d'une motion de censure contre le gouvernement soutenue par ANO, Liberté et démocratie directe et le Parti pirate qui a été rejetée le 19 juin, car 98 députés ont voté contre et 94 pour.
« L’électorat tchèque est divisé en deux camps opposés : libéral-démocratique d’un côté et autoritaire-populiste de l’autre. Ainsi, passer d’un camp à l’autre est pratiquement impossible. Même les affaires importantes, quels qu’en soient les acteurs, ne changent rien à cette situation. A une époque où la peur de l’autre camp est toujours plus grande que les doutes, même justifiés, à l’égard de son propre camp » écrit le quotidien Hospodarske Noviny.
Les partis de la coalition Spolu peuvent envisager de continuer à gouverner avec Maires et indépendants.
Du côté des Pirates (CSP), rien ne va plus. Son dirigeant, Ivan Bartos, a choisi de démissionner après les mauvais résultats aux élections européennes (juin 2024) et régionales (21 et 22 septembre 2024). Les Pirates ont perdu 96 des 99 sièges qu'ils détenaient dans les régions. Ivan Bartos a également été poussé à la démission de ses fonctions de vice-président du gouvernement chargé du Numérique et ministre du Développement régional par le Premier ministre Petr Fiala qui lui a reproché de ne pas avoir su mener à bien le projet de numérisation des procédures administratives liées aux permis de construire. Le Parti pirate a alors décidé (par un référendum interne) de quitter le gouvernement. Zdenek Hrib, ancien maire de Prague (2018-2023), a pris la présidence du parti. « Le Parti pirate, dont l’électorat n’est pas très stable, a réussi à séduire un électorat plutôt libéral. Or, tout au long de ces vingt à trente dernières années, cet électorat a eu tendance à être volatile et à choisir à chaque scrutin un nouveau parti » a souligné Michel Perottino, politologue de l'université Charles de Prague.
La gauche peut-elle retrouver les bancs de la Chambre des députés ?
Social-démocratie (SOCDEM), ancien Parti social-démocrate (CSSD), présidé par Jana Malacova, a décidé le 17 juillet de s'allier avec le Parti communiste de Bohême et Moravie (KSCM), fondé en 1989, dernier parti communiste non réformé d'Europe centrale, présidé par Katerina Konecna au sein de la Liste Stacilo! (ça suffit !) pour les élections législatives. Jana Malacova sera tête de liste à Prague. Cette alliance n'a pas été sans entraîner parmi les sociaux-démocrates des déchirements qui ont conduit au départ de plusieurs membres historiques, dont l'ancien sénateur (2011-2020) et ministre (2014-2016) Jiri Dientsbier ou Michal Smarda, ancien dirigeant du parti (2021-2024).
« Les personnes qui veulent voter pour Social-démocratie le font parce qu'elles ne veulent pas voter pour des partis anti-système mais pour la gauche européenne classique, qui reconnaît que le pâys appartient à l'Union européenne et à l'OTAN. Je ne pense vraiment pas que tous les électeurs de Social-démocratie se jetteraient soudainement au cou de Daniel Sterzik (président de Stacilo !) et de Katerina Konecna, qui ont inscrit la sortie de l'OTAN et de l'Union européenne à leur programme... Ce n'est pas bénéfique pour Social-démocratie, c'est un projet de Jana Malacova et de Lubomir Zaoralek (vice-président) pour assurer leur survie politique » analyse Petr Honzej, journaliste au quotidien Hospodarske Noviny.
Le 21 juillet, le président de la République Petr Pavel a promulgué un texte interdisant la promotion du communisme dans l’espace public. Celui-ci prévoit des peines de prison pouvant aller jusqu’à 5 ans pour toute personne qui soutient, promeut des mouvements nazis, communistes ou autres qui visent à supprimer les droits de l’Homme et les libertés ou à inciter à la haine raciale, ethnique, nationale, religieuse ou fondée sur la classe sociale.
La Liste Stacilo! regroupe communistes et sociaux-démocrates ainsi que des membres du Parti national social (CSNS), conduit par Michal Klusacek, et des Démocrates unis–Association des indépendants (SD-SN), emmenés par Alena Dernerova, deux partis qui prônent la paix et la fin de la course à l’armement. Le programme de cette alliance de gauche prévoit l'organisation d'un référendum sur la sortie de l'Union européenne et de l'OTAN et sur l'entrée de la République tchèque dans la zone euro.
Les partis de gauche souhaitent porter à 0% la TVA sur les denrées alimentaires de base et nationaliser certaines infrastructures stratégiques (par exemple CEZ, principal producteur et distributeur d'électricité).
Reste à savoir si cette coalition, dominée par les communistes et dont le programme est très proche de celui d’ANO (euroscepticisme, arrêt de l’aide militaire à l’Ukraine, opposition aux sanctions contre la Russie) permettra aux forces de gauche de retrouver, après 4 ans d’absence, le chemin de la Chambre des députés. « La gauche devient inutile car la politique est déterminée par la lutte entre la droite conservatrice, qui propose un retour à la normale en ces temps troublés, et les radicaux de droite, qui expriment le mécontentement des classes populaires face aux effets de la mondialisation (…) La gauche, qu’il s’agisse des sociaux-démocrates, des socialistes ou des verts, ne peut qu’’aider à faire passer les politiques de centre-droit en tant que partenaire minoritaire » écrit l’éditorialiste du site d’information Seznam Zpravy sur la situation politique en Europe.
Le système politique tchèque
Le parlement tchèque est bicaméral : il comprend le Sénat (Senát Parlamentu Ceske republiky) et la Chambre des députés (Poslanecka Snemovna Parlamentu Ceske republiky) qui compte 200 députés élus pour 4 ans au scrutin plurinominal au sein de 14 circonscriptions (13 régions et Prague).
Le seuil électoral pour entrer à la Chambre basse est fixé à 5% des suffrages pour les partis, à 8% pour les coalitions formées par 2 partis et à 11% des voix pour les alliances de 3 partis et plus. Les sièges sont répartis dans chaque circonscription à la proportionnelle selon la méthode d'Hondt. Les candidats doivent être âgés d'au moins 21 ans.
En République tchèque, le vote se déroule sur deux jours (vendredi et samedi matin). Durant la nuit, les urnes restent à l'intérieur des bureaux de vote, installés généralement dans les bâtiments publics, mais parfois dans des bâtiments privés telles les auberges de certains villages. Aucun résultat d'élections n'a jamais été contesté depuis le retour du pays à la démocratie en 1989.
Le Sénat compte 81 membres élus pour 6 ans au scrutin uninominal majoritaire à deux tours et renouvelables par tiers tous les 2 ans. Le choix de ce mode de scrutin répond à la volonté des rédacteurs de la Constitution, et notamment à celle de l'ancien président de la République (1993-2003), Vaclav Havel, de faciliter l'élection de personnalités indépendantes et solidement établies au sein des circonscriptions.
6 partis politiques ont obtenu des élus à la Chambre des députés lors des dernières élections législatives des 8 et 9 octobre 2021 :
- L'Action des citoyens insatisfaits (ANO, qui signifie « oui » en tchèque), parti populiste fondé en 2012 par Andrej Babis, deuxième homme le plus riche de République tchèque et propriétaire du conglomérat Agrofert et du groupe de médias Mafra, compte 72 députés ;
- Le Parti démocrate-civique (ODS), parti libéral positionné à droite sur l’échiquier politiques créé en 1991 et emmené par le Premier ministre sortant Petr Fiala, 34 sièges ;
- L'Union chrétienne-démocrate-Parti du peuple (KDU-CSL), parti centriste fondé en 1919 et conduit par Marek Vyborny, 23 élus ;
- Tradition, responsabilité, prospérité 09 (TOP 09), parti libéral de droite créé en 2009 et présidé par Marketa Pekarova Adamova, 14 sièges ;
- Maires et indépendants (STAN), parti de défense des intérêts locaux et favorable à la décentralisation, fondé en 2004 et dirigé par Vit Rakusan, 33 députés ;
- Le Parti pirate (CSP), fondé en 2009, dirigé par Zdenek Hrib, ancien maire de Prague (2018-2023), 4 sièges ;
- Liberté et démocratie directe (SPD), parti populiste de droite radicale créé en 2015 et conduit par Tomio Okamura, 20 députés.
Les Tchèques élisent également leur président de la République au suffrage universel. Petr Pavel, (indépendant) a été élu le 28 janvier 2023. Avec 58,53% des suffrages, il a battu Andrej Babis (ANO), qui a obtenu 41,67% des voix lors du 2e tour de scrutin. La participation s'est élevée à 70,22%.
Rappel des résultats des élections législatives des 8 et 9 octobre 2021 en République tchèque
Participation : 65,4 %
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