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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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Corinne Deloy

Fondation Robert Schuman
Le Parti de l'alliance social-démocrate (SF) a remporté une victoire historique le 25 avril en arrivant largement en tête des élections législatives anticipées en Islande. Le parti de Johanna Sigurdardottir, Premier ministre depuis le 1er février dernier, a recueilli 29,79% des suffrages soit 20 sièges à l'Althing, (Chambre unique du Parlement), +2 par rapport au précédent scrutin du 12 mai 2007). Son allié, le Mouvement de gauche-Les Verts (VG) de Steingrimur Sigfusson, a obtenu 21,68% des voix et remporté 14 sièges (+5). La coalition gouvernementale sortante recueille donc au total 51,47% des suffrages, soit la majorité absolue, et remporte 34 des 63 sièges du Parlement.
Le Parti de l'indépendance (SJ), qui a dominé la vie politique islandaise de ces 15 dernières années et remporté les 5 dernières élections législatives (1991, 1995, 1999, 2003 et 2007), obtient le résultat le plus faible de son histoire : 23,7% des suffrages et 16 sièges (- 9). Le Parti du progrès (F), formation centriste agrarienne de Sigmundur David Gunnlaugsson, recueille 14,80% des suffrages et remporte 9 sièges (+2). La surprise est l'entrée au Parlement du Mouvement des citoyens (O), fondé par l'économiste Thor Saari et très impliqué dans les protestations de l'automne dernier qui ont conduit le 26 janvier dernier à la démission du Premier ministre Geir H. Haarde (SJ). Il recueille 7,22% des suffrages et aura 4 élus, un résultat qui pourrait bien n'être qu'un épiphénomène dû à la crise économique actuelle. Enfin, le Parti libéral (XF), parti situé à droite sur l'échiquier politique et dirigé par Gudjon Kristjansson, obtient 2,22% des voix et ne sera pas représenté au Parlement.
La participation s'est élevée à 85,1%, soit légèrement au-dessus de celle enregistrée lors des précédentes élections du 12 mai 2007 (+ 1,5 point). Le pourcentage de femmes parmi les élus est en augmentation : le nouvel Althing compte 27 femmes, soit 43% de ses membres pour 31,7% durant la précédente législature.
"Si ce résultat est effectivement le bon, ces élections législatives seront historiques car ce serait la première fois (depuis l'indépendance du pays en 1944) que les partis de gauche obtiennent la majorité. Notre heure est arrivée. Je suis émue, fière et humble à l'instant où nous vivons cette victoire historique victoire du mouvement social-démocrate" a déclaré le Premier ministre sortant et leader du Parti de l'alliance social-démocrate, Johanna Sigurdardottir, à l'annonce des premiers résultats. "Le pays règle ses comptes avec le néo-libéralisme et avec le Parti de l'indépendance, qui a été aux commandes bien trop longtemps. Les gens veulent changer d'éthique, c'est pourquoi ils ont voté pour nous" a-t-elle ajouté.
Les Islandais ont donc choisi de continuer avec le Parti de l'alliance social-démocrate et leur Premier ministre Johanna Sigurdardottir qu'ils surnomment "Sainte Johanna" pour son dévouement envers les plus démunis. Le Chef du gouvernement sortant a su les convaincre qu'elle était la mieux placée pour tirer les leçons de la crise et ramener l'Islande vers la croissance. "Les valeurs libérales ont prévalu trop longtemps. Le fossé entre les riches et les pauvres s'est accru. Les sociaux-démocrates ont changé les valeurs en les orientant de manière plus sociale, vers la justice et l'égalité ; ce sont ces valeurs qui guideront la coalition si elle est reconduite" avait-elle indiqué lors de la campagne électorale.
"Elle n'est pas une bonne oratrice mais son authenticité et sa crédibilité font qu'elle est aimée de la population" indique le politologue Gunnar Helgi Kristinsson. Le Premier ministre a clairement indiqué qu'elle souhaitait faire entrer son pays dans l'Union européenne le plus rapidement possible et adopter la monnaie unique dans les 4 années à venir. "Nous défendrons nos ressources, la souveraineté de l'Islande sur elles et notre politique relative à la pêche et à l'agriculture" a répété Johanna Sigurdardottir durant la campagne. Le secteur de la pêche représente 36,6% des exportations totales de l'Islande. Les négociations sur l'ouverture de négociations d'adhésion à l'Union européenne pourraient cependant être plus difficiles que prévues étant donné le résultat réalisé par le Mouvement de gauche-Les Verts, majoritairement eurosceptique et partenaire probable du SF au gouvernement, à ce scrutin.
"Le Parti de l'indépendance, au pouvoir depuis 1991 et jusqu'au début de cette année, traverse une période très difficile. Il est évident que les électeurs sont désormais sceptiques à son sujet" indique le politologue Gunnar Helgi Kristinsson. Dirigée depuis fin mars par Bjarni Benediktsson, le parti est en effet considéré comme l'artisan principal de la libéralisation de l'économie et jugée responsable de l'effondrement du secteur bancaire de l'automne 2008 qui a précipité l'île au bord de la faillite. Pays jadis très prospère, l'Islande connaît une inflation comprise entre 15% et 18%; le taux de chômage, auparavant inexistant, avoisine les 10% de la population active ; la monnaie nationale, la couronne, a perdu la moitié de sa valeur face au dollar et à l'euro et, enfin, le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une chute de 10% du PIB en 2009, ce qui représenterait le plus mauvais résultat de l'économie islandaise depuis l'indépendance du pays en 1944. L'échec du SJ à ces élections était donc quasiment inévitable.
Agée de 67 ans, Johanna Sigurdardottir, ancienne hôtesse de l'air à la compagnie nationale Loftleidir Airlines (qui deviendra Icelandair) entre 1962 et 1971, ancienne ministre des Affaires sociales (1987-1994), devenue la première femme Chef du gouvernement islandais le 1er février dernier, est très appréciée de ses compatriotes. Elue pour la première fois au Parlement en 1978 et élue vice-présidente du Parti social-démocrate en 1984, Johanna Sigurdardottir avait ensuite échoué à en prendre la tête. L'année suivante, elle avait fondé Thjodvak (Mouvement national) avant de réintégrer le Parti social-démocrate en 1997. Elle a succédé à Geir H. Haarde à la tête du gouvernement le 1er février dernier. Divorcée, Johanna Sigurdardottir devient également la première Premier ministre homosexuelle du monde.
"Je défendrai de toutes mes forces les plus faibles de notre société, les invalides, les pauvres, ceux qui sont les plus vulnérables" a déclaré le Premier ministre le 24 avril dernier lors d'un débat télévisé, en ajoutant "mais nous devrons réduire les dépenses". Au lendemain de la victoire historique des partis de gauche, Johanna Sigurdardottir va commencer dans les jours qui viennent les négociations en vue de former son futur gouvernement. Elle pourrait conserver la même majorité que celle de son précédent gouvernement mais également, selon Jacques Mer, ancien ambassadeur de France en Islande (1988-1992), élargir sa coalition par exemple au Parti du progrès, qui partage ses opinions sur l'adhésion de l'Islande à l'Union européenne, ou même au Mouvement des citoyens.

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