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Une élection présidentielle tchèque à l'issue très incertaine

Élections en Europe

Corinne Deloy

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18 décembre 2017
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

Une élection présidentielle tchèque à l'issue très incertaine

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Les 12 et 13 janvier prochains, 8,3 millions de Tchèques sont appelés aux urnes pour désigner leur président de la République. Si un des candidats recueille plus de 50% des suffrages, il remportera l'élection ; si tel n'est pas le cas, un 2e tour de scrutin sera organisé les 26 et 27 janvier.

L'élection présidentielle tchèque a lieu exactement trois mois après le scrutin législatif, qui s'est tenu les 20 et 21 octobre dernier et qui a vu la victoire du parti ANO (Oui), dirigé par Andrej Babis, qui a recueilli 29,64% des suffrages et remporté 78 des 200 sièges de la Chambre des députés. Andrej Babis a été nommé au poste de Premier ministre le 6 décembre dernier par le président de la République sortant Milos Zeman (Parti des droits des citoyens, SPOZ) afin de pouvoir participer au Conseil européen les 14 et 15 décembre à Bruxelles. Le dirigeant d'ANO a formé son gouvernement le 13 décembre. Il compte 14 ministres, tous membres d'ANO. Le chef du gouvernement dispose désormais d'un mois pour obtenir la confiance des députés. Le chef de l'Etat Milos Zeman a toutefois promis à Andrej Babis de lui accorder une seconde chance de former un gouvernement dans le cas où il échouerait à recueillir une majorité de voix à la Chambre des députés.

La fonction présidentielle en République tchèque

Le président de la République tchèque est élu au suffrage universel direct depuis le 1er octobre 2012. Pour se présenter au scrutin présidentiel, tout candidat doit recueillir le parrainage d'au moins 20 députés ou d'au moins 10 sénateurs ou encore les signatures de 50 000 électeurs.

Le chef de l'Etat représente la République tchèque à l'étranger. Il négocie et ratifie les traités internationaux et il est le chef des forces armées. Il dispose du pouvoir de renvoyer une loi adoptée devant le parlement, à l'exception des lois constitutionnelles. Le président de la République nomme les juges de la Cour constitutionnelle, son président et ses vice-présidents et les membres du conseil bancaire de la Banque centrale tchèque.

Le Sénat peut, avec l'accord de la Chambre des députés, déposer une plainte contre le chef de l'Etat devant la Cour constitutionnelle, non seulement pour trahison mais également si la chambre haute estime que le président de la République a violé la Constitution ou l'ordre constitutionnel. Une telle plainte nécessite toutefois le vote des 3/5e des sénateurs et des 2/3 des députés.

La loi électorale tchèque limite les dépenses de campagne des candidats à la magistrature suprême à 40 millions de couronnes (soit 1,5 million €) (50 millions de couronnes pour les 2 tours de scrutin, soit 2 millions €).

9 personnes sont officiellement candidates à l'élection présidentielle des 12 et 13 janvier prochains:

– Milos Zeman (Parti des droits des citoyens, SPOZ), 73 ans, président de la République sortant et ancien Premier ministre (1998-2002). Il a obtenu 113 000 signatures d'électeurs ;

– Jiri Drahos (indépendant), ancien président de l'Académie des sciences, soutenu par l'Union chrétienne-démocrate-Parti du peuple (KDU-CSL), parti centriste emmené par Pavel Belobradek, et Maires et indépendants (STAN), parti dirigé par Petr Gazdik. Il a recueilli 142 000 signatures d'électeurs ;

– Michal Horacek (indépendant), entrepreneur, auteur, compositeur, journaliste et producteur de musique. Il a obtenu 86 000 signatures d'électeurs ;

– Mirek Topolanek (indépendant), soutenu par le Parti démocrate civique (ODS), ancien Premier ministre (2006-2009) et homme d'affaires. Il a obtenu le parrainage de 10 sénateurs ;

– Vratislav Kukhanec (indépendant), ancien directeur de Skoda auto. Il a recueilli le soutien de 23 députés ;

– Jiri Hynek (indépendant), président de l'Association pour les armes et la défense de l'industrie tchèque, a obtenu le parrainage de 22 députés ;

– Pavel Fischer (indépendant), directeur de l'institut d'opinion STEM, ancien ambassadeur de la République tchèque en France (2003-2010). Il a recueilli le soutien de 17 sénateurs ;

– Marek Hilser (indépendant), médecin et activiste civique. Il a obtenu le parrainage de 11 sénateurs ;

– Petr Hannig, président de Rozumi (Parti du bon sens), chanteur, compositeur et producteur de musique. Il a recueilli le soutien de 20 députés.

Il est intéressant d'observer qu'aucun parti ne présente son propre candidat, chaque parti politique a bien compris la méfiance qu'il suscite chez les électeurs qui préfèrent se prononcer pour une personnalité indépendante.

La campagne électorale

Le président de la République sortant Milos Zeman a annoncé le 9 mars dernier qu'il souhaitait concourir pour un 2e mandat à la tête de la République tchèque. Il fait campagne avec le slogan Zeman znovu (Zeman encore une fois). Selon les enquêtes d'opinion, le chef de l'Etat devrait atteindre le 2e tour de scrutin des 26 et 27 janvier prochain. Ses problèmes de santé pourraient cependant compliquer sa campagne électorale et compromettre son éventuelle réélection.

Jiri Drahos et Michal Horacek apparaissent comme les deux principaux challengers du président sortant. Selon le dernier sondage réalisé par l'institut Stem/Mark début décembre, Milos Zeman arriverait en tête du 1er tour de scrutin des 12 et 13 janvier avec 33% des suffrages ; Jiri Drahos en recueillerait 22%, Michal Horacek 16% et Pavel Fischer, 5%. Les 5 autres candidats recueilleraient chacun moins de 5% des voix.

Une élection présidentielle tchèque à l'issue très incertaine

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