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Corinne Deloy,
Fondation Robert Schuman
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ENCorinne Deloy
Fondation Robert Schuman
Une large majorité des Britanniques se sont prononcés pour le maintien de leur mode de scrutin pour l'élection des membres de la Chambre des Communes (First past the post, littéralement : le premier qui arrive au poteau, référence au langage des courses hippiques) lors du référendum le 5 mai. Les Libéraux-Démocrates (Lib-Dem), dirigés par le vice-Premier ministre Nick Clegg, avaient obtenu l'organisation de cette consultation populaire en "échange" de leur participation à la coalition gouvernementale dirigée par le Premier ministre David Cameron (Parti conservateur). Les 2/3 des électeurs (67,87%) ont répondu "non" à la question suivante : "Aujourd'hui, le Royaume-Uni utilise le système de vote First past the post pour élire les membres de la chambre des Communes. Ce mode de scrutin doit-il être abandonné en faveur du vote alternatif ?". Un tiers (32,09%) se sont prononcés en faveur d'un changement de mode de scrutin. Sur 440 circonscriptions, seules 10 ont voté majoritairement en faveur du système de vote alternatif : Hackney (60,68%), Glasgow Kelvin (58,8%), Haringey (56,62%), Islington (56,92%), Lambeth (54,69%), Cambridge (54,32%), Oxford (54,11%), Southwark (52,73%), Camden (51,40%) et Edimbourg central (51,36%).
Le taux de participation a été plus élevé que ne l'avaient prévu les analystes politiques et s'est établi à 41,97%. L'Ecosse a été la plus civique : plus de la moitié des électeurs ont voté au référendum mais les Ecossais étaient également appelés à renouveler leur parlement régional en même temps que le référendum. Londres, qui n'était concerné par aucun autre scrutin local, a été la moins participative. Seuls 35,4% de ses électeurs sont allés voter.
Les partisans du "non" au référendum, et notamment les Conservateurs, ont finalement convaincu les Britanniques des mérites du First past the post, système stable et simple qui permet de produire de solides majorités en contenant les partis extrémistes et du fait que le vote alternatif, complexe, ne constituait pas une réelle avancée.
Par ce référendum, comme à travers les élections régionales et locales qui avaient lieu le même jour, les Britanniques semblent surtout avoir souhaité sanctionner les Libéraux-Démocrates auxquels ils reprochent d'avoir renié certaines de leurs promesses de campagne et cautionné la politique d'austérité mené par le gouvernement. Comme souvent lors d'un référendum, les Britanniques ont donc davantage répondu à ceux qui leur posaient la question, en l'occurrence aux Libéraux-Démocrates qui étaient à l'initiative de cette consultation populaire, qu'à la question posée.
Le 5 mai, les Libéraux-Démocrates ont perdu environ la moitié de leurs conseillers municipaux et un grand nombre de leurs conseillers régionaux en Ecosse où ils se sont effondrés. Le leader du parti dans la région, Tavish Scott, a d'ailleurs démissionné de ses fonctions après le scrutin. A Liverpool, l'ancien leader de la ville (1998-2005), Mike Storey (Lib-Dem), a été battu par le travailliste Jake Morrison tout juste âgé de 18 ans. Les Lib-Dem ont également essuyé un revers symbolique en perdant la ville de Sheffield, fief du vice-Premier ministre Nick Clegg, au profit du Parti travailliste.
"C'est un sacré coup dur pour les partisans comme moi de la réforme" a déclaré le leader libéral-démocrate à l'annonce des résultats du référendum. "Le résultat est clair. En démocratie, lorsque l'on pose une question aux gens et que la réponse est aussi limpide, vous devez l'accepter" a-t-il souligné. Il a promis d'en tirer les leçons et de redoubler d'efforts avant de rejeter l'idée que les Libéraux-Démocrates puissent envisager de quitter la coalition gouvernementale. "Nous devons créer des emplois. C'est le travail que nous avons commencé et que nous allons mener à bien" a indiqué Nick Clegg. Le Premier ministre conservateur David Cameron a précisé: "Je suis absolument déterminé à faire en sorte que ce gouvernement de coalition, que je pense bénéfique pour le pays, fonctionne pendant les 5 années de la législature".
Les élections locales et le référendum étaient le premier test important pour la coalition gouvernementale depuis mai 2010. Si le Parti libéral-démocrate a perdu la moitié de ses sièges de conseillers municipaux, les Tories en ont gagné, notamment sur les Libéraux-Démocrates dans le sud du pays.
David Cameron, qui a activement mené campagne pour le "non" au référendum, est donc le gagnant du scrutin. "Le rejet du vote alternatif par les électeurs est clair et retentissant" a déclaré le chef du gouvernement qui a souligné que les Britanniques "souhaitaient maintenant que le gouvernement poursuive son travail et s'occupe dans l'intérêt général des problèmes auxquels fait face le pays". Si la coalition gouvernementale ne devrait effectivement pas éclater, celle-ci est cependant fragilisée par la déroute du Parti libéral-démocrate et les frictions entre les deux partis qui la composent pourraient s'accentuer.
Le leader du Parti travailliste, Ed Miliband, qui s'était prononcé pour le "oui" au référendum tandis que son parti était divisé sur le sujet, a admis être "déçu" par les résultats. "Le peuple a parlé clairement et j'accepte le verdict" a-t-il indiqué. Le leader de l'opposition a cependant affirmé que le système électoral devait être amélioré de façon à permettre un plus fort engagement de la population. Le Labour peut toutefois se réjouir des résultats qu'il a obtenus aux élections locales où il a cependant moins progressé qu'attendu. Les Travaillistes sont en recul en Ecosse (- 7 sièges au parlement écossais qui en compte 129) où le Parti national écossais (SNP) d'Alex Salmond a effectué une spectaculaire percée (+ 23 sièges). Iain Gray, leader du Parti travailliste en Ecosse, a démissionné de ses fonctions à l'issue du scrutin. Le Labour se maintient au Pays de Galles où il devrait poursuivre à la tête de la région son alliance avec le parti nationaliste gallois Plaid Cymru (PC) dirigé par Ieuan Wyn Jones.
La théorie des référendums de Peter Kellner, analyste à l'institut d'opinion YouGov, selon laquelle le statu quo prévaut dans la grande majorité des consultations populaires s'est une nouvelle fois vérifiée. Le résultat du 5 mai aura pour conséquence de faire disparaître pour très longtemps la réforme électorale de l'agenda politique.
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